Macron, après l’égarement, les retrouvailles

Abdellah Chankou : Directeur de la publication

Cette fois-ci c’est la bonne ! Emmanuel Macron effectuera une visite d’État au Maroc à la fin du mois d’octobre, selon un communiqué de l’Élysée. Plusieurs fois annoncée mais sans cesse reportée pour cause d’un long épisode de froid diplomatique, cette visite a ceci de particulier qu’elle scellera la relance de la relation bilatérale qui a lourdement souffert de l’ambivalence de Paris sur le dossier de la souveraineté du Maroc sur son Sahara. C’est désormais de l’histoire ancienne depuis que M. Macron a reconnu dans sa lettre du 30 juillet 2024, marquant le 25ème anniversaire de l’intronisation de SM le Roi Mohammed VI que le plan marocain d’autonomie présenté par Rabat en 2007 est « la seule base pour aboutir à une solution politique juste, durable et négociée conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies », tout en ajoutant que « le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine.»

Une position franche, claire et précise qui rompt avec l’ambiguïté de la France qui se contentait jusqu’ici de considérer le plan marocain d’autonomie comme « une base de discussion sérieuse et crédible » et pas la « seule ». Cette ambiguïté accompagnée de surcroît d’un rapprochement franco-algérien a fini par indisposer profondément le Maroc qui le fait payer à son principal allié d’une longue crise diplomatique, pénalisante à plus d’un titre pour la France, qui enfanta quelques séquences spectaculaires dont le refus par les autorités marocaines de l’aide française dans la foulée du séisme d’Al Haouz de septembre 2023. Cette page de haute tension est à présent tournée et la visite de M. Macron sera « l’occasion de conférer [au] partenariat d’exception [franco-marocain] une vision renouvelée et ambitieuse couvrant plusieurs secteurs stratégiques et tenant compte des priorités [des deux] deux pays », écrit le souverain dans sa lettre d’invitation au chef de l’État français. Parions que c’est dans un état d’esprit différent, débarrassé du boulet algérien, que celui-ci scellera les retrouvailles entre deux pays traditionnellement proches et amis. 

A Rabat, Emmanuel Macron sera donc plus à l’aise et moins calculateur. Jouera franc jeu et sans 

arrière-pensées avec ses hôtes réputés francs du collier. Il ne sera plus tenté à ménager le chou et la chèvre.

Les dirigeants algériens ont versé leur venin, à coups de vociférations diplomatiques ridicules, après la clarification française sur le dossier du Sahara marocain. Ils n’ont aucune carte à jouer pour faire chanter l’ancien colonisateur. A Rabat, Emmanuel Macron sera donc plus à l’aise et moins calculateur. Jouera franc jeu et sans arrière-pensées avec ses hôtes réputés francs du collier. Il ne sera pas non plus tenté de ménager le chou et la chèvre comme il l’a fait, non sans une certaine arrogance et suffisance qui ont eu le don d’agacer plus d’un à Rabat, avec un penchant plus prononcé pour l’Algérie.Un drôle de pays dont il était devenu dangereusement otage à force de vouloir plaire à un régime imprévisible qui fait plus camarilla de mafieux carburant à la mauvaise foi que dirigeants respectables et dignes de confiance. Une réalité dont Emmanuel Macron et la classe politique française toutes tendances confondues ont eu tout loisir de faire le constat à plusieurs reprises. Celui de l’impossibilité de sortir la relation franco-algérienne des épisodes des turbulences habituelles qui la rythment en la tirant vers le bas depuis l’indépendance officielle de l’ancienne colonie française en 1962. En fait, la France de Macron n’a récolté que des gifles de sa danse du ventre devant une Algérie bâtie sur « une rente mémorielle » selon l’expression d’Emmanuel Macron, visant à alimenter sans cesse un pseudo-nationalisme dopé à une rhétorique maladivement anti-française. 

N’est-ce pas le même scénario de haine institutionnalisée que la junte militaire algérienne a dirigée contre le Maroc en déployant depuis plus de deux décennies toutes ses capacités financières et diplomatiques pour l’amputer, par mercenaires du Polisario interposés, de son Sahara ? Mais peine perdue. Civilisation séculaire qui n’est pas née comme l’Algérie de la dernière pluie coloniale, le Maroc a su déjouer toutes les manœuvres de son ennemi de l’Est en engrangeant le soutien de la communauté internationale autour de son plan d’autonomie pour ses provinces du sud. Riche en hydrocarbures et en rentiers repus et arrogants mais pauvre en ressources vertueuses qui font l’âme et la grandeur des nations, l’Algérie de Tebboune et Shangriha a montré à la face du monde qu’elle est quantité négligeable en raison son incapacité chronique à offrir autre chose que la malveillance et la rancune. Paris a fini par comprendre où se trouve son intérêt et que s’entêter à rester à l’écart de la dynamique positive enclenchée autour du dossier la souveraineté du Maroc sur son Sahara conduirait à compromettre durablement sa relation avec son meilleur allié du Maghreb et de l’Afrique, un continent où la France a déjà perdu ses bastions traditionnels… S’extirper d’une liaison devenue contreproductive, voire suicidaire était la seule option pour la France, un temps égarée et aveuglée, de retrouver le chemin du partenariat sincère et de se dégager de l’impasse de la fourberie historique.

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