Une équipe du Canard a profité de la 16ème édition du SIAM pour interviewer autour d’un barbecue géant le ministre de l’Agriculture Mohamed Sadiki sur la fête du sacrifice, la crise du cheptel national et les importations d’ovins.
Vous prévoyez d’importer 600.000 têtes d’ovins subventionnées en prévision de la fête du sacrifice de juin 2024. Ce n’est pas beaucoup ?
Rien n’est trop cher ni trop beau pour le regard attendrissant d’un mouton qui vaut tous les sacrifices. Notre élevage est devenu trop maigre pour satisfaire l’ensemble de la demande nationale : En plus de la consommation quotidienne, l’Aïd el Kébir, les cérémonies de mariage et autres banquets. Vous voyez, nous sommes sur le grill en tant que ministère. Alors, nous avons décidé comme l’année dernière d’ouvrir dans la joie et l’allégresse les vannes des importations généreusement soutenues.
Le cheptel national serait-il en voie d’extinction ?
Notre cheptel fout le camp. Il revient très cher à l’élevage avec des prix au kilo de 120 DH, sortie des abattoirs. Les petites bourses en sont abattues.
Ça saigne fort et l’hémorragie n’est pas près de s’arrêter . On espère réguler le marché en faisant manger du boulfaf espagnol aux Marocains qui n’ont pas les moyens de s’offrir un beau sardi. Déjà ça de gagné…
Manger du boulfaf espagnol c’est un coup de cornes un peu dur pour la fierté nationale.
Vous ne trouvez pas ?
Pas du tout. Les Espagnols sont devenus nos amis depuis que nous avons été choisis pour organiser ensemble la coupe du monde 2030. Heureusement que nous avons l’Espagne comme voisin proche pour nous fournir leur surplus de gentils agneaux. Imaginez si nous ne partagions nos frontières qu’avec un désert saturé de chiens qui aboient jour et nuit…
Ceux qui soutiennent que nous soutenons l’économie espagnole en important leurs moutons font preuve de mauvaise foie ( avec e).
La crise du cheptel national aurait dû pousser le gouvernement à décréter l’interdiction de la fête du sacrifice pour permettre sa reconstitution et agir sur les prix à la baisse…
Vous savez, les fatwas savantes ne relèvent pas de mes prérogatives. Mon rôle de ministre consiste à veiller, quoi qu’il en coûte, à ce que le marché soit bien achalandé en viandes, tripes et têtes. Mon seul souci c’est de perpétuer la tradition délicieuse des barbecues à la marocaine et de tirer les brochettes pardon les marrons du feu.