Quinze élèves par classe… C’est une des conditions requises pour permettre à l’école publique de dispenser un enseignement de qualité ! Ce n’est pas moi qui le dis, c’est notre ex-président de la Commission de réflexion sur le nouveau modèle de développement… Et désormais ministre de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports. Dont acte! Le Maroc voit désormais grand et a enfin compris que le plus rentable des investissements est celui qui est consenti dans la formation et l’éducation…
Après la généralisation en cours du préscolaire, priorité donc aux classes allégées… Finie l’époque des écoles surpeuplées et des instituteurs écrasés sous le poids de la charge de travail… Reste à savoir comment on pourra financer ce vaste chantier qui suppose un effort colossal tant sur le plan autant logistique qu’humain.
Pour autant, ce programme ambitieux et louable ne garantit en rien que l’objectif escompté puisse être atteint… Il fut pourtant un temps où on se posait moins de questions et où on faisait beaucoup avec peu de moyens, parce que la motivation et le militantisme palliaient les lacunes et les tâtonnements… Un temps où l’enseignement public était d’une qualité certaine, en dépit des classes de quarante élèves et plus… Où la langue de Molière tenait sa juste place dans les programmes et où plusieurs matières scientifiques étaient dispensées en français, permettant aux élèves d’être parfaitement bilingues et, au-delà, d’acquérir une double culture indispensable pour l’épanouissement et la communication… Ça se passait dans les années soixante et soixante-dix… Dans de grandes écoles héritées de la colonisation, à l’architecture mauresque…
Des écoles austères mais spacieuses avec des cours de récréation plantées d’arbres majestueux où les élèves pouvaient jouer, pratiquer des activités sportives et se ressourcer… Des écoles qui bénéficiaient de réfectoires où les élèves nécessiteux se voyaient offrir un repas chaud à midi… Et pas que des lentilles ou des haricots ! En ces temps-là, les maîtresses et les maîtres étaient motivés et considéraient leur profession comme un sacerdoce… Les élèves étaient studieux et respectueux…
Le nombre de livres scolaires était réduit au strict minimum… Des livres qui ne changeaient pas chaque année, et que les aînés transmettaient à leurs cadets… C’était un temps où les parents étaient pour la plupart analphabètes et considéraient, à juste titre, l’école comme un véritable ascenseur social… Oui, en ce temps-là, les élèves étaient plus d’une quarantaine par classe. La même classe recevait même deux groupes quotidiennement, respectivement à 7 heures du matin et à 13 h, optimisation oblige ! Les élèves n’étaient scolarisés qu’à partir de 7 ans et directement en cours préparatoire… La maternelle, on ne connaissait pas et la crèche encore moins ! Et pourtant, cette école publique a donné au pays nombre de ses cadres les plus valeureux… Elle représentait l’espoir en un avenir meilleur pour les plus défavorisés…
Alors, des classes de quinze élèves, pourquoi pas ? Mais l’essentiel, c’est le contenu et les perspectives… La réhabilitation de l’école publique passe d’abord par une clarification de ses missions et une refonte intégrale de ses programmes en vue de lui redonner son lustre d’antan et de justifier les investissements colossaux qui y sont consentis…