Le session d’octobre approche, plus les conseils communaux gagnent en ébullition. Mais il ne faut pas voir dans cette effervescence un quelconque signe d’enthousiasme en relation avec d’éventuels projets soumis au vote à cette occasion. Non, l’excitation de nos très chers et précieux élus trouve son origine dans le pouvoir que leur donne la charte communale dans son article 70 d’engager, à mi-mandat, une procédure de destitution du président en réunissant les 2/3 des membres. C’est ainsi que les chefs de nombreux communes, jugés « inefficaces », sont menacés d’éviction… C’est le cas par exemple du président RNI Jaouad Bahaji du conseil municipal de Meknès visé par une motion de destitution de conseillers issus aussi bien de la majorité que de l’opposition.
Les circonstances de ces coups d’État locaux par la force de loi demeurent opaques car non exemptes de marchandages. Les successeurs potentiels doivent montrer patte blanche et avoir surtout du pèze. Ce n’est guère surprenant, les communes au Maroc ont toujours été un souk que ce soit pendant la campagne électorale qu’à l’occasion de l’élection du bureau et du président. Cette règle des 2/3, épée de Damoclès au-dessus de la tête des présidents de commune, offre aussi l’occasion de se livrer à quelques règlements de compte extra-municipaux. Gare aux élus en chef qui mettent des bâtons dans les roues d’une notabilité locale ou d’un affairiste pressé en lui refusant tel ou tel passe-droit. En guise de vengeance, ils se donnent les moyens pour faire élire leur homme-lige parmi l’assemblée des élus. En perspective de ces coups de force réglementaires, il parait même qu’une pratique, que l’on croyait révolue, qui avait fait rage sous l’époque de Driss Basri, a refait surface : le détournement d’élus. Elle consiste à mettre à l’abri, dans des maisons tenues secrètes, les conseillers ayant déjà conclu un deal sonnant et trébuchant avec le futur successeur. On leur confisque leurs téléphones portables pour les empêcher d’entrer en contact avec les camps adverses. Ces détenus à l’insu de leur plein gré ne sont « relâchés » que le jour de la tenue de la session fatidique. La démocratie locale au Maroc, dont plusieurs héros sont derrière les barreaux pour des faits de concussion et de détournement de fonds, n’arrête pas d’être prise en otage. Avec souvent des spectacles indignes où la violence n’est pas que verbale. Il pleut des coups de poing et de pied. Ça vole au ras des pâquerettes. Un vrai naufrage. A quand le sauvetage?