Comme tous les cinq ans, Lhaj Miloud attend les résultats des élections françaises en sirotant son thé à la menthe, confortablement installé devant sa télé… Depuis 1974, il suit comme beaucoup de Maghrébins de sa génération ayant poursuivi leurs études dans l’Hexagone, la chose politique en France avec un intérêt toujours renouvelé… Du temps des ténors et des tribuns… Des Georges Marchais, Giscard d’Estaing et autres François Mitterrand ! Mais cette fois-ci, son intérêt est plus que relatif, il faut bien le dire, les candidats en lice supportant difficilement la comparaison avec leurs illustres aînés et les jeux étant quasiment faits… Curieux, comme cette soirée du 24 avril 2022 ressemble à s’y méprendre à celle du 7 mai 2017… qui opposait déjà Macron et Le Pen ! Une sorte de match retour en quelque sorte où l’un des protagonistes a été battu par quatre à zéro à l’aller, sur lequel aucun bookmaker ne parierait un kopeck mais dont les socios rêvent, envers et contre tout, d’une miraculeuse et hypothétique «remontada» ! C’est ce qui s’appelle avoir la foi ! Comme il y a cinq ans donc, le poulain de la droite libérale et du capitalisme triomphant est opposé à celle qui se veut représentante de la France profonde, celles des petites gens, des Jean Dupont, au béret vissé sur le crâne et à la baguette sous le bras !
La nouveauté cette année, c’est que les grands partis, ceux qui faisaient la pluie et le beau temps auparavant, ont été laminés, que ce soient les Socialistes ou les Républicains ! Ils mettront sans doute bien du temps pour se remettre de cette bérézina ! Comme en 2017, les Français sont appelés à «faire barrage» pour éviter l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir… Une extrême droite qui affiche pourtant un visage de plus en plus présentable, ayant arrondi les angles sur bien des sujets pour gagner en respectabilité… Sauf sur ceux du voile et des cantines scolaires… Faut quand même pas exagérer ! Les électeurs «moutons» sont donc priés de se transformer en castors pour faire barrage tous les cinq ans, comme s’est amusé à le relever l’humoriste franco-algérien Naim dans un savoureux sketch concocté pour l’occasion !
Un air de déjà vu, donc, faut-il le répéter… Les Français sont appelés à voter contre à défaut de voter pour, comme en 2017 et en 2002 déjà, où Chirac avait bénéficié d’un sursaut dit démocratique qui lui avait permis de rempiler pour un second mandat inespéré sur un score sans appel… Au détriment de Jean-Marie Le Pen, père de la challenger actuelle… au nom de la démocratie et des valeurs républicaines, déjà ! «Tout sauf Marine» ! Sacré Macron, il a vraiment une veine de cocu, vous ne trouvez pas ? Certains considèrent ingénument que le plus jeune président de la cinquième républicaine a vécu un quinquennat difficile, marqué notamment par la jacquerie des Gilets jaunes, une crise sanitaire sans précédent et le conflit russo-ukrainien… Alors qu’il n’en est rien, et Lhaj Miloud se fait fort de vous le démontrer ! Le contexte exceptionnel qu’à vécu le pays, et plus généralement le monde, a justifié l’adoption de mesures exceptionnelles… avec confinement des corps et surtout des esprits ! «Nous sommes en guerre !», clamait-il en toutes circonstances à ces détracteurs ! Et c’est en généralissime en chef qu’il a dirigé le pays d’une main de fer pendant ce quinquennat si particulier ! Oubliés, l’affaire Benalla, les Gilets jaunes, les réformes impopulaires… En période de guerre, on se la ferme, on accepte les sacrifices et on fait front commun contre l’ennemi… Bref, on serre les rangs derrière le Chef !
Et le voilà donc, tel le général de Gaulle, venir demander aux électeurs de lui faire confiance derechef, auréolé de ses prétendues victoires contre le redoutable coronavirus. Le meilleur serait à venir et surtout on ne change pas une équipe qui gagne! Il déroule donc tranquillement, Emmanuel, avec en perspective une victoire qu’aucun sondage ne met en doute… No pasaran, les fachos du RN ! Pauvre Marine ! Elle en aura pourtant fait des efforts pour faire oublier l’image du père qui lui aura fait tant de mal…
Panache blanc
Elle en aura fait des concessions pour se donner une stature présidentielle. Et elle en aura potassé des dossiers pour être à la hauteur du face-à-face de l’entre-deux tours ! Mais pas facile face à ce jeune et fringant président qui connaît les siens sur le bout des doigts et qui est désormais adoubé par tous «les démocrates». Étrange démocratie que celle qui autorise des partis qu’elle s’empresse de qualifier de totalitaires quand ça l’arrange !
En tout cas, les belligérants, après avoir pansé leurs blessures, pensent déjà au prochain round, celui des élections législatives de juin. Après s’être étripés comme c’est pas permis, des alliances se constituent avec trois blocs plus ou moins homogènes. Celui du camp macroniste dont le panache blanc séduit les opportunistes de tous bords… Celui des « nationalistes » avec Zemmour et Nicolas Dupont-Aignan qui jetteront toutes leurs maigres forces dans la bataille pour essayer de constituer un contrepoids au pouvoir, qui s’annonce absolu, de l’empereur Macron… Et celui des débris de la Gauche qui rejoindront à reculons le camp de Mélenchon, le dernier des Mohicans socialistes…
En tout cas, si Lhaj Miloud a un conseil à donner à nos amis de l’Hexagone, c’est de transformer ces trois blocs homogènes en grands partis cohérents et crédibles… Gageons que le taux d’abstention se verrait ainsi réduit de manière significative… Trois partis en lieu et place de la flopée des formations politiques existantes, on y gagnerait en clarté, non ? Quitte, pour compléter le topo, à en ajouter deux autres, celui des écologistes et celui des conservateurs «chrétiens-démocrates» ! On n’a oublié personne ? Cinq partis représentatifs et reflétant fidèlement le paysage politique français, c’est quand même mieux que le cirque actuel ! On pourrait d’ailleurs donner le même conseil à notre classe politique. Cinq partis, «khemssa ou khmiss 3lihoum», pourquoi pas ! A condition que nos «Zou3amas», leaders, laissent leurs egos de côté et qu’on change «chrétien-démocrate» par «islamo-démocrate» ? Comment ça, c’est incompatible ? Ca n’engage que vous, mes amis ! Ne faites pas dire à Lhaj Miloud tout haut ce qu’il s’interdit de penser tout bas !
The end ! Comme prévu, les «moutons» français, bêtes et disciplinés, ont fait barrage en cette nuit du 24 avril 2022… Ils peuvent aller se coucher, la conscience tranquille avec le sens du devoir accompli… Les Le Pen sont encore battus, pour la huitième fois, toutes compétitions confondues, distille perfidement leur futur allié des prochaines législatives, Eric Zemmour ! Rendez-vous maintenant aux prochaines législatives, au mois de juin ! Pour faire à nouveau «barrage» ?