Burkini et bikini !

Les personnes du beau sexe sont toutes délicieusement coquettes, ce qui participe grandement à leur charme… Charme auquel vous n’êtes pas insensibles, chers amis, en bons Méditerranéens qui se respectent ! Et c’est ce péché mignon, si caractéristique de nos chères moitiés, qui a permis à Lhaj Miloud de trouver enfin, après de longues heures d’une intense réflexion, une solution au problème de l’heure… Quel problème ? Mais « Le Problème », voyons ! Celui qui fracture la société, et divise les familles, au bled comme à l’étranger ! Non, il ne s’agit pas du problème du port ou pas du masque covidien… Mais de celui qui s’invite dans le débat chaque été avec les chaleurs estivales, et l’immense envie qui s’empare des petits et des grands de faire trempette… Lorsque la qualité de nos eaux le permet, cela va de soi !

Il s’agit, vous l’aurez compris, du très controversé burkini, cet accoutrement étrange, estampillé halal par les grands oulémas qui sévissent des deux côtés de la Méditerranée, et aux allures de combinaison de plongée particulièrement bien adaptée aux profondeurs océanes ! Une tenue qui se veut décente, à défaut d’être glamour, et que toute bonne musulmane se devrait de revêtir avant de piquer une tête pour profiter des vagues de Ain Diab ou de la fraîcheur des piscines municipales occidentales, gracieusement apprêtées par les « kouffars »… De moins en moins certes, au vu de la mobilisation croissante des farouches adversaires du burkini qui, s’ils tolèrent la pornographie et ses excès, au nom du sacro-saint principe de pouvoir disposer librement de son c…, considèrent a contrario que le voile et le burkini sont totalement incompatibles avec les valeurs européennes… Chez nous, le problème est plus complexe encore, vu que, pour envisager d’interdire le burkini dans nos piscines municipales, encore faudrait-il qu’on en ait, des piscines municipales ! Mais ne remuons pas le couteau dans la plaie !

Pour vous mettre définitivement dans l’ambiance, Lhaj Miloud se propose, en fin connaisseur qu’il se prétend d’être de la gent féminine, de vous briefer au préalable sur le penchant de ces dames pour tout ce qui a trait à la beauté et à la mode… Et vous dévoiler, par la même occasion, toutes les facettes de la coquetterie féminine, ici et ailleurs… Quel que soit son âge ou sa condition sociale, la femme prend soin d’elle et de toutes les parties de son corps… De son visage, qu’elle maquillera avec soin… Avec plus ou moins d’excès, et en fonction des occasions… De sa chevelure, parure féminine par excellence, qu’elle lavera, peignera, coiffera, et fera teindre de temps à autre… Avant même les techniques modernes occidentales basées sur des procédés chimiques complexes, le henné traditionnel était utilisé dans nos contrées avec bonheur, plus ou moins noirci par le rajout de mystérieux ingrédients, en fonction des goûts et des régions…  Henné qui servira également à soigner les mains et les pieds, et à les embellir par des arabesques artistiques qui n’ont pas fini de fasciner les touristes de la place de Jemaa El Fna ! Elle soulignera ses yeux d’un khôl envoûtant dont elle pourra abuser exceptionnellement lors des grandes cérémonies familiales… Des yeux destinés à en mettre… plein les yeux ( !) aux hommes sur lesquelles elles ont jeté leur dévolu, les laissant fantasmer sur le reste de son corps voilé ou pas !

Elle consacrera du temps et beaucoup d’imagination à s’habiller…  Contrairement à leurs partenaires masculins qui peuvent porter, de jour comme de nuit, la même gandoura, et trainer la même paire de babouches trois mois de suite ! Le vêtement féminin a aussi beaucoup évolué dans le temps et dans l’espace…  Bien fort celui qui pourrait déceler les différences entre le costume cravate des années soixante et celui d’aujourd’hui ! Oui, la mode féminine évolue librement, dans ses formes et ses couleurs, en dépit des moralisateurs de tout poil, qui y ont toujours trouvé à redire, en tentant de lui imposer des codes vestimentaires austères, non susceptibles d’attiser leur libido de mâles perpétuellement en rut !

La femme ose tout…  Du noir austère qui va si bien aux veuves jusqu’aux couleurs chatoyantes et printanières qui foisonnent à la belle saison… Chez nous, par contre, les veuves s’habillent en blanc, qui leur sied tout aussi bien… Et pendant quarante jours d’ailleurs… Mais c’est un autre sujet ! Ne nous égarons donc pas, et restons concentrés sur notre burkini…

Non, il ne faut surtout pas l’interdire ! Il faut, bien au contraire, titiller la coquetterie féminine… Et donc rendre obligatoire le burkini ! Parole de Lhaj Miloud ! Obligatoire pour toutes les femmes en souffrance… Ayant de l’eczéma, des rougeurs ou des allergies cutanées…  Pour toutes les femmes aux cheveux en balai…  Toutes celles qui souffriraient de complexes… Les femmes aux corps ingrats… Trop grosses ou trop maigres… Aux culottes de cheval disgracieuses, aux seins tombants ou aux fesses trop plates…  Bref à toutes les malheureuses que le bon Dieu a privé du bonheur d’être en bonne santé physique, et qui se voient ainsi dans l’obligation d’en dévoiler le moins possible… Au grand soulagement des autres membres de la communauté ! Ces privilégiées qui ne souffrent, quant à elles, d’aucun handicap… Et qui, de ce fait, sont autorisées à se baigner en tenue « réglementaire », j’ai nommé le petit bikini, une des plus charmantes inventions du 20ème siècle, à défaut d’en être la plus utile !

Toutes les « burkinées » repenties – à ne pas confondre avec « Burkinabées »- qui voudraient rentrer dans la normalité, devront obligatoirement produire un certificat médical d’aptitude physique, délivré par un médecin assermenté, attestant qu’elles sont aptes à dévoiler leurs courbes sans que cela représente pour les autres le moindre danger oculaire… Ce qui n’est pas gagné ! Et vous verrez que, piquées au vif dans leur amour-propre, ces dames se débarrasseront du jour au lendemain de cet encombrant accoutrement… Synonyme désormais d’infirmités, de kilos superflus ou de formes disgracieuses !

Lhaj Miloud, en parfait connaisseur des subtilités de la pensée féminine, vous promet que la paix sociale sera ainsi rétablie dans l’espace public, et à moindre frais…  Pour la paix dans les ménages intégristes, c’est une autre histoire ! Peut-être le début d’un mouvement d’émancipation des « sœurs » qui ne demandent sûrement qu’à s’affranchir de ces carcans d’un autre âge, imposés par une société schizophrène, au nom d’une moralité hypocrite et archaïque ?

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