Une équipe du Canard a interviewé la ministre MP de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville sur ses réalisations virtuelles…
Vous gérez un ministère tentaculaire doté de plusieurs départements. N’est-ce pas trop pour une seule femme ?
Ne vous inquiétez pas, ce sont juste des intitulés pompeux aussi creux que les logements économiques. Pour être franche, j’ai du mal à exister dans un gouvernement dépourvu d’une surface politique solide…
Les dernières pluies qu’a connu le Maroc ont provoqué l’effondrement de certaines maisons menaçant ruine dans les médinas de Casablanca, Fès et Salé. Or, ce problème avec les drames humains qu’il charrie n’en finit pas d’être posé…
Effectivement, c’est un vrai problème difficile à régler. D’où la répétition du même scénario macabre à chaque saison un peu pluvieuse. Résultat : Chaque ministre de l’Habitat a eu droit dans son bilan de façade à ses morts et ses blessés tout en restant de marbre…
Vous aussi vous ne vous êtes pas effondrée en regardant les images de la tragédie des maisons qui tombent…
Pourquoi voulez-vous que je m’effondre et déroger à cette règle immuable ? On est tous logés à la même enseigne et cela me console et me désole à la fois. Ainsi va la fonction de ministre au Maroc. Beaucoup de blabla et très peu de chose constructives et construites.
Ce qui ne vous empêche pas de vous offrir votre stratégie révélée récemment dans les médias…
Absolument. L’un n’empêche pas l’autre. Il faut bien que je soigne le décor en faisant semblant de travailler dur et même en dur pour la relance du secteur à coups de tableaux power point et de projections optimistes. Il faut aussi bien faire en sorte de favoriser le partage de la richesse ministérielle avec les cabinets qui vivent essentiellement des briques du contribuable.
Ce qui a l’avantage de régler juste sur le papier le problème de l’habitat menaçant ruine et celui des bidonvilles…
Vous avez tout compris. C’est ainsi que le Maroc n’a toujours pas réussi à éradiquer le phénomène très lucratif des bidonvilles qui fait vivre plein de monde alors même qu’un programme ambitieux et onéreux lui a été consacré dès 2004… Voyez-vous, ça fonctionne superbement bien à tous les étages.
Pourquoi ne pas régler une fois pour toutes le problème de l’habitant menaçant ruine en relogeant dans des conditions décentes les familles concernées ?
Très bonne question. Mais les autorités préfèrent laisser la nature faire son travail. C’est l’aménagement par les inondations…
