Quand les agriculteurs français et espagnols sont en colère, ils se vengent contre les produits agricoles marocains, érigés en bouc-émissaires d’une agriculture européenne en mal de compétitivité pour des raisons européennes.
Plusieurs camions en provenance du Maroc chargés particulièrement de tomate, comme le montrent des vidéos circulant sur les réseaux sociaux, ont été pris d’assaut ces derniers temps sur les autoroutes françaises et espagnoles avant que la cargaison ne soit déversé sur la chaussée et piétiné. Ces assaillants, dont le mouvement de protestation a traversé toute l’Union européenne, ciblent particulièrement la tomate marocaine qu’ils considèrent comme le symbole de leurs difficultés qu’ils ont dénoncées auprès de la commission européenne en bloquant la majorité des axes routiers.
La Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (COMADER) a exprimé son inquiétude face à cette situation. «Nous exprimons notre inquiétude suite aux attaques récurrentes et infondées dont les produits marocains font l’objet ainsi que la stigmatisation médiatique dont les agriculteurs marocains sont les victimes collatérales», a indiqué la confédération dans un communiqué rendu public récemment. L’instance dirigée par Rachid Benali rejette avec véhémence les arguments déployés sur la qualité des produits agricoles marocains : «Les produits agricoles marocains exportés vers l’Union européenne sont des produits de qualité qui se conforment strictement, et sans exception, aux exigences réglementaires des marchés de destination. Celles-ci portent notamment sur les normes de commercialisation, les normes sanitaires et les normes phytosanitaires.»
En fait, les producteurs agricoles français et espagnols estiment qu’ils sont victimes d’une concurrence déloyale livrée par les agriculteurs marocains. Selon eux, ces derniers bénéficient de conditions avantageuses grâce à une main-d’œuvre bon marché, ce qui alimente une machine de production à bas coût. Ce qui les met in fine en difficulté et entrave la commercialisation de leurs tomates sur le marché. Il est vrai que le salaire horaire d’un ouvrier agricole européen est plus élevé (autour de 14 euros contre 8 Dh au Maroc). Mais l’argument de l’écart de rémunération ne tient pas véritablement la route, notamment pour des produits comme la tomate-cerise puisque le nombre de travailleurs mobilisés à l’hectare est de 5 au Maroc contre moins de 2 en France par exemple. Les problèmes de compétitivité de l’agriculture européenne résident ailleurs, notamment dans les facteurs de production comme le prix du gasoil agricole, les factures d’eau dont le niveau est élevé ainsi que la complexité de la réglementation. Hormis cette volonté de faire des fruits et légumes marocains le bouc-émissaire des turpitudes de l’agriculture française et espagnole, rien ne justifie de vandaliser la tomate marocaine qui est écoulée de surcroît sur le marché européen en vertu de l’accord agricole entre le Maroc et l’UE. Un accord qui permet au Royaume d’exporter chaque année en France quelque 300 tonnes de tomates, exemptées de droits de douane et dont les syndicats agricoles français réclament par démagogie la suppression pure et simple!
Dans l’espoir d’inciter les consommateurs de l’Hexagone à consommer français, la mobilisation des protestataires du travail de la terre a débouché sur la mention « Origine Maroc » sur les barquettes de tomate-cerise. Cela ne sert à rien de voir rouge et de raconter des salades lorsque l’on veut, ce qui est legitime, mettre du beurre dans les épinards w