Fidèle à sa mission de think tank au service du développement du pays, le Conseil du Développement et de la Solidarité (CDS) a organisé, mercredi 23 octobre 2024, au palace Tour Hassan à Rabat, une conférence sous le thème «Connectivité et développement des territoires.» Tour d’horizon d’une conférence de haut vol.
Dans la continuité de son séminaire du 17 juillet 2024, Maroc des Territoires : « Inclusion, Solidarité et Équité, l’exemple de la Région du Draa-Tafilalet», le Conseil du Développement et de la Solidarité (CDS) a organisé, mercredi 23 octobre, au palace Tour Hassan à Rabat, une conférence sous le thème «Connectivité et développement des territoires.»
Animée avec brio par Farida Moha, la conférence a connu la participation d’une pléiade de personnalités de premier comme le conseiller du souverain André Azoulay, le président du Crédit Agricole du Maroc Mohammed Fikrat, le leader du PPS Mohamed Nabyl Benabdallah, le directeur général de la SMIT Imad Barrakad, le patron de l’AREP de Draa-Tafilalet Mohamed Zouhair, le membre du CDS et expert du tourisme Samir Sahraoui Kheldouni, le président de la FNT Hamid Bentahar le professionnel de l’aérien Karim Baina et le spécialiste aéronautique Hamid Benbrahim Andaloussi.
Devant une assistance composée entre autres de décideurs et d’élus issus notamment des régions de Draa-Tafilalet et de l’Oriental, le fondateur du CDS Mohamed Benamour ouvre la conférence en fixant les termes du débat en revendiquant «le désenclavement aérien pour promouvoir l’investissement et l’Emploi » dans des régions pleines de potentiel, à l’image de celle de Draâ-Tafilalet . Rien ne ferait plaisir à ce militant engagé pour le du développement du Maroc que de voir cette belle région où il a investi en pionnier dans le secteur de l’hôtellerie haut standing avec le Berbère Palace à Ouarzazate prendre réellement son envol au bénéfice des populations locales et de l’économie régionale et nationale. Le principal conférencier, le ministre du Transport et de la Logistique Mohamed Abdeljalil, initialement prévu n’a pas pu animer cette rencontre pour « des raisons de santé », selon les termes de son remplaçant, un directeur du département de tutelle dépêché pour l’occasion . C’est ce dernier qui présente les grandes lignes de la feuille de route de celui qui fait les frais du remaniement ministériel intervenu au cours de la même journée.
Abdeljalil ou pas, le débat a pris une tournure intéressante, empreint de franchise et de passion, après la présentation par le président de la RAM, Abdelhamid Addou, du plan de développement futur de la compagnie en interne et à l’international dans le cadre du contrat-programme 2023-2037 signé avec le gouvernement.
C’est connu, la connectivité aérienne domestique, qui a largement dominé les échanges, est cruciale pour le développement des territoires mal desservies. C’est le cas de Draa-Tafilalet et de ses cinq provinces qui, nonobstant leur potentiel économique considérable et diversifié (agricole, touristique et minier) et la richesse de leur capital immatériel continuent à souffrir de marginalisation.
« Il est grand temps d’arrimer nos territoires les plus enclavés, les plus défavorisés à la locomotive du développement économique et de réduire ensuite les fractures sociales et les disparités territoriales, à travers notamment la modernisation des infrastructures et le renforcement du transport national, international et interrégional sous toutes ses formes», a affirmé Mohamed Benamour. Prenant la parole, André Azoulay abonde dans le même sens puisque la ville dont il est natif, Essaouira, est loin de disposer d’une desserte aérienne à la mesure de son rayonnement à l’international. A cet égard, le conseiller royal , qui a félicité le président du CDS pour le choix de la thématique, a fait état d’insuffisances sans commune mesure avec les progrès remarquables réalisés au demeurant par un royaume qui « joue dans la cour des grands, parfois même des très grands». Et de se féliciter de ce « sujet opportun sur lequel, a-t-il ajouté, nous avons besoin d’une pédagogie, d’une visibilité et d’une responsabilité » tout en proposant la mise en place d’un « Open Sky Maroc» qui permettrait l’exploitation optimale de nouvelles routes aériennes intrarégionales, particulièrement dans les zones mal connectées. Autrement dit, vivement une libéralisation du ciel maroco-marocaine !
Message reçu cinq sur cinq par le patron de la RAM Abdelhamid Addou qui s’émeut de devoir jouer le rôle de « punching ball d’honneur ». « On est aussi payé pour ça », concède-t-il, un brin contrarié, prenant le temps de déployer l’argumentaire de la RAM sous l’angle de la rentabilité. « Je doute que le retour sur investissements de certains axes soit effectif aujourd’hui», affirme-t-il, tout en ajoutant que « le désenclavement ne peut pas se faire de manière spontanée et naturelle et décréter qu’une compagnie accepte de perdre de l’argent pendant 10 ans sur certains axes ». Pour M. Addou qui a rappelé au passage que certaines compagnies low cost sont mieux subventionnées que la RAM, il faut un cadre global qui doit être porté par une entité pour régler ce problème [ de désenclavement] maintenant et non pas demain.»
Développement humain
M. Addou a reconnu que les chiffres dans la région « ne sont pas bons dans l’absolu ». Pas seulement en matière de connectivité aérienne mais pour tous les indices de développement humain qu’ils soient d’ordre scolaire, éducatif, touristique, cinématographique et sanitaire, comme l’a brillamment démontré, chiffres parlants à l’appui, Samir Sahraoui dans son exposé largement applaudi. Dans le cadre du débat bien engagé, M. Benamour reprend la parole pour aborder dans un plaidoyer aux accents de la sincérité la question de l’Open Sky dans le cadre de la vision 2010. Une vision dont il est la principale cheville ouvrière et qui a fait l’objet d’un livre intitulé « La Voix Royale » présenté au souverain à Ouarzazate en 2001. Et de citer un passage très significatif de cet ouvrage : « Dans la région, si quelqu’un scrute le ciel ce n’est pas pour la pluie mais pour voir s’il y a un avion dans le ciel ». Conclusion de M Benamour : 2001 c’est déjà loin et nous sommes encore au même point. C’est dire l’importance du tourisme comme principale activité génératrice de revenus pour ces régions du grand sud marocain qui ont aussi besoin d’usines de transformation pour valoriser leurs produits agricoles comme les dattes (Errachidia), les pommes (Midelt), la rose (Kelâat Mgouna). Les bassins d’emploi prometteurs se trouvent dans l’investissement productif que le Crédit Agricole du Maroc accompagne via une panoplie d’offres de crédits, a fait savoir le président Mohammed Fikrat.
Les régions du grand sud marocain, dont les dernières pluies généreuses ont fait revivre les oasis et les palmeraies qui étaient au bord de l’agonie à cause de sécheresse, sont connues pour le sérieux de leurs populations, a fait remarquer à juste titre le leader du PPS Nabyl Benabdallah. « Mais ces zones riches aussi de leurs hommes n’ont toujours pas pris la part qui leur revient dans la dynamique de développement générale que connaît le pays ni bénéficié de la solidarité interrégionale pourtant stipulée dans la Constitution de 2011 », a-t-il relevé. D’où les fragilités chroniques qui plombent Draa-Tafilalet et des provinces environnantes comme Tata. Il est grand temps de rendre justice à ce Maroc qui regorge de richesses. Les différents intervenants sont unanimes là-dessus. Reste à actionner les bons leviers du décollage. Le Maroc ne doit pas prendre le sud. Il y va de son avenir.