Samedi 1er juillet, en pleine célébration de la fête du sacrifice, la DGSN a rendu public un communiqué, relayé par les différents médias, révélant des sanctions disciplinaires prises à l’encontre de fonctionnaires de l’Institut royal de Police (IRP) de Kénitra. Il s’agit du directeur, d’un brigadier et d’un inspecteur de police. Au patron de l’école de formation, qui sera déféré devant le conseil de discipline, il est reproché en substance un certain nombre de dépassements, débusqués suite à une enquête menée par l’inspection de la sûreté nationale. Ces dysfonctionnements ont été qualifiés d’abus professionnels et de comportements individuels allant à l’encontre des normes de la gouvernance sécuritaire et de l’éthique professionnelle de la police.
Mais était-il nécessaire que cette affaire, relevant somme toute de la gestion interne d’un établissement, fasse l’objet d’un tel communiqué, diffusé à grande échelle sur les ondes de la radio, de la télévision et des autres médias ? Cette médiatisation à outrance, générée par ce communiqué-couperet, porte un nom : Jeter en pâture. Elle équivaut à une condamnation des fonctionnaires mis en cause avant même qu’ils n’aient l’occasion de se défendre. Aux yeux de l’opinion publique, ils se sont rendus coupables de l’on sait quels délits graves… Une telle démarche, mal vécue dans les milieux de la police, n’est pas compatible avec le souci de préservation de la présomption d’innocence ainsi que l’honneur et la dignité des responsables concernés.
La stigmatisation du directeur de l’IRP c’est à coup sûr toute une carrière, pleine de dévouement et de sacrifices, que l’on brise du jour au lendemain. L’intéressé doit certainement en concevoir beaucoup d’amertume surtout qu’il a été maintenu en activité au-delà de l’âge limite de la retraite. S’il a bénéficié d’une prolongation de deux années c’est que ses états de services ont été jugés concluants par ses supérieurs. Cela dit, il a dû sans doute commettre des erreurs dans l’exercice de ses fonctions, favorisées par un contexte marqué par une pression grandissante sur le corps de la police en termes de recrutement et de formation (besoin d’effectifs supplémentaires pour le maintien de l’ordre, années covid et ses impératifs sécuritaires exceptionnels …). C’est connu, seuls ceux qui font la grève d’initiative ne risquent pas de se tromper.
Toutefois, personne ne peut contester le formidable travail de moralisation et de réorganisation de la police nationale initié par Abdellatif depuis son arrivée à la tête de la DGSN. Un cercle vertueux a été installé dans les rouages et les milieux de ce grand corps sécuritaire. Mais il est tout aussi primordial de veiller à ce que cette action d’assainissement ne se fasse pas, par le recours excessif et systématique à la communication, au détriment de ceux qui servent loyalement la police. A trop vouloir sévir par l’exemple en forçant de manière inconsidérée sur la mise à l’index publique, on peut détruire des carrières, flinguer des vies…