Cette fois-ci, le Canard a décidé de donner la parole à deux gaillards bien portants, Rachid et Hassan, qui risquent de mourir de la maladie des poches vides.
Quels sont les symptômes du mal des poches vides ?
Hassan : L’agressivité, la colère, le désespoir et la perte du goût de la vie.
Les cas poches vides peuvent-ils être asymptomatiques ?
Rachid : Oui. Ceux-là ne développent aucun signe extérieur du mal de la mouise qui les ronge essentiellement de l’intérieur. Cette catégorie peut être tentée par le suicide…
Est-ce que la maladie des poches vides est contagieuse ?
Rachid : Cela dépend de la gravité de l’état du malade et du degré de son dénuement. Oui, il peut transmettre aux personnes contact sa détresse et son angoisse…
Racontez-nous votre mésaventure avec le Covid-19 ?
Rachid : Je n’ai pas attrapé le Covid-19 mais à la place j’ai chopé pire, la mouise. Et je vous assure que la mouise ce n’est pas un coup vide. C’est un vrai coup de massue plein.
Pourquoi vous dites ça ?
Rachid : Parce que j’ai tout perdu, à commencer par mon gagne-pain de cameraman dans une agence de l’événementiel qui s’est vu imposée, comme ses consœurs du secteur, un chômage technique ravageur qui dure depuis le mois de mars dernier. Plus d’événementiel, seul le Covid fait l’événement !
Et vous Hassan ?
Hassan : Faute de touristes qui constituent l’essentiel de ma clientèle, le Covid-19 a fait tarir ma source de revenus comme artisan spécialisé dans la maroquinerie dans la médina de Marrakech. J’envie les ronds-de-cuir qui ne subissent pas comme moi les effets désastreux de la pandémie. Être un indépendant au Maroc, sans aucune protection, ça peut vous coûter la peau des fesses.
Vous vivez comment Rachid ? ?
Rachid : Plus de revenus, je n’en reviens toujours pas. Je ne sais même si je serai un jour un revenant… Comme je ne touche pas de salaire, j’ai vécu sur mes économies que j’ai presque épuisées. C’est épuisant.
Votre employeur ne vous rémunère plus ?
Rachid : Mon employeur qui était créateur d’événements, conférences de presse et autres séminaires, est devenu un non-événement. Chez le gouvernement, la détresse de notre profession n’est pas d’actualité! Côté salaire, mon patron s’est payé ma gueule en m’expédiant ainsi que mes collègues à la CNSS pendant les trois premiers mois pris en charge par cette Caisse. De 9.000 DH par mois (sans compter les extras), j’ai dégringolé à 2.000 DH. Du coup, je n’arrive plus honorer mes crédits logement et voiture et même nourrir correctement ma famille. Je suis devenu un nouveau pauvre et des comme moi le Maroc en a produit par milliers au cours des derniers mois en attendant. Côté détresse sociale, notre pays est en passe de devenir une puissance régionale…
Et vous Hassan ?
Hassan : En ce qui me concerne, c’est le Ramed, 1.000 DH par mois, qui je me suis infligé. Cette misère c’est comme une goutte d’eau qu’on verse à un condamné pour le maintenir en vie. De quoi s’acheter du pain et des olives et remplir la théière et une fois par semaine la gamelle de quelques légumes !
Le gouvernement planche sur les prochaines législatives de 2021. Pensez-vous que la vraie urgence est électorale ?
R & H : Avec ses décisions déroutantes en pagaille, le gouvernement islamiste nous laisse sans voix et montre chaque jour qu’il est déconnecté des réalités du pays. Il ne se rend pas compte que le Covid tue beaucoup plus l’activité économique, le gagne-pain des petites gens, que les vies humaines ?