La CAN 2025 et le Mondial 2030 ont transformé le Maroc en chantier à ciel ouvert dans une dynamique sans précédent, au grand bonheur des opérateurs du BTP. Ponts, trémies, routes, voies ferrées , stades… Le tout sur fond des projets de requalification urbaine dans certaines grandes villes abritant les compétitions . Il va sans dire que pour construire ou reconstruire, la démolition de l’existant est inévitable . D’où la nécessité de recourir à l’expropriation pour utilité publique (EUP), une prérogative régalienne encadrée par un bouclier juridique qui protège contre les abus et l’arbitraire. Objectif : faire respecter le droit de propriété, un principe gravé dans le marbre de la constitution, en vue de garantir un équilibre entre intérêt général et droits individuels.
Mais dans la pratique, il arrive souvent que la procédure accouche de certaines dérives, à l’image de celles qui ont éclaté au grand jour à l’occasion d’opérations spectaculaires menées, notamment à Casablanca et Rabat. Des dérives pouvant dégager les relents d’abus de pouvoir qui vont de la sous-évaluation systématique des biens expropriés, le recours excessif aux procédures d’urgence avant l’accomplissement des formalités légales, ou le flou entourant l’intérêt général et les intérêts particuliers… Les expropriations contestables, non conformes aux règles de l’État de droit, ne sont pas l’apanage du Maroc. L’EUP est un problème juridique universel complexe qui touche, y compris les nations développées aux traditions démocratiques ancrées.
Communiquer, convaincre, faire adhérer et promouvoir le dialogue entre les institutions et les citoyens.
Or, ces expropriations sujettes à caution ne sont pas généralement le fruit d’une démarche délibérée. Elles sont très souvent dictées par l’urgence des travaux d’intérêt général à effectuer qui exigent de prendre possession du bien plus rapidement qu’en procédure ordinaire qui peut parfois s’enliser dans la lenteur des processus judiciaires et des expertises et contre-expertises… Face à cette situation d’urgence, force est de constater que la communication, facteur déterminant pour expliquer en toute transparence les enjeux de l’opération d’expropriation aux propriétaires tout en les rassurant, est absente du processus national des EUP. Ce qui est regrettable et préjudiciable à l’image du Maroc et à sa perception en interne et à l’international…
A cet effet, la séquence qui domine et fait le tour des réseaux sociaux montre les représentants des autorités locales débarquant sur les lieux avec les pelleteuses et entrant en litige avec les expropriés qui s’opposent de toutes leurs forces à leur entreprise de démolition.
Cette conflictualité renforce le sentiment chez le citoyen que l’État de droit est piétiné, que les droits fondamentaux ne sont pas respectés et que l’administration fait peu de cas de la loi. C’est pour cela que les Wilaya, en première ligne sur les opérations d’expropriation et de démolition ainsi que de libération du domaine public, gagneraient à sortir de leur mutisme en accompagnant leurs actions par un travail de communication active auprès des concernés et du grand public. Communiquer, convaincre, faire adhérer et promouvoir le dialogue entre les institutions et les citoyens. Un chantier essentiel pour le fonctionnement d’une société démocratique qui reste à bâtir…