Les sommets arabes ont cette particularité presque congénitale d’être des non-événements. Sans grande utilité sauf celle de produire des communiqués-marronniers qui ne mangent pas de pain de condamnation d’Israël et de soutien à la cause palestinienne. C’est le seul moment où les dirigeants de la Oumma œuvrent activement pour afficher leur unité qui n’a jamais été que de façade.
Le 31ème sommet arabe qui s’ouvre à Alger le 1er novembre, après plusieurs reports, ne déroge donc pas à la règle. Un non-événement d’envergure marqué en plus par une innovation majeure : Il s’est perdu avant même sa tenue dans un feuilleton ou l’anecdotique le dispute au paradoxe.
Côté paradoxe, le pays hôte, qui se pose ostentatoirement en acteur de la cohésion arabe, est le seul diviseur notoire du monde arabe puisqu’il soutient contre tout bon sens depuis près d’un demi-siècle le faux mouvement de libération du Polisario pour mettre à genoux son voisin marocain. Pour faire oublier cette vérité éclatante et espérer encore tromper les observateurs, Tebboune et ses émissaires, imbattables lorsqu’il s’agit de faux-semblants, se sont empressés en perspective du sommet arabe de se payer leur «déclaration d’Alger » sanctionnant une conférence organisée du 11 au 13 octobre sur la réconciliation des factions palestiniennes.
Côté anecdotique, la junte militaire algérienne a tout au long des préparatifs de leur machin trahi dans un spectacle pathétique ses véritables intentions : Œuvrer moins pour reconstruire l’unité arabe dont elle incarne le meilleur fossoyeur pour redorer son blason de régime de galonnés isolé, anachronique et en mal de légitimité. Avec le forcing diplomatique tragi-comique orchestré par le palais El Mouradia visant à quémander avec insistance une participation record de haut niveau des États membres. Là où l’on touche de près le véritable état d’esprit des gérontocrates militaires d’Alger. Pour eux, l’indicateur de réussite de «leur » sommet arabe est strictement corrélé au déplacement des chefs d’État arabes. Le contenu de la conférence et ce qu’il peut en sortir pour faire avancer les causes arabes ? Ils s’en foutent comme de leur premier treillis…
L’information serait le Roi du Maroc qui se rend à Alger et non Alger qui abrite le sommet arabe! Le maître de céans, dont le jeu obscur fait fuir les lumières, se ferait alors éclipser par le hôte étincelant que tout le monde désire voir débarquer…
Manque de pot, le sommet fantasmé par Tebboune et consorts n’aura certainement pas lieu ! Voilà que le Prince héritier saoudien Mohamed Ben Salmane déclare forfait en raison des «recommandations de ses médecins qui lui déconseillent les voyages» selon un communiqué de la présidence algérienne diffusé le samedi 22 octobre. Motif sérieux ou maladie diplomatique ? En tout cas, l’absence de l’Arabie Saoudite, voix influente du monde arabe, n’augure rien de bon pour l’hébergeur, risquant d’ouvrir la voie à d’autres faux bonds… Comme ceux déjà annoncés du roi de Bahreïn, du Sultan d’Oman ou du président libanais…
Le no-show diplomatique est dans l’air. Du coup, dans les arcanes soudables et prévisibles du pouvoir algérien, la panique atteint des sommets. On prie nuit et jour, paumes tournées vers le ciel, pour qu’une pluie de défections ne s’abatte pas sur le sommet de toutes les incertitudes et que l’émir du Qatar ainsi que le président égyptien, qui selon les médias algériens ont confirmé leur présence, n’emboîtent pas à leur tour le pas à l’homme fort de Ryad. Et si d’aventure, la participation de S.M le Roi Mohammed VI, donnée depuis quelques semaines pour acquise par la presse proche du système – ce que Rabat s’est gardé de confirmer ou d’infirmer, laissant le suspense s’installer jusqu’au bout- s’avère être le canular arabe de la saison, ce serait alors le sommet d’un échec historique pour les patrons de la vache à hydrocarbures qu’est l’Algérie. Le nif national, cet orgueil excessif typiquement national, en prendrait un sacré coup. Tebboune et ses patrons en sont réduits pour sauver la face à souhaiter vivement que le souverain se déplace dans un pays qui, il faut le souligner, a rompu ses relations diplomatiques avec le Royaume, interdit son espace aérien aux avions marocains et fermé le robinet du gaz à ses centrales électriques. La fraternité arabe à la sauce algérienne est époustouflante…
En fait, la présence du souverain à Alger, sur laquelle l’ennemi déclaré du Royaume mise curieusement comme une planche de salut pour sauver sa tambouille qui sent de plus en plus le brûlé, aura tout de l’événement dans un non-événement. Propre à ravir les sunlights et faire braquer les projecteurs sur ses moindres paroles, faits et gestes.
En quelque sorte, l’information serait le Roi du Maroc qui se rend à Alger et non Alger qui abrite le sommet arabe ! Le maître de céans, dont le jeu obscur fait fuir les lumières, se ferait alors éclipser par le hôte étincelant que tout le monde désire voir débarquer…