Abdelaziz Rabbah est de nouveau au centre d’un scandale lié au dragage des ports après l’autorisation qu’il a délivrée à l’entreprise Drapor pour pomper le fond marin de Larache…
Décidément, le Maroc a du mal à se débarrasser des pilleurs de sable. Ces derniers continuent à soumettre le littoral national à une surexploitation préjudiciable à l’environnement. Avec les complicités des responsables du secteur. Dernier scandale en date, l’autorisation pour une durée de 5 ans délivrée à la société Drapor pour le dragage du sable marin au large de Larache par le ministre Abdelaziz Rabbah en charge de l’Environnement. Il semble que ce dernier a profité de la torpeur de l’été et du contexte dominé par le Covid pour délivrer un permis d’exploiter spécial dans le dos de son collègue de l’Equipement, tuteur du secteur, Abdelkader Amara. Celui-ci avait refusé de donner suite aux demandes récurrentes du très controversé Mustapha Aziz qui a hérité dans des conditions mystérieuses du groupe comptant plusieurs sociétés dans la foulée du décès en juin 2015 de son fondateur feu Lahcen Jakhoukh.
Filon
La résistance de M. Amara aux assauts de M. Aziz a valu au ministre PJD une vidéo postée en plein mois d’août sur les réseaux sociaux où ce patron troublant a proféré des menaces à peines voilées à l’encontre du ministre PJD? Visiblement en colère, il a déclaré avoir licencié une première fournée de 250 employés de Drapor en raison de ce blocage ministériel qu’il dit ne pas s’expliquer tout en laissant entendre qu’une deuxième vague de licenciements est en préparation. Le chantage à l’emploi ! Abdelkader Amara n’a rien contre celui que les héritiers Jakhoukh ont accusé de captation d’héritage. En résistant aux « avances » de son interlocuteur, il a juste respecté les conclusions alarmantes sur l’équilibre de l’écosystème marin d’une étude d’impact commandée par le département de l’environnement dirigé alors par Nezha El Ouafi. Activité hautement juteuse pour ses promoteurs mais très préjudiciable pour l’environnement, le dragage du sable est une chasse gardée de Drapor qui a pris l’habitude de bénéficier de l’exploitation exclusive de ce filon où la réglementation se distingue par son flou extrême. Les exploitants en profitent à fond (s) pour extraire plus de quantités de sable que ne l’autorise le cahier des charges… La Cour des comptes a pointé dans des rapports plusieurs irrégularités qui entachent le dragage des sables marins par Drapor qui bénéficie de la bienveillance des ministres PJD, notamment Abdelaziz Rabbah connu pour pêcher en eaux troubles et son amour immodéré pour la mise en exploitation des carrières y compris marines. Le retour illégal de Drapor avec sa bénédiction dans les eaux de Larache après plusieurs années d’absence a déclenché la colère des associations locales de défense de l’environnement qui dénoncent un massacre des espèces marines. En effet, les opérations de dragage du fond de la mer peuvent avoir des répercussions néfastes sur la pêche.
C’est dans ce contexte tendu qu’un groupe de députés de la première chambre a décidé, suite à la publication d’un rapport onusien alarmant sur les dangers encourus par le littoral national du fait de son pillage permanent, de former une commission d’enquête sur la catastrophe écologique provoquée par la surexploitation du littoral marocain par des opérateurs sans foi ni loi qui mettent en avant la création de l’emploi et des richesses. Voire… C’est connu, l’extraction du sable est une rente qui fabrique juste des riches. Quant aux richesses, il faut repasser… La rente des carrières des sables c’est du cash. Une véritable à pompe à fric qui fonctionne dans l’opacité totale. Celui qui détient le pouvoir de signature de l’agrément peut rendre riche qui il veut…La meilleure carrière à faire …se trouve dans la filière du sable ! Les voix de l’argent sont insaisissables. Un grand bienfaiteur de l’humanité ce Rabbah, actuellement aux prises avec le Covid.
Prédation
C’est aussi un drôle d’oiseau (marin). Sur le terrain, rien n’a changé malgré la multiplication des lois qui ont le don d’être vite happées par la magie du sable. Souvenez-vous de son fameux coup de com qu’il a commis dans la foulée de sa nomination au poste de ministre de l’Equipement et du Transport dans le premier gouvernement islamiste dirigé par Abdelilah Benkirane.
Après la publication de la liste des bénéficiaires des agréments de transport et des carrières de sable qui a fait jaser dans les salons, rien n’a été fait pour introduire une bonne dose de transparence dans les diverses filières de la rente. Egalement maire d’une ville (Kenitra) où la prédation des carrières de sable est très forte, notre ministre, enchaîne les postes ministériels les plus en vue et profite des privilèges qui vont avec sans jamais avoir réformé quoi que ce soit ni dans les secteurs du Transport et de l’Équipement, ni dans ceux de l’Énergie et des Mines et du développement durable qu’il occupe. L’actuel titulaire du portefeuille de l’Equipement Abdelkader Amara n’a guère fait mieux, se contenant depuis son arrivée à la tête de ce département de promesses faites aux députés de mettre de l’ordre dans les dossiers chaotiques et opaques du littoral. Pendant ce temps, le pillage de cette ressource précieuse continue de plus belle y compris par des opérateurs clandestins. En plus d’être attentatoire à l’environnement, cette exploitation clandestine fait perdre aux caisses de l’Etat la bagatelle de 5 milliards de DH par an. Le hic c’est que malgré cette grande hémorragie, aucun grain de sable n’a jamais enrayé la machine de la surexploitation qui fonctionne toujours à plein régime. Les prédateurs du littoral et leurs complices n’ont pas peur de s’ensabler…
Ils veillent bien au grain…
Un rapport du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) sur la surexploitation du sable dans le monde, publié en mai 2019, fustige le rôle des « mafias du sable » dans la disparition des plages marocaines, sur fond de bétonnage du littoral. Conséquence de cette prédation à grande échelle, les côtes s’érodent, les plages rétrécissent. Or, le vol de sable sur les plages ou les dunes littorales est passible d’un à cinq ans de prison.
Les plages continuent pourtant d’y être dépouillées, le long d’un littoral de 3.500 km qui court entre Méditerranée et Atlantique. Dans certaines régions, le sable est transporté à dos d’âne, en triporteur ou en camion. Plus de 50% du sable vendu sur le marché national provient de filières clandestines. Ce qui ne pas inquiéter outre mesure, Rabbah, Amara et consorts. Après tout, ce n’est que du sable ! Veiller au grain c’est tout un art !