Une équipe du Canard a interrogé le président de la première Chambre Rachid Talbi Alami sur le phénomène de l’absentéisme qui a repris de plus belle juste après l’ouverture du Parlement.
Quelque 234 députés ont séché la séance plénière du mardi 18 octobre consacrée au vote de la nouvelle charte sur l’investissement, soit quelques jours après l’ouverture du Parlement par l’allocution royale du vendredi 14. Ils sont repartis en vacances ?
Je pense qu’ils fuient les nombreux dossiers stratégiques sur lesquels ils doivent plancher comme le stress hydrique et l’investissement productif soulevés par le souverain dans son discours. Du coup, les députés les plus paresseux ont préféré repartir en vadrouille pour se reposer…
Une manière d’anticiper le repos par rapport à une charge de travail à venir ?
Absolument. Le travail parlementaire n’intéresse qu’une poignée de députés engagés et consciencieux. Le gros des troupes, autant de la majorité que de l’opposition, ne fait pas le déplacement. Résultat : L’assiduité c’est l’exception.
On dirait que l’absentéisme sous votre présidence est revenu en force alors qu’il a diminué sous l’époque de Habib El Malki…
C’est vous qui le dites. Mais je compte imposer mon absence d’autorité qui fait partie de mon style.
Des sanctions sévères en vue pour améliorer le taux de présence ?
Mon prédécesseur a tout essayé pour dissuader les absentéistes dont l’installation d’un dispositif de pointage électronique pour vérifier l’assiduité des parlementaires et la mise en place de sanctions pécuniaires avec publication des noms des absentéistes…En vain. Je ne sais pas ce qu’il faut faire pour avoir une Chambre constamment pleine. Il ne reste plus qu’à leur envoyer la force publique pour les faire venir de force à l’hémicycle. Surtout qu’il s’agit d’un travail qu’ils ont choisi d’accomplir en se présentant aux élections et pour lequel ils sont grassement payés…
Comment justifient-ils leur absentéisme ?
La plupart des députés usent, voire abusent des certificats maladie généralement faciles à obtenir. Les malades imaginaires sont partout, c’est un lobby très fort et agissant.
Pourquoi dans ces conditions ne pas créer le Prix de l’absentéisme parlementaire, histoire de célébrer l’absentéisme comme art emblématique de la politique à la marocaine ?
Je vais y réfléchir et tant qu’à raisonner par l’absurde je peux déjà en attendant la création de ce Prix lancer un tour de table pour trouver des sponsors.
Des sponsors ?
Des sponsors pour fabriquer de beaux trophées originaux avec un design d’enfer. Je sens que je vais marquer mon mandat de président de cette première chambre d’amis.
Quelle solution contre l’absentéisme parlementaire ?
Je n’en vois qu’une seule: instaurer le téléparlement. C’est le meilleur moyen d’éviter les absences physiques et de promouvoir les présences virtuelles.