Quelques semaines suffisent-elles vraiment pour espérer un retour à la normale ou faudrait-il attendre plusieurs mois avant la fin du cauchemar ?
Un vent d’espoir a soufflé sur le Maroc après la propagation le 26 mars comme une trainée de poudre d’une bonne nouvelle qui reste cependant à confirmer par une source officielle : un patient hospitalisé à l’hôpital militaire à Rabat aurait guéri du Covid-16 au bout de six jours d’hospitalisation. Info ou intox ? Toujours est-il que l’annonce le 24 mars dans une circulaire signée par le ministre de la Santé Khalid Ait Taleb de l’« introduction de la chloroquine et l’hydroxychloroquine- deux antipaludéens-dans la prise en charge thérapeutique des cas confirmés au Covid-19 » a été globalement bien accueillie dans le pays. Cet optimisme tranche pourtant avec les réserves émises à l’étranger, notamment en France, par de nombreux scientifiques sur ce remède vanté par son promoteur, le professeur Didier Raoult. Malgré les critiques, l’Etat français, débordé face à la progression du virus, a fini par céder en autorisant « par dérogation à l’article L.5121-8 du code de la santé publique » le recours au traitement de M. Raoult pour soigner le Covid-19. Pris de court par la maladie qui commence à se propager à grande vitesse notamment à New York, les Etats-Unis ont décidé à leur tour sur décision de la FDA, la puissante Food & Drug Administration, d’autoriser le recours à la chloroquine en milieu hospitalier. Conforté par cette reconnaissance officielle, le chercheur persiste et signe, bravant les reproches qui continuent à pleuvoir. Vendredi 27 mars, il mettra en ligne sur le site web de l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection de Marseille qu’il dirige, une nouvelle étude sur l’hydroxychloroquine qui prouve selon lui son efficacité dans le traitement de la maladie. M. Raoult a dévoilé le 16 mars avoir administré son traitement à 20 patients de son service à raison de 600 mg d’ hydroxychloroquine par jour combinés à de l’azithromycine, un antibiotique macrolide.
« Nous confirmons l’efficacité de l’hydroxychloroquine associée à l’azithromycine dans le traitement du Covid-19 », écrivent M. Raoult et des collaborateurs. Tel n’est pas l’avis des experts qui contestent le bien-fondé des arguments de l’infectiologue marseillais. Principal reproche : L’absence de l’étude de M. Raoult du groupe contrôle (les malades qui ne reçoivent pas le traitement indiqué) qui serait de nature à permettre de savoir si l’amélioration de l’état de santé du malade est imputable au traitement.
Au-delà du gérable
Au bout de six jours de traitement, explique le microbiologiste, seuls 25% des cas traités étaient encore porteurs du virus alors que 90% de ceux qui n’ont pas pris le traitement étaient toujours positifs. Le 27 mars, il publiait de nouveaux résultats portant sur 80 patients Covid-19 tendant à confirmer l’efficience de cette association de médicaments: « Nous avons noté une amélioration clinique chez tous les patients de 86 ans sauf un décédé et un patient de 74 ans toujours en unité de soins intensifs » a-t-il indiqué.
Or, les effets indésirables de la chloroquine ne font aucun doute. En France, plusieurs cas de toxicité cardiaque, liés à des prises en automédication, ont été signalés chez des malades du Covid-19. D’où la nécessité d’éviter de se faire soigner en dehors du contrôle médical.
C’est dans ce contexte de polémique intense qui cacherait des enjeux financiers colossaux selon certains (Voir encadré) que le Maroc a autorisé sans hésitation l’administration du remède de M. Raoult aux patients du pays. Un remède sur lequel il mise grandement pour faire face au risque du débordement rapide de ses hôpitaux très peu équipés pour pouvoir soigner tout le monde si d’aventure l’épidémie continue son envolée au-delà du gérable. Pour le moment, le seul remède réellement efficace que des gouvernants, dépassés par les événements, ont trouvé pour contenir la propagation de la maladie a pour nom le confinement général, une mesure drastique qu’ils ont imposé à leurs populations dans de nombreux points de la planète touchés par le virus. Le Maroc a fixé la date de la levée de l’enfermement pour le 20 avril tandis que la France se prépare à un prolongement du confinement pour au moins six semaines. Quant à la Russie, longtemps insouciante, est entrée en confinement lundi 30 pour une durée indéterminée.
Privés de liberté de mouvement, les citoyens du monde entier espèrent vivement un retour rapide à la normale pour retrouver leurs habitudes d’avant. Or, il est fort à craindre que le confinement général à l’échelle mondiale ne soit reconduit pour quelques mois encore comme le prédisent certaines projections mathématiques réalisées par l’Imperial College de Londres. Motif : la probabilité d’un rebond de l’épidémie n’est pas à exclure en raison des porteurs asymptomatiques qui en voyageant pourraient réintroduire le virus dans la population si les mesures de confinement sont levées d’ici fin avril. Ce risque potentiel valide encore une fois moins la pertinence de la stratégie du confinement adoptée par de nombreux pays que celle du dépistage massif de la population pratiquée notamment par la Corée du Sud. Une stratégie qui a porté ses fruits puisque ce pays asiatique est parvenu à freiner l’expansion de la maladie et à aplatir la courbe des contaminations. Mais n’est pas Séoul qui veut.
Raoult, médecin du peuple malgré lui
Le 25 février 2020 au soir, le Pr Didier Raoult annonce que la chloroquine est « le traitement le moins cher et le plus simple pour traiter le coronavirus Covid-19 ». Il est immédiatement démenti par le ministère de la santé. Aussitôt, la polémique s’installe et va enfler au fil des jours, alimentée par des avis contradictoires relayés sur les plateaux de télévision de France. Il n’en fallait pas plus que pour que la Toile, qui affectionne les théories du complot, s’empare du sujet à coups de vidéos d’experts autoproclamés qui affirment que les attaques contre le professeur Didier Raoult sont orchestrées par le puissant cartel pharmaceutique qui veut privilégier la vente de ses médicaments antipaludiques hors de prix alors que la chloroquine proposée par le savant de Marseille associé à l’azithromycine coûte moins de 20 euros. Donc, toute cette controverse ne serait pas innocente, masquant des enjeux financiers colossaux. Le lobby des labos contre le médecin du peuple qui menacerait le développement durable de leurs profits ? Vite un vaccin contre la rapacité !