Un tribunal algérien a accepté une première plainte contre Kamel Daoud et son épouse psychiatre pour avoir dévoilé l’histoire de Sa3da Arbane, une rescapée du massacre des islamistes algériens, pour l’écriture du livre «Houris », récompensé par le Prix Goncourt 2024. Sa3da Arbane a survécu à un égorgement des islamistes algériens qui lui a coupé les cordes vocales et l’a rendue muette. La plainte se réfère aussi à l’article 46 de la loi de Bouteflika, dite de réconciliation nationale, qui prévoit jusqu’à 5 ans de prison pour toute personne qui, par ses déclarations, ses écrits ou toute autre action, exploite les blessures de la tragédie nationale. L’éditeur français Gallimard a dénoncé lundi les « violentes campagnes diffamatoires orchestrées par certains médias proches d’un régime dont nul n’ignore la nature ». Après les accusations suivent les contre-accusations et une plainte pour diffamation. L’éditeur Antoine Gallimard a dénoncé les attaques « diffamatoires » à l’encontre de l’auteur algérien Kamel Daoud. Pour la maison d’édition, l’enjeu est énorme : « Houris » a été tiré à plus de 300 000 exemplaires et depuis le Goncourt, il est numéro 1 des ventes, avec plus de 50 000 exemplaires écoulés cette semaine. Sabeur Younes, le journaliste algérien qui a interviewé Sa3da Arbane, assure n’avoir subi aucune pression. Il dit qu’il a été contacté par la jeune femme et qu’il a vérifié ce qu’elle racontait. Il a pu voir des preuves tangibles comme les échanges de SMS entre elle et la femme de l’auteur ou le roman Houris, qu’il lui a dédicacé. Selon lui, c’est en recevant ce livre avec le mot de Kamel Daoud qu’elle a voulu parler. C’est une femme en état de choc à cause de cette histoire. Elle lui a confié avoir lu un tiers du roman et ne pas avoir pu continuer, car elle s’est sentie trahie dans son intimité. Elle a lu des choses que seule sa psychiatre savait… Elle veut que la vérité soit rétablie. De son côté, Kamel Daoud crie sa colère, sa peur et son impuissance après l’arrestation de l’auteur algérien Boualem Sansal, dont on était sans nouvelles depuis plusieurs jours. Le président français Emmanuel Macron s’est dit très inquiet de la situation de l’auteur de 75 ans. La France est mobilisée pour clarifier cette situation. Le président français exprime son attachement indéfectible à la liberté de Boualem Sansal. Plusieurs responsables politiques français, appartenant surtout à la droite et au centre-droit, ont aussi exprimé leur inquiétude et leur soutien envers Boualem Sansal, connu pour sa liberté de pensée, que ce soit contre le pouvoir algérien ou l’intégrisme religieux, depuis qu’il s’est lancé en littérature en 1999. L’Algérien Kamel Daoud est le fils d’un gendarme et d’une femme de la bourgeoisie terrienne de Mesra. Aîné d’une fratrie de six enfants, il est le seul à avoir fait des études supérieures. Après un baccalauréat scientifique, il fait des études de lettres françaises. S’il écrit en français et non en arabe, c’est, dit-il, parce que « la langue arabe est piégée par le sacré, par les idéologies dominantes. On a fétichisé, politisé, idéologisé cette langue ». Islamiste durant son adolescence, Kamel Daoud quitte ce courant politique à l’âge adulte et participe à la manifestation antigouvernementale du 5 octobre 1988 à Mostaganem. « La rencontre ou non avec Dieu, c’est une affaire personnelle qui relève de l’ordre de l’intime, c’est une expérience qu’on ne peut pas partager et imposer aux autres.» Le 13 décembre 2014, il déclare sur la chaîne de télévision France 2 : « La question religieuse devient vitale dans le monde arabe. Il faut qu’on la tranche, il faut qu’on la réfléchisse pour pouvoir avancer. ». Trois jours plus tard, cette déclaration lui vaut d’être frappé d’une fatwa qui appelle à son assassinat pour apostasie et hérésie car il a blessé les musulmans dans leur dignité et a fait les louanges de l’Occident et des sionistes. (À suivre)
- lun, 13 janvier 2025