Saad Berrada, nouveau ministre de l’Éducation, du Préscolaire et des Sports : J’ai plus de gâterie dans mon cartable

Guidé par sa curiosité, le Canard est parti à la recherche du nouveau ministre de l’Éducation, du Préscolaire et des Sports Saad Berrada pour l’interroger sur sa nouvelle fonction.

Laila Lamrani

Vous êtes la grande surprise du dernier remaniement gouvernemental du fait de votre statut de patron d’une confiserie. Qu’est-ce que vous pouvez apporter à l’école publique en crise ?

D’abord de la douceur dans la relation enseignants-apprenants et un appétit féroce pour le savoir et l’apprentissage.

Mais encore ?

Tout au long de ma carrière de vendeur de sucettes, j’ai appris l’importance de se laisser guider par sa gourmandise pour goûter à la véritable essence des choses de la vie.

Il paraît que depuis votre nomination, vous n’avez pris aucune décision majeure…

Si, si. La première chose que j’ai faite juste après la passation des pouvoirs c’est d’ausculter le budget des écoles pionnières lancées sous le mandat de mon prédécesseur. Dans les affaires, j’ai appris que pour bien connaître un secteur, il faudrait s’intéresser à la partie investissement et suivre la piste de l’argent.

Pour traquer des fraudes éventuelles ?

En fait, je ne sais pas encore. Mais ce qui est sûr c’est que je ne veux pas d’ombre au tableau pour mener ma nouvelle mission en la savourant…

Avez-vous une feuille de route précise comme ministre de l’Éducation nationale, du Préscolaire et des Sports ?

En vérité, personne ne m’a demandé ce que je dois faire ou ne pas faire et quels résultats je dois obtenir durant les deux ans de mon mandat. Je suis ministre et c’est tout. Un portefeuille que j’ai longtemps convoité et exigé comme récompense de mes bons et loyaux services au RNI où j’ai investi et je me suis beaucoup investi. 

Mais que comptez-vous faire pour redresser l’école publique? Avez-vous une quelconque vision? 

Il ne faut pas compter sur moi pour améliorer le niveau de notre école malade. Si j’arrive à maintenir le statu quo et freiner sa dégradation, c’est déjà pas mal. Je mériterais la mention honorable.

Quel ministère avez-vous convoité ?

J’avais postulé initialement pour celui du Commerce et de l’Industrie. Mais j’ai finalement hérité de celui de l’Éducation nationale pour je ne sais quelle raison d’ailleurs. En voilà une équation complexe! Ils veulent peut-être que je démocratise les sucettes dans les établissements scolaires du pays. Si c’est le cas, je trouve que ma nomination a du sens.

Ah bon !

C’est connu, les enfants adorent les sucreries, bonbons et chocolat. Qui mieux que moi, le roi de la sucette, pour satisfaire les 8,7 millions de petits élèves marocains ? Côté sport, ma nomination est tout aussi cohérente puisque le sucre est connu pour stimuler la dopamine. A ce niveau-là aussi, j’ai plus d’une gâterie dans mon sac.

Cela dit, pour moi les maroquins c’est kif-kif, chocolat blanc et blanc chocolat. L’essentiel c’est que j’ai intégré le gouvernement et un passage même furtif va valoriser ma carte de visite.

Les syndicats de l’enseignement sont connus pour être exigeants et difficiles. Quel langage comptez-vous leur tenir ?

Je suis conscient que la compréhension mutuelle ne sera pas facile. En cause, la pauvreté de mon arabe. Le francophone que je suis demande l’indulgence et la patience des syndicats, sachant que la modestie et la détermination sont les contremaîtres, pardon mes maître-mots.

Comment vous définissez-vous? 

Comme un homme de chiffres et non de lettres et sur ce plan je vais sans doute m’entendre avec les centrales syndicales. Faute de quoi, je suis obligé de me faire violence et leur tenir la dragée haute.

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