Une équipe du Canard s’est invitée chez la ministre de l’Économie et des Finances Nadia Fettah Alaoui pour l’interroger sur les faux démunis du Maroc.
Vous avez récemment déclaré devant les députés que les Marocains n’ont rien perdu de leur capacité d’épargne malgré les crises successives et l’inflation. De quels Marocains parlez-vous sachant que l’écrasante majorité a du mal à joindre les deux bouts a fortiori mettre de l’argent de côté ?
Je parle évidemment des Marocains d’en haut qui ont les moyens de faire face aux différentes hausses. Je ne parle que du monde que je connais puisque j’en suis issue.
Et l’autre monde ?
Le monde des exclus et des démunis, ceux qui ont officiellement le moral dans les chaussettes ? A ce niveau-là, je suis déconnectée. Mais mes services m’ont appris des choses incroyables sur les pauvres subventionnés.
Comme quoi par exemple ?
Que les démunis ne sont pas aussi démunis que ça puisqu’ils cachent leur épargne dans l’or, les terrains et les bijoux de valeur, tandis que les nantis préfèrent de plus en plus miser sur les tableaux de maîtres et les montres de luxe alors que les moins honnêtes mettent leur fric à l’abri dans des comptes offshore.
Donc ?
Au Maroc, il n’ y a que de faux pauvres et les démunis sont par conséquent de vrais riches qui font semblant que leur pouvoir d’achat est au plus bas.
Pour moi, il s’agit de petits malins qui évitent de faire étalage de leur richesse pour continuer à profiter scandaleusement du gaz butane et de la farine nationale dont les prix sont soutenus par l’État. Ces profiteurs qui roulent sur l’or en cachette sont une véritable menace pour l’équilibre budgétaire.
Mais encore ?
Ces pseudo pauvres doivent cesser de pomper la caisse de compensation qui nous coûte plusieurs dizaines de milliards de DH chaque année.
Mais la caisse de compensation profite à tous les Marocains, plus aux riches qu’aux pauvres…
Mais c’est au nom du soutien à ces soi-disant défavorisés que la compensation est maintenue jusqu’à aujourd’hui.
Qu’est-ce que vous proposez ?
Je propose que le fisc taxe lors des prochaines lois de finance les pauvres sur leur richesse extraordinaire dissimulée et qui échappe à l’impôt. L’équité fiscale y gagnerait beaucoup.