Un brouillon d’inculture à déchirer !

Chakib Benmoussa, un ministre sans vision politique…

Le ministre de tutelle Chakib Benmoussa, qui fait partie du club de ces hauts responsables crédités d’une réputation surfaite, mérite le tableau du déshonneur. Voici pourquoi.

Les cours sont toujours suspendus dans l’école publique, au grand malheur de millions d’élèves et de leurs parents en proie au désarroi total.  En cause, la décision des coordinations des enseignants du public de maintenir  leur grève malgré le gel du statut  unifié de la discorde, celui des fonctionnaires de l’Éducation, publié au BO du 9 octobre 2023. Une  résolution salutaire  prise  par le chef du gouvernement au terme de sa réunion  lundi 27 novembre avec les chefs des syndicats les plus représentatifs du secteur en présence du ministre de tutelle Chakib Benmoussa, et son collègue du Budget Fouzi Lekjaa et les titulaires des portefeuilles des Finances et de l’Inclusion Économique Nadia Fettah Alaoui et le très dynamique  Younes Sekkouri. Décision a été également prise de mettre fin aux ponctions des salaires grévistes mais pas pour les deux mois précédents et de procéder à la révision du statut dans son aspect salarial  par une commission ministérielle désignée à cet effet. Mais  les enseignants ont douché les espoirs des uns et des autres en exigeant le retrait pur et simple du statut unifié. Le bras de fer continue. L’impasse est totale.  Plus grave encore, le gouvernement semble démuni face à la crise sociale la plus aiguë que le pays ait connu depuis longtemps.
Résultat : le spectre d’un trimestre blanc se confirme avec tout ce que cela suppose comme conséquences fâcheuses sur la scolarité des élèves. La situation est particulièrement critique pour les bacheliers projetant de poursuivre leurs études à l’étranger, tenus d’intégrer dans leur dossier d’inscription leurs bulletins de notes. Cristallisant particulièrement le mécontentement, les salaires et autres indemnités consignés dans ce statut ne sont pas franchement  à la hauteur des coordinations contestataires. Jugez-en : un enseignant hors échelle perçoit un total ( salaire et indemnités) de 14.655 DH. Quant au salaire des enseignants du cycle primaire et secondaire  (échelle de 6 à 10), il  a été fixé exactement à 6.356 DH auquel s’ajoute des indemnités d’un montant de 4600 DH incluant les frais d’encadrement.  Question à mille boîtes de craies zéro poussière :  Peut-on aboutir à une école publique de l’excellence que tout le monde appelle de ses vœux  avec de tels niveaux de rémunération? Comment est-il possible de susciter des vocations éducatives avec une absence criante de motivation ?  Brillantissime, Benmoussa ! Il a dû se creuser bien les méninges pour reconduire l’école de la médiocrité et entretenir le  déclassement social du chef de classe. Tout ça manque franchement de classe. En fait, les principaux lésés dans cette crise malheureuse  sont les enseignants du primaire dont la charge de travail hebdomadaire compte autour de 30 heures contre 21 pour le collège et entre 18 et 20 heures pour le lycée. Ils sont d’autant plus lésés que les profs  du primaire ont  l’obligation dans le cadre du statut unifié décrié de travailler plus d’heures pour contribuer à diverses tâches pédagogiques visant à rehausser le niveau des apprentissages. Travailler plus pour gagner moins ! Drôle d’équation !
Les profs du secondaire, eux,   ne sont pas vraiment à plaindre puisque la majorité d’entre eux  émargent dans le secteur privé où ils pris l’habitude d’arrondir leurs fins de mois à  hauteur d’environ de 5.000 DH par mois (raison de 100 à 150 DH par séance) et plus pour les plus débrouillards.
C’est le personnel enseignant du primaire qui doit normalement bénéficier de l’attention particulière  du gouvernement par l’amélioration de sa situation matérielle et morale.  

Immense gâchis

La raison en est  évidente : C’est au cours du cycle élémentaire  qu’est assurée  l’acquisition du savoir fondamental que  sont la lecture, l’écriture et le calcul tout comme le développement de l’intelligence, le savoir-faire manuel et la sensibilité artistique… D’ailleurs, de nombreuses institutions nationales et internationales ont tiré la sonnette d’alarme  sur la faiblesse d’apprentissage des enfants marocains du primaire. La Banque mondiale  n’avait-elle pas publié il y a quelques années   une note de synthèse où elle a révélé que 66 % des enfants scolarisés ne savent pas lire à la fin du primaire, soulignant que cette situation alarmante, résidant  l’incapacité des enfants âgés de 10 ans à lire, dépasse 2,5 points en pourcentage, par rapport à la moyenne de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), et de 10,7 points de pourcentage comparée à celle des pays à revenu moyen-bas ?  Pas plus tard que 11 novembre 2022, Chakib Benmoussa himself a révélé, à l’occasion d’une conférence de presse consacrée à la nouvelle feuille de route de la réforme du système éducatif 2022-2026 censée promouvoir  la qualité de l’enseignement,  qu’environ 77% des élèves du primaire sont incapables de lire un texte en arabe de 80 mots, et 70% ne savent pas lire un texte en français composé de 15 mots. Or, ces lacunes gravissimes ne sont  pas  de nature à être résorbées  avec un statut unifié qui est loin de mettre  l’enseignant du cycle élémentaire au cœur  de la réforme. Il est clair comme l’eau de roche que l’appauvrissement de l’enseignant ne peut engendrer que l’indigence éducative dont le Maroc  doté pourtant d’innombrables atouts  n’arrête pas de payer le prix… Mais ce n’est pas étonnant que le pays soit gratifié de tels brouillons dangereux pour l’avenir de ce secteur stratégique lorsque l’on sait que le conseiller du ministre Chakib Benmoussa est un certain Youssef Saadani. C’est ce jeune aux allures de golden boy, crédité de l’on ne sait quel génie, qui a péroré dans de nombreux médias marocains sur  le dossier de la réforme de l’enseignement alors que la prise de parole en la matière doit, selon les usages, être le fait du ministre politique. Plus grave encore, c’est ce blanc-bec qui a été, ô comble de l’inconséquence, l’artisan du statut unifié de toutes les insuffisances. C’est ce blanc-bec, se vendant comme un économiste, membre de la Commission spéciale sur le nouveau modèle après avoir fait un passage a Bank Al Maghrib, à qui l’on a confié l’avenir de l’ecole marocaine, le destin  de la nation… Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond… Chakib Benmoussa, qui fait partie du club de ces hauts responsables crédités d’une réputation surfaite, aura réussi un exploit historique. Plus de 90% d’enseignants ont observé le mouvement de grève. Du jamais vu dans les annales de l’education nationale où le taux de débrayage se situait autour de 14%. Ce n’est pas le seul record chakibien. Avec  une enveloppe supplémentaire exceptionnel  de 9 milliards de DH par an à l’horizon 2027 consenti au profit de l’Éducation nationale, l’ex-patron de Brasserie du Maroc, où il a brassé beaucoup de vent,  a réussi à  mobiliser le corps enseignant contre sa prétendue réforme et immobiliser l’école depuis près deux mois. Il faut vraiment être Benmoussa, repeint aux couleurs du RNI où il n’avait jamais mis les pieds avant son accès à la ministrabilité, pour arriver à un tel résultat pour le moins paradoxal, annihiler les efforts du gouvernement et mettre le pays dans le pétrin. Tout ça pour ça. Un Immense gâchis. Pour moins que ça on démissionne.  Plus qu’un tableau de déshonneur…

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