Abdelilah Benkirane, secrétaire général du PJD : Laïcité ou pas, je ne peux prêcher que dans le désert

Une équipe du Canard a été reçue par le leader du PJD Abdelilah Benkirane dans son domicile de Rabat où il se morfond dans la solitude.

Propos recueillis par Laila Lamrani

Vous avez mis rapidement fin à la polémique avec le ministre des Habous et des Affaires islamiques Ahmed Taoufik au sujet de la laïcité. Quelle est la raison ?

Je sais que certains voulaient voir se prolonger le match avec mon ami Taoufik. Mais ce dernier n’est pas une cible pour moi. D’où ma décision de mettre fin à la controverse en lui présentant même mes excuses.

Pourquoi M. Taoufik n’est pas une cible pour vous ?

Ce n’est pas un bon client pour moi dans ma façon de faire de la politique à la sauce populiste. Le sujet de la laïcité et ses soubassements politiques et idéologiques sont un casse-cou pour moi. Comme je suis prudent, j’ai préféré ravaler ma fierté plutôt que de m’engager sur un terrain dangereusement glissant.

Vous vous êtes assagi, on dirait ?

Pas vraiment. C’est les sujets qui m’intéressent, où je peux donner la pleine mesure de mon populisme, qui manquent atrocement. La politique n’est plus ce qu’elle était.

Mais encore ?

Je me sens surqualifié par rapport à mes adversaires politiques qui ont du mal à me donner du fil à retordre sur des questions qui me passionnent.

Mais vous représentez un parti de l’opposition qui a gouverné le pays pendant une décennie. Vous avez des choses à dire sur la politique actuelle et ce ne sont pas les sujets qui fâchent qui manquent?

Certes, mais je n’ai plus envie de me fâcher avec quiconque, surtout que ma voix de prédicateur populiste ne porte plus depuis que nous avons été expédiés sur les travées de l’opposition. Mon heure de gloire, je l’ai vécu quand j’étais au pouvoir. A cette époque, j’ai été écouté, je racontais des blagues et cela me procurait une grande audience populaire

Mais il y a la vie chère, le pouvoir d’achat, le mal-être des retraités, le casting gouvernemental…On ne vous a pas entendu sur ces sujets grand public…

Mais personne n’est sensible à la misère politique et matérielle du PJD, de ses ouailles et de son chef? Cette mouise impacte notre moral en nous empêchant de faire semblant d’agir pour l’intérêt du petit peuple. Les problèmes du PJD sont devenus grands. Laïcité ou pas, je ne peux prêcher que dans le désert.

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