25 ans de règne : Le Roi et son « job »

Le souverain a sillonné toutes les régions du Royaume et l'ensemble des territoires même les plus enclavés.

Le volontarisme du Souverain n’a pas fléchi tant sur l’édification à terme d’un « État social » que sur les leviers stratégiques d’un nouveau modèle de développement.

On prête à l’ancien président Mitterrand, lors de sa visite officielle au Maroc, en janvier 1983, cette réflexion amère à l’adresse de son hôte, SM Hassan II: « La monarchie a le temps devant elle pour entreprendre de grands projets… » C’est vrai: la temporalité monarchique au Maroc surtout, se distingue par cette particularité: elle enjambe le calendrier électoral des gouvernements; des elle s’emploie à mettre en perspective les politiques publiques cabinets en responsabilité; elle les soutient mais en les recadrant à l’occasion. Pourquoi ? Parce qu’elle transcende les corporatismes, les intérêts des lobbies et les préoccupations électoralistes. C’est çà le « métier de Roi » – le job…

Des atouts

En accédant au Trône, voici un quart de siècle, le nouveau Souverain était préparé depuis des lustres aux responsabilités de sa charge dynastique. Aux côtés de son Auguste Père, il a pu capitaliser au fil des ans une précieuse expérience sur le déploiement de la vie politique nationale passablement cabossée en différentes circonstances, sur une certaine forme de gouvernance appelée à y faire face, sur le comportement des acteurs partisans ainsi que sur un environnement régional, continental et international bien éloigné des principes de la Charte des Nations Unies de 1948. Avec son accession au Trône, il avait de nombreux atouts: un pays pacifié, un cadre institutionnel inclusif marqué par une séquence laborieuse de transition démocratique et politique consacrée par le gouvernement d’alternance dirigé par le Premier secrétaire de l’USFP, Me. Abderrahmane El Youssoufi – opposant historique – nommé en mars 1998, associant les partis du mouvement national ( USFP, PI, PPS et PSD) à deux autres, dits « administratifs » ( RNI et MP)… Les premiers actes de Mohammed VI ont eu une forte charge symbolique : le retour d’Abraham Serfaty bien sûr le 30 septembre 1999 mais le discours sur le » nouveau concept d’autorité » (le 9 octobre 1999 à Casablanca, surtout son voyage dans le Rif deux mois plus tard -une tournée illustrant la fermé volonté de tourner une page pour en ouvrir de nouvelles pages sur la réconciliation nationale. Il entendait ainsi œuvrer à une appropriation mémorielle historique et collective d’un passé difficile, avec ses séquelles. C’est dans cette même ligne qu’a été créée en janvier 2004 l’Instance Equité et Réconciliation (IER) comme cadre institutionnel de réconciliation du Maroc avec son passé politique. Réparation et justice : voilà les credos de cette expérience réussie, citée en exemple de justice transitionnelle.

C’était là l’une des composantes d’un référentiel consacrant les droits fondamentaux constitutifs d’un projet de société démocratique, solidaire et moderniste. La même année, a été adoptée le Code de la Famille dont la réforme avait été annoncée dans le discours. Un « bond en avant », comme l’a précisé le Souverain, devant le Parlement qui devait être revu et corrigé compte tenu de près de deux décennies de pratique institutionnelle, judiciaire et sociale.  » Dépasser les défaillances et les aspects négatifs révélés par l’expérience… Refondre certaines dispositions détournées de leur destination première »: voilà entre axes de la réforme dont un projet lui a été soumis à la fin mars dernier par une Commission consultative ad hoc et sur laquelle planche ces semaines le Conseil supérieur des Oulémas. Au titre de ce chapitre social, une mention particulière doit être faite à l’INDH lancée un an plus tard, en 2005. Une nouvelle vision et une stratégie d’avenir éligible aux objectifs du Millénaire auxquels a souscrit le Maroc pour le développement visant l’éradication de la pauvreté. L’élément humain est ainsi au cœur des politiques de développement dans le cadre d’une double préoccupation:  la cohésion sociale et la solidarité nationale. 

Un grand chantier qui a été actualisé, réarticulé pour promouvoir son rôle d’intégration des secteurs informels. Les résultats sont probants : dans le milieu rural et les quartiers périurbains des grandes villes, des activités génératrices de revenus de près de 10.000, 43.000 projets et un investissement total de près de 43 milliards de DH au profit de plus de 10 millions de bénéficiaires. Dans le domaine de la protection sociale, après l’expérience du Ramed qui n’a pas porté tous ses fruits, c’est l’AMO qui est instituée en 2020 avec sa généralisation en 2022. L’élargissement de la protection sociale se fait ensuite à de nouveaux secteurs : une indemnité mensuelle de 500 DH, des allocations familiales revalorisées et élargies, une indemnité pour perte d’emploi, le soutien à 90.000 veuves, etc.

Le bien-être des Marocains

Roi du Maroc, SM Mohammed VI entend œuvrer pleinement aussi pour le bien-être des Marocains. Il a ainsi sillonné toutes les régions du Royaume et l’ensemble des territoires même les plus enclavés. Conditions de vie et de travail, santé, habitat, éducation : voilà son projet de développement durable. L’approche est multisectorielle. Elle vise à donner forme et contenu à des droits et à des libertés à exercer pleinement parce que c’est la dignité humaine qui est en cause. Une nouvelle approche s’est imposée pour mesurer l’efficience des mesures prises dans le cadre des politiques publiques. 

La croissance a été variable avec une moyenne de 5/6 durant la première décennie pour chuter à un modeste taux de 3% environ au cours de celle qui a suivi. De grands chantiers structurants ont été réalisés dans les infrastructures. Reste la problématique du chômage qui s’est située en moyenne autour de 10% pour s’aggraver ces dernières années. Une question sociale de premier plan qui reste à l’ordre du jour. La réduction du chômage ne se décrète pas mais s’inscrit dans une stratégie appréhendant les multiples aspects du développement. A marche forcée, le taux de pauvreté a été réduit de 14 %, en 2014, à 4,5% aujourd’hui, selon les statistiques du HCP. Dans tous les domaines, des résultats positifs ont été enregistrés (scolarisation, formation professionnelle, droits des enfants, etc). Le volontarisme du Souverain n’a pas fléchi tant sur l’édification à terme d’un « État social » que sur les leviers stratégiques d’un nouveau modèle de développement. Ce cahier des charges, il l’assume pleinement et il attend instamment que les acteurs institutionnels et partisans soient à la hauteur de ces défis du Maroc de 2024 et de la prochaine décennie. 

Les atouts ne manquent pas au Royaume dans le concert des nations : la stabilité politique qui tranche avec tant de convulsions dans les latitudes d’Afrique du Nord, le monde arabe et le continent; un projet de société consensuel avec un esprit national partagé; des potentialités humaines et économiques importantes; enfin, un leadership de SM Mohammed VI  moral, politique et diplomatique qui a rehaussé l’influence et la crédibilité du Maroc. Tout cela s’estconstruit en plus de deux décennies, pas à pas, pierre par pierre. Une gouvernance royale…

Mustapha SEHIMI, professeur de droit ( UMV Rabat) Politologue

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