Un plat de criquets rôtis ou des chenilles pilpil ? Cette question dégoûtante vous sera bientôt posée au restaurant. D’ores et déjà, la poudre de ces bestioles comestibles a été autorisée dans la fabrication de divers produits agro-alimentaires issus des pays de l’UE. Vigilance…
Les insectes au menu et dans vos assiettes n’est pas une plaisanterie. Se nourrir d’insectes est le nouvel horizon d’une planète surpeuplée dont le grand défi est de nourrir une population qui frôlera les 10 milliards d’âmes au milieu de ce siècle. La crainte est que le système alimentaire actuel ait atteint ses limites.
«Bien que les terres produisent bien plus de nourriture qu’il n’en faut pour nourrir tout le monde, il existe toujours 820 millions de personnes qui vont se coucher chaque soir en ayant faim», explique Stephan Singer, membre de Climate action network. Sous d’autres cieux, notamment en Asie, en Chine ou en Thaïlande, le problème ne se pose pas. Les insectes, réputés riches en protéines, font depuis longtemps partie de l’alimentation des habitants. Ces derniers raffolent de vers de bambous, vers à soie, scorpions, sauterelles et grillons frits qu’ils consomment comme des chips après les avoir récoltés dans la nature. L’entomophagie, la consommation d’insectes par l’être humain, a été remise au goût du jour par les chantres du développement durable et de la préservation de la planète. Ces derniers considèrent que transformer les bestioles à six pattes ou leurs larves en animaux d’élevage n’est pas une mauvaise idée. Une idée qui peut servir d’alternative à l’élevage classique du bétail dont les méthodes sont jugées très peu respectueuses de l’environnement. La comparaison entre l’élevage des insectes et des vaches par exemple tourne à l’avantage des bestioles. L’élevage des criquets se pratique sur petite superficie : il faut 400 mètres carrés de terres agricoles pour produire un kilogramme de bœuf, alors qu’il n’en faut que 30 pour obtenir le même volume de criquets. De même, l’élevage des criquets consomme beaucoup moins d’eau que celui des bovins : quelque 2200 litres d’eau pour produire 100 g de bœuf, alors qu’il en faut environ 2000 fois moins pour avoir 100 g de criquets. Le bétail est considéré comme un ennemi de la planète en raison de ses fortes émissions de méthane (un gaz à effet de serre), qui contribue au changement climatique. Les coquerelles, les termites et les scarabées sont les seules espèces d’insectes dont le tube digestif abrite des bactéries productrices de méthane. Les flatulences de toutes les autres espèces d’insectes, y compris les vers de farine et les criquets, sont dépourvues de méthane, lequel provient du fumier (déchets) produit par le bétail.
Valeur nutritive
Selon la FAO, les insectes ont un rôle intéressant à jouer à ce niveau-là puisque certaines espèces d’insectes se nourrissent de la bouse des vaches. Elles pourraient ensuite servir comme aliments pour la volaille, le poisson et d’autres animaux d’élevage. Last but not least, les insectes peuvent également se nourrir de déchets organiques tels que les pelures de légumes. Au nom du souci de la planète, célébré juste dans les discours, les écologistes rivalisent d’arguments pour nous faire manger n’importe quoi. Or bouffer de l’insecte cru, grillé ou en farine ne suffira pas à sauver du réchauffement climatique une planète, toujours victime, malgré les alertes à répétition, des experts du GIEC, des activités destructrices du monde industrialisé. Après les insectes, on trouvera des vertus nutritionnelles aux cafards et aux rats ?
L’entomophagie est peut-être une toute petite solution pour l’environnement, mais est-elle bonne pour la santé ? La valeur nutritive des insectes varie selon l’espèce et le stade qu’ils ont atteint dans leur cycle de développement. Les amoureux des insectes n’en démordent pas. Pour eux, les bestioles comestibles, qui inspirent le dégoût dans des pays comme le Maroc, sont une excellente source de protéines de bonne qualité, également riches en divers minéraux, vitamines, de divers micronutriments et denses en calories. Soit une valeur nutritionnelle comparable, sinon supérieure au bœuf ou au poulet. Ce qui en fait, selon ses partisans, un aliment potentiel majeur pour l’avenir susceptible de réduire la faim dans le monde. Le ver est dans le fruit. Savez-vous que la farine des insectes est déjà ajoutée dans une variété produits de l’agro-industrie européenne qui sont vendus dans les enseignes de la grande distribution au Maroc et les commerces de contrebande de Derb Ghallef ? Cette farine est désignée dans l’étiquetage sous le code E120 baptisé également rouge cochenille ou rouge Carmin. Cette poudre est issue du broyage du corps séché de la femelle d’un insecte (Dactylopius coccus), connu sous l’appellation cochenille.
La définition réglementaire de l’acide carminique (E120) se présente ainsi : « Les carmins et l’acide carminique sont obtenus à partir d’extraits aqueux, alcoolo-aqueux ou alcooliques de cochenille, qui est constituée de carapaces séchées de l’insecte femelle Dactylopius coccus Costa. Le principe colorant est l’acide carminique…» Selon Foodwatch, une association indépendante, la Commission européenne a publié en janvier 2023 deux nouveaux règlements relatifs à la présence d’insectes dans notre alimentation. Il s’agit de ce qu’on appelle du «novel food» ou nouvel aliment. « Depuis le 3 janvier 2023, l’industrie agroalimentaire a le droit d’utiliser pour cinq ans de la poudre de grillons domestiques partiellement dégraissés – Acheta domesticus – dans ses produits. Mais pas n’importe quels grillons : uniquement ceux produits par la société vietnamienne Cricket One qui en a fait la demande expresse auprès de la Commission européenne. Ces grillons peuvent donc être intégrés – en petite quantité – sous forme de farine dans plusieurs aliments ». Depuis le 5 janvier 2023, des larves de petit ténébrion -Alphitobius diaperinus-, un coléoptère connu pour dévorer les panneaux d’isolation, peuvent également être utilisées, pour une durée de 5 ans, sous formes congelée, lyophilisée, en pâte ou en poudre «dans un certain nombre de produits alimentaires destinés à l’ensemble de la population, ainsi que sur l’utilisation de sa forme en poudre dans des compléments alimentaires ». L’autorisation est uniquement accordée à la société française Ynsect qui en a fait la demande à la Commission européenne.
L’UE a adopté des règles similaires concernant le cricket, les fourmis et les larves de mouches blanches comme aliments pour les humains. La Commission européenne a donné son feu vert pour la congélation et le séchage des blattes et leur utilisation en poudre dans les aliments comme le pain, biscuits, pâtes et sauces…face à cette nouvelle donne, les équipes d’ONSSA sont appelées à redoubler de vigilance pour débusquer en vue de les interdire les denrées transformées en provenance des firmes européennes contenant ces poudres d’insectes… De quoi avoir l’envie de donner un grand coup de pied dans la fourmilière.
La puce à l’oreille
Les grillons peuvent être intégrés en petite quantité sous forme de farine dans plusieurs aliments :
Pains et petits pains multicéréales, biscuits secs et gressins
(maximum 2g d’Acheta domesticus pour 100g de produit)
Barres de céréales (max. 3g/100g)
Prémélanges secs pour produits cuits au four (max. 3g/100g)
Biscuits et en-cas à base de farine de maïs (max. 1,5g/100g)
Produits secs à base de pâtes farcies (max. 3g/100g)
ou non (max. 0,25g/100g)
Sauces (max. 1g/100g)
Produits transformés à base de pommes de terre, plats à base de légumineuses et de légumes, pizzas, produits à base de pâte (max. 1g/100g)
Lactosérum en poudre (max. 3g/100g)
Substituts de viande (max. 3g/100g)
Soupes et concentrés ou poudres de soupe (max. 1g/100g)
En-cas à base de farine de maïs (max. 4g/100g)
Boissons similaires à la bière (max. 0,1g/100g)
Confiseries au chocolat, fruits à coque et oléagineux (max. 2g/100g)
En-cas autres que les pommes de terre frites (max. 5g/100g)
Préparations de viande (max. 2g/100g)
Source : Foodwatch