«Aussi riche que le roi », premier roman très réussi d’Abigail Assor, plonge dans la violence sociale du Maroc des années 1990 à travers le portrait d’une adolescente française, pauvre mais belle, en quête de vie meilleure. Avec ce premier roman, la jeune romancière marocaine dessine dans le décor de Casablanca une géographie sociale de son pays dans les années 1990, marquées par des disparités sociales très fortes et par des rapports de domination : des riches sur les pauvres, des hommes sur les femmes, les années d’avant 1998 et de la réforme du code du statut personnel, où le peuple tout entier est soumis aux injonctions religieuses et politiques…
Paru aux éditions Gallimard le 7 janvier 2022, dépeint sans concession la société marocaine dans les années 1990, à travers un portrait de la jeunesse dorée (ou pas) de Casablanca. « Années 1990, Sarah, 16 ans, vit dans une maison délabrée à l’orée d’un bidonville dans le quartier de Hay Mohammadi, au Nord de Casablanca avec sa mère Monique. La jeune fille côtoie au lycée français les enfants des familles riches françaises et marocaines, et se débrouille pour que personne ne découvre sa condition de « pauvresse ». La mère de Sarah a quitté la France quelque temps plus tôt avec son compagnon Didier et des rêves de vie meilleure. Mais ses espoirs se sont rapidement évaporés dans la chaleur de Casablanca en même temps que Didier, avec l’argent des projets. Mais cette condition de misère ne décourage pas Sarah. Ayant des ambitions pour son avenir, elle n’a pas tardé à comprendre qu’elle pouvait tirer avantage de sa beauté et traîne avec la jeunesse dorée dans le quartier d’Anfa, ses villas toutes blanches « comme à Los Angeles », ses palmiers, ses jaguars, ses gardiens, ses domestiques. Sarah a bien compris comment fonctionnent les garçons et s’en sert, ne serait-ce que pour boire un café, ou manger à sa faim. Le soir, quand elle rentre de ses longues virées dans les quartiers riches, elle retrouve Abdallah, un gosse du bidonville encore plus pauvre qu’elle, qui lui crie des insanités à travers la grille, et sa mère, qui ronfle sur le canapé quand elle n’est pas en train de vendre son corps pour survivre.
Parmi les enfants de riches que Sarah fréquente, « il y a Driss, un garçon pas comme les autres, bancal, décalé, pas très beau, obsédé par la mécanique et l’horlogerie, buvant de la menthe à l’eau quand les autres s’enivrent, et surtout, le plus riche de tous, « plus riche que le roi ». Sarah se met en tête de l’épouser, n’écoutant pas les conseils de son copain Yaya, un dealer excentrique, chauffeur de taxi à ses heures perdues. « Tu l’auras jamais Driss, il regardera jamais une pauvresse comme toi. »
Sûre d’elle-même, Sarah la grosse artillerie, Driss « le taiseux timide » tombe vite sous son charme. « Il devine vite ce que les autres n’ont pas vu, ne s’en offusque pas. Sarah est sa princesse. Il est désormais là pour elle, et aussi pour sa mère, ses voisins, pour la famille d’Abdallah. Sarah, qui ne pensait qu’à l’argent et à sa future villa à Anfa Supérieur, avec des couronnes, des diamants sur le sol, finit par s’attacher. »…