Le directeur général de Marsa Benacer Boulaajoul a répondu sans détour aux questions du Canard après le scandale des speedomètres qui a failli allumer le feu de la contestation sociale en plein mois d’août.
Propos recueillis par Laila Lamrani
En plein mois d’août, vous avez démarré sur les chapeaux de roue avec votre histoire de speedomètre qui s’est vu imposé face à la contestation des conducteurs des deux roues un frein sec par le chef du gouvernement. Qu’est ce qui n’a pas roulé dans cette affaire ?
Tout et rien à la fois. Face à la recrudescence des accidents de la route mortels, on cherchait à Marsa et au ministère du Transport un bouc-émissaire commode pour masquer nos propres turpitudes en tant qu’instance de tutelle….
Mais encore ?
Les accidents impliquant les cyclomoteurs ont fait 1738 morts parmi cette catégorie en 2024, soit une hausse de 43% du nombre global de décès dus aux drames de la route. Ce bilan montre en creux l’inefficacité et l’inutilité de Narsa qui engloutit des milliards d’argent public en campagnes de sensibilisation et autres charges de fonctionnement tout aussi lourdes.
Il fallait dès lors trouver le coupable parfait pour faire diversion…
Tout à fait. D’où le lancement en catastrophe des speedomètres par mon ami le ministre du Transport et la décision de confier le contrôle de la vitesse des deux roues par la police. En vertu de ce nouveau dispositif, tout conducteur de cyclomoteur de petite cylindrée ( inférieur à 50 cm3) et dont le contrôle révèle une vitesse pouvant excéder la vitesse maximale de 58km/h se voit infliger une amende de 5000 DH avec confiscation définitive de son engin.
Mais votre stratagème a tourné court suite à la vive contestation des cyclomoteurs qui ont décidé d’exprimer leur colère à travers une marche nationale…
Effectivement ! Le chef du gouvernement a dû intervenir en urgence , ordonnant, au ministre Kayyouh le report de l’application de notre mesure décriée d’une année de peur que cette dernière ne mette le feu aux poudres surtout que les adeptes de deux roues se recrutent dans les couches pauvres.
Il vous a échappé qu’il ne fallait pas jouer avec le feu dans un contexte social déjà très tendu en raison de la vie chère et autres démolitions de baraques pour utilité publique qui frappent essentiellement les défavorisées…
Nous sommes juste dressés pour renifler avec espièglerie la bonne commande publique à passer en faisant preuve d’initiative et d’imagination pour créer le besoin là où il n’existe pas. Chacun son carburant. A Narsa et au ministère de Kayyouh, on roule à toute vitesse aux bonnes affaires.