Une équipe du Canard a rencontré Abdelilah Benkirane juste après son élection à la tête du PJD. L’ex-nouveau président du PJD croit toujours en sa bonne étoile.
On s’attendait à une nouvelle figure comme leader du PJD pour négocier la phase post raclée électorale, surtout que vous vous êtes retiré de la vie politique. Et c’est vous que les congressistes, à l’issue du congrès extraordinaire à fin octobre, ont fait revenir…
Je suis malgré moi un revenant revenu de tout. Mais pour mes amis désemparés et perdus, rongés par le doute, je suis leur seule planche de salut pour ne pas périr et prendre le risque de disparaître de la carte politique avec barbes et babouches.
Reste que mon retour forcé est la preuve que le PJD c’est Benkirane et Benkirane c’est le PJD. Les deux se confondent et l’un ne peut fonctionner sans l’autre.
La période Al Othmani, qui a tourné au désastre pour le parti, a bien montré cette réalité en l’accentuant.
Le changement est donc en marche?
Et comment ! Le changement pour le PJD c’est mon retour en faiblesse, diront les méchantes langues, puisque j’hérite d’une formation décrédibilisée, affaiblie et électoralement agonisante.
Comment allez-vous faire pour faire revenir justement votre matelas électoral qui vous a permis de gouverner le pays pendant deux mandats ?
Les blagues, ma chère ! Amuser le petit peuple en lui faisant oublier les mille et un problèmes de son quotidien difficile. La halqa politique c’est mon arme de distraction massive qui m’a permis d’asseoir ma popularité auprès des Marocains et de me faire aimer par eux. Talent politiquement inestimable que mon prédécesseur, sinistre personnage devenu la risée de tous à défaut de faire savoir rire, ne possède pas. Et c’est ce qui a été principalement à l’origine de notre effondrement électoral.
Mais les temps ont changé. Les Marocains ne veulent plus d’amuseurs publics qui au fond se moquent d’eux… Ils réclament des solutions à leurs problèmes…
Ce n’est pas vrai. Les Marocains sont les champions de la débrouillardise. Trimant à longueur de journée pour survivre, ils ont besoin d’un vrai défouloir que je leur ai offert gratis tout au long de mon mandat. Que veut le peuple ?
Avez-vous réfléchi à votre première action de revenant politique ?
Je compte inaugurer mon retour par la publication d’un recueil de toutes mes blagues politiques avec le sponsoring du cabinet psychiatrique de Al Othmani. Ensuite, j’ai l’intention de lancer une chaîne Youtube destinée à fidéliser mon fan club et à reconstituer le réservoir électoral du parti.
Mais Benkirane c’est du passé décomposé…
Non, je suis l’avenir. Ma cartomancienne attitrée m’a assuré l’autre jour que toutes les chances sont de mon côté pour redevenir Premier ministre. Au secours, je vais revenir !