Il y a à boire et à manger

Une équipe du Canard a été reçue par le patron de Mutandis Adil Douiri à l’occasion de l’annonce de son rachat d’une marque d’eau minérale…

Il paraît que vous venez de finaliser une opération  de rachat de Aïn Ifrane…

Absolument.  Une eau minérale manquait à mon tableau de chasse composé d’une marque de jus d’orange industriel récemment rachetée, une gamme de détergents, les bouchons alimentaires  et quelques boîtes de sardine…

Pourquoi  ce rachat  à 380 millions de DH ?

La prise de contrôle d’une eau réputée de source est la goutte qui va faire déborder les bassins généreux de mon business qui même s’il ne coule pas toujours de source  a l’avantage d’être  particulièrement liquide.

Vous avez pourtant le profil de quelqu’un censé investir dans le business High-Tech, l’intelligence artificielle et la nouvelle économie. Mais vous mettez vos billes et surtout celles des autres dans des secteurs traditionnels…

Effectivement,  j’estime être sans fausse modestie  aussi intelligent qu’un Bill Gates ou d’un Elon Musk pour  me lancer dans des projets High-Tech ou des véhicules futuristes. Mais en bon Marocain  qui n’investit un dirham qu’une fois assuré d’en gagner 100 les doigts dans le nez, j’ai fait le choix de m’enrichir avec mes partenaires dans des métiers de rente et à opérer dans des marchés  captifs où le risque est presque nul, en relation essentiellement avec les biens de consommation liquide. Chat échaudé craint l’eau froide…

Mais encore ?

Aussitôt après mon départ du ministre du Tourisme et de l’Artisanat, j’ai lancé en 2010  un business d’artisanat haut de gamme et innovant  sous la marque Fenyadi avec des showrooms notamment à Casablanca en pensant qu’il  y avait une opportunité à saisir dans un artisanat national modernisé.   Cinq ans après, j’ai fourgué l’affaire qui commençait à tourner au gouffre financier pour me positionner sur le créneau du gain rapide, volumineux et garanti. J’ai failli boire la tasse.

Mais le business  c’est la prise de risque ?

C’est ce qu’on raconte dans les livres et les beaux discours sur l’investissement. Au Maroc, les meilleures  affaires sont offertes par le foncier et l’immobilier,  les secteurs avec licences d’exploitation comme la pêche, les carrières de sable  ou les mines, l’industrie alimentaire adossée  à la farine soutenue, l’agriculture grassement subventionnée,  les aliments pour bétail…

Quid des secteurs technologiques à haute valeur ajoutée ?

Dans l’investissement au Maroc, il y a à boire et à manger. Les secteurs que vous avez évoqués sont réservés  au capital étranger. C’est lui qui possède ce qu’il faut pour les monter au Maroc. On peut aussi faire aisément fortune au Maroc en vendant aux pouvoirs publics de faux plans de développement comme le Plan Azur. C’est le principal enseignement que j’ai tiré de mon expérience gouvernementale, je dois le reconnaître, est riche et enrichissante.  

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