« Je vais colmater les brèches »

Abdelaziz Omari, maire de Casablanca.

Une équipe du Canard a retrouvé le maire de Casablanca bien au chaud chez lui pendant que plusieurs arrondissements de la ville étaient dévastés par les pluies…

Vous devriez être dehors en ce moment, non ?

Trop risqué. Le coronavirus et maintenant le déluge. En voyant les images des inondations partagées sur les réseaux sociaux, je  me suis dit qu’il vaut  mieux rester à la maison pour éviter tout risque inutile…

Mais le maire que vous êtes doit être sur le terrain pour organiser les secours et apporter de l’aide aux populations sinistrées…

Rien n’urge, chère madame !  Un maire incompétent vivant vaut mieux qu’un maire compétent mort. J’ai décidé d’attendre le retour le beau temps pour colmater les brèches…

De nombreux quartiers de Casablanca ont été transformés en véritables piscines à cause des dernières participations. Plusieurs artères et boulevards ont été fermés à la circulation.  Même la voie du tram et la pelouse du stade de football Mohammed V ont été inondées…

Ce sont des pluies qui me réjouissent personnellement.  C’est une bonne nouvelle pour le monde rural et les agriculteurs surtout les petits d’entre eux ainsi que pour les citadins. La pluie c’est le meilleur assainisseur.  

Mais aussi le meilleur révélateur de l’incurie des élus et de l’ampleur des dysfonctionnements et autres insuffisances en termes d’infrastructures et de fraudes dans les ouvrages…Vous ne trouvez pas que votre responsabilité de maire est engagée ?

Moi responsable des dégâts causés par la pluie ? Jamais de la vie. La pluie est une affaire de Dieu et je n’ai rien à voir là-dedans. Je vous conseille de trouver d’autres coupables.

Lesquels ?

Les comploteurs incorrigibles contre les islamistes qui font désormais eau de tout bois pour nous mouiller.

Vous auriez pu quand même aller sur le terrain pour constater de visu l’ampleur des dégâts et s’enquérir en même temps de la situation des habitants touchés par ces inondations…

Comment aller à la rencontre des victimes alors que le coronavirus, par peur de la contagion, nous a imposé la distanciation, voire l’éloignement les uns des autres ? Comme je suis un homme adepte du « vivons heureux, vivons cachés et maintenant masqués », cette situation contrainte m’arrange beaucoup puisqu’avant l’avènement du Covid-19 j’étais rarement visible pour mes concitoyens.

Que conseillez-vous aux Casablancais ?

Je leur conseille de porter les masques de natation avec tuba et pour les automobilistes je recommande de ne circuler désormais que munis d’un permis de navigation…  

Qui va payer les pots cassés ?

Les citoyens, bien sûr, comme toujours. Les Marocains qui en ont vu d’autres ont l’habitude de ces catastrophes, le sens de la résistance et surtout de la résignation.

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