Secteur bancaire : Pourquoi Holmarcom veut offrir une soeur à Crédit du Maroc

Mohamed Hassan Bensalah, président du groupe Holmarcom.

Le groupe Holmarcom, déjà propriétaire de Crédit du Maroc, serait en discussions avancées pour racheter la BMCI. Une opération stratégique qui, si elle aboutit, pourrait rebattre les cartes du secteur bancaire national.

Laila Lamrani

Au cœur de ces discussions, le groupe Holmarcom, contrôlé par la famille Bensalah, déjà actionnaire majoritaire de Crédit du Maroc. Le conglomérat, également propriétaire des assurances AtlantaSanad et des Eaux minérales d’Oulmès (Sidi Ali), a confirmé dans un communiqué en date du 12 décembre être en pourparlers avancés avec la banque française BNP Paribas. Cette dernière détient 67 % du capital de la BMCI et envisage de céder cette participation stratégique dans le cadre d’un repositionnement global de ses activités. Holmarcom n’est pas un inconnu dans l’univers BMCI : sa holding financière, Holmarcom Finance Company, figure parmi les actionnaires historiques de la banque depuis près de trois décennies, ce qui lui confère une connaissance approfondie de la structure, de ses mécanismes et de sa culture managériale. Selon les experts, cette fusion est de nature à créer un nouveau grand pôle bancaire, capable de redéfinir les équilibres du secteur.

Au-delà de son aspect technique, l’opération envoie un signal de confiance sur le potentiel du marché bancaire marocain, ce qui pourrait attirer d’autres investisseurs ou accélérer d’autres restructurations. La fusion entre Crédit du Maroc et la BMCI, si elle se concrétise, aura sans conteste plusieurs impacts majeurs sur le paysage bancaire national.  En plus de renforcer la tendance à la concentration du marché bancaire national , déjà dominé par un trio de tête (Attijariwafa Bank, Bank of Africa et la Banque Populaire), le nouvel ensemble se positionnerait juste derrière, avec un portefeuille clients élargi et un réseau d’agences consolidé. Holmarcom deviendrait ainsi un poids lourd bancaire, marquant le renforcement des groupes privés marocains face aux institutions à capitaux publics ou étrangers.

Avantage structurel

La nouvelle entité pourrait dynamiser la concurrence sur plusieurs segments (crédit, banque digitale, PME, haut de gamme), poussant les autres banques à innover davantage. Le groupe Holmarcom a déjà un pied dans les assurances à travers AtlantaSanad. Renforcer sa présence bancaire n’a que des avantages et même des atouts par rapport aux autres acteurs. Un pôle intégré banque-assurance crédibilise davantage Holmarcom auprès des autorités, des régulateurs, des investisseurs et des marchés.

Holmarcom se dote ainsi d’un outil comparable à ceux des ténors du secteur, tout en affichant un ADN marocain fort et une logique de développement à long terme. En clair, cette stratégie confère à Holmarcom un avantage structurel : celui de devenir un acteur transversal, à la fois industriel, bancaire et assurantiel, dans un marché de plus en plus interconnecté.

En effet, le renforcement de la présence du groupe Holmarcom dans la banque, en complément de ses activités assurantielles via AtlantaSanad, lui offre plusieurs avantages stratégiques. En combinant banque et assurance (bancassurance), Holmarcom peut proposer une offre globale à ses clients, comme le font déjà les grands groupes (AWB avec Wafa Assurance, ou la Banque Populaire avec la MAMDA-MCMA). Par ailleurs, le croisement des clientèles banque/assurance permet de maximiser les ventes croisées (cross-selling) et de fidéliser davantage la clientèle, notamment dans les segments particuliers et PME.

Et puis, avec deux leviers financiers puissants, le groupe Bensalah pourrait mutualiser ses ressources (réseau, technologie, données client), optimiser ses coûts et accroître sa rentabilité. Ce qui le rend moins dépendant d’acteurs extérieurs pour financer ses projets industriels ou assurer la couverture de ses risques. La vision du président Mohamed Hassan Bensalah à travers cette opération peut être qualifiée de stratégique, ambitieuse et structurante. Elle s’inscrit dans une logique claire de constitution d’un groupe financier intégré et diversifié, capable de rivaliser avec les grands acteurs du paysage économique national. Il ne s’agit pas d’une opération opportuniste, mais d’un projet pensé sur plusieurs décennies, visant à faire émerger un acteur marocain puissant dans les secteurs clés de la finance. En rachetant une banque d’origine française et en renforçant un groupe à capital marocain, Mohamed Bensalah s’inscrit dans une dynamique de “re-marocanisation” d’un secteur stratégique.

En connectant banque, assurance, et d’autres activités du groupe (comme les Eaux d’Oulmès), il adopte une vision globale de l’écosystème économique, créant des synergies entre métiers. Mohamed Bensalah montre qu’il suit les tendances mondiales où les grands groupes se transforment en conglomérats financiers multiservices. En somme, sa vision est celle d’un capitaine d’industrie qui pense en architecte de puissance nationale, tout en restant ancré dans une logique de compétitivité, de croissance organique et de création de valeur sur le long terme.

Les plus lus
[posts_populaires]
Traduire / Translate