Le sacre du grand « footoir « 

Le stade Mohammed V est un grand point noir pour Casablanca…

Entre insécurité, désordre et violences, regarder les  matchs chauds qu’abrite le stade Mohammed V s’apparente à une montée au front. A vos risques et périls.

Des incidents ont de nouveau  émaillé le match Raja-Ahly, samedi 29 avril. Cette fois-ci, l’affaire a pris une tournure dramatique à cause du décès d’une supportrice lors d’un mouvement de foule. Scandale. Indignation.

Des voix se sont élevées pour réclamer des comptes qui ne seront jamais rendus. Les responsables dans ce pays ont pris l’habitude de faire le dos rond en misant sur l’oubli favorisé de plus en plus par un contexte “infokleenex“ où les mauvaises nouvelles en pagaille chassent les faits divers de toutes sortes. Une vidéo largement partagée sur les réseaux sociaux montre la formation d’un goulot d’étranglement devant la porte du stade, avec des dizaines de spectateurs agglutinés à l’entrée là où ces flux étaient supposés être fluides avant leur arrivée à l’entrée. Visiblement, ça a dysfonctionné dans la gestion et l’organisation. De nombreux supporters n’ont pas pu pu rentrer alors qu’ils étaient en possession de leur billet en bonne et due forme. Visiblement, le stade  a fait le plein, voire le trop plein avec des tickets falsifiés, un mal qui ronge certains matchs du championnat. Cette défaillance a créé des bousculades. D’autres images ayant  circulé  sur les réseaux sociaux montrent des centaines de supporters repoussés  au canon à eau à haute pression, dispositif utilisé généralement  par les forces de l’ordre sous d’autres cieux  pour disperser les manifestants. Au Maroc, cette séquence a quelque chose de choquant puisqu’il s’agit d’un match de football censé être une fête et non une marche de protestation qui risque de dégénérer. Match de foot ou  guérilla urbaine ? Le fait que la DGSN déploie à l’occasion des matchs de football  un  véhicule conçu spécialement pour assurer des missions anti-émeutes  en dit long sur les dérives de violences  récurrentes dans et souvent à l’extérieur des stades. Les épisodes de violences et les actes de vandalisme à l’occasion des matchs sont récurrents à Casablanca.

Ce qui représente un danger permanent  pour les riverains qui tremblent à chaque fois qu’ils voient débouler les supporters  par milliers  dans ce quartier  du Maarif. Entre ras-le-bol et terreur, ils vivent plusieurs fois par mois l’enfer au point que certains se claquemurent chez eux les jours de ces matchs de tous les dérapages après  avoir  pris le soin de garer leurs véhicules très loin de la zone à risque pour les protéger des  fréquentes entreprises de saccage. Les considérations sécuritaires génèrent  également de grosses contraintes de circulation imposées aux  automobilistes. Ces derniers doivent  faire de grands détours en raison du bouclage par les forces de l’ordre de tout le périmètre autour du stade Mohammed V dès le matin  pour une rencontre prévue en début de soirée. Pour des matchs de football, ce  déploiement sécuritaire impressionnant avec mobilisation de plusieurs milliers  d’hommes en uniforme et plusieurs dizaines de véhicules de maintien de l’ordre sont hors normes. En cause l’emplacement du stade Mohammed V, qui n’est plus adapté aux matchs du championnat professionnel, rattrapé depuis plusieurs années par l’urbanisation qui s’est développée dans l’arrondissement. Il est tout de même curieux que les autorités continuent de s’en accommoder malgré les graves problèmes sécuritaires et les désagréments sérieux  que  sa situation occasionne pour tout le monde. Y compris pour les membres des forces de l’ordre durement éprouvées par ces matchs à haut risque.

Construit en 1955, le stade Marcel Cerdan, rebaptisé un an après son inauguration « stade d’honneur », devait être transféré dans la périphérie de la métropole, Bouskoura ou Dar Bouazza. Le projet du Grand Stade de Casablanca a même fait l’objet d’une convention-cadre signée en 2008. Enterré pour des raisons jamais expliquées, ce chantier,  réapparaît en 2018  à Mansouria dans la province de Benslimane, sous le mandat de l’ex-ministre  de la Jeunesse et des Sports Rachid Talbi Alami, à l’occasion de la candidature du Maroc à l’organisation du mondial de 2026 remportée par le trio américain. Mais qu’attend donc le tuteur du département du sport, le très sportif Chakib Benmoussa, alors que le Maroc est candidat avec l’Espagne et le Portugal pour l’organisation du mondial 2030, pour déterrer avec force et sportivité ce magnifique projet? Face à un tel projet fantomatique,  il préfère être discret de peur de jouer sa réputation ?

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