« La maladie du « bouser, bouser » !

L’Inde est un pays que Lhaj Miloud a toujours trouvé fascinant… Un pays-continent, inclassable à bien des égards, qui cumule les contrastes et divise les experts…  Leader dans les domaines technologiques de pointe, et pays du Tiers-monde qui se bat contre un sous-développement endémique, la famine et la malnutrition… Plus grande démocratie du monde, et infâme bourbier sans repère ni boussole, livré à lui-même… Exportateur de médicaments à grande échelle, et incapable de soigner la majeure partie de ses habitants en temps normal… Et a fortiori en cas de pandémie galopante !

Aujourd’hui, ce géant aux pieds d’argile est confronté à un nouveau défi… Il se débat désespérément contre trois nouveaux variants de la covid19, et les chiffres ne sont guère rassurants… A un moment où la plupart des pays d’Europe entrevoient enfin le bout du tunnel, et envisagent plutôt sereinement l’avenir, en Inde, c’est le chaos ! Le pays vit un véritable cauchemar avec plus de 300 000 nouvelles contaminations quotidiennes depuis la fin du mois d’avril ! Et encore, certains estiment que le nombre de cas recensés, déjà alarmant, resterait pourtant en deçà de la réalité ! Les structures hospitalières sont dépassées, les bouteilles d’oxygène manquent cruellement, beaucoup de gens meurent dans la rue, faute de trouver une place dans un hôpital, et les crematoriums improvisés sont débordés !

Mais l’Inde croit avoir trouvé le remède miracle dans lequel le petit peuple indien place tous ses espoirs, et qu’il vous tarde certainement de connaitre, n’est-ce pas ? Non, il ne s’agit point d’un vulgaire vaccin chinois, russe ou occidental…. Pas assez efficaces et surtout pas suffisamment disponibles ! Oui, dans ce pays considéré comme le plus grand laboratoire pharmaceutique du monde, on manque cruellement de vaccins ! Mais qu’à cela ne tienne! Comme à chaque fois que les peuples sont accablés par la fatalité, ils se retournent instinctivement vers leurs divinités et leurs croyances séculaires. Pas assez de vaccins ? On utilisera de la bouse de vaches ! Laquelle bouse est déjà employée à grande échelle et pour de multiples usages ! Pour fabriquer des bâtons d’encens, par exemple, dont on se demande s’ils sentent vraiment la rose, d’ailleurs… Mais les goûts et des couleurs ne se discutent pas… Et les senteurs, non plus, apparemment ! La vache sacrée vient ainsi encore une fois à la rescousse des déshérités et des intouchables ! La vache sacrée, cet animal emblématique que les hindous vénèrent, et dont la bouse est considérée par ces adorateurs comme parée de toutes les vertus… A l’instar de l’urine de chameau dans d’autres contrées, où l’on transforme la pisse de ce brave ruminant en sirop miracle, à usage thérapeutique et préventif… A consommer avec modération, cependant ! Outre la fabrication des bâtons d’encens, la précieuse matière est aussi connue pour la fabrication de maisons en pisé, ou en tant que combustible particulièrement prisé dans les contrées reculées où la déforestation a fait son œuvre… Mais c’est dans le pays de la vache sacrée que les usages qu’on en fait sont les plus variés, et parfois les plus prometteurs… C’est ainsi qu’un procédé révolutionnaire vient d’être mis au point par des scientifiques indiens pour transformer la précieuse matière fécale en… peinture écologique ! « Une peinture blanche et inodore, qui permet de lutter contre les bactéries et les champignons, en évitant l’emploi de substances chimiques », dixit un ministre du gouvernement fédéral, en évoquant ce produit miracle, « et qui peut être décliné dans n’importe quelle couleur en y incorporant des colorants ». Une peinture réputée sécher “en moins de quatre heures”, et pouvant être appliquée tant sur les murs intérieurs qu’extérieurs… A un prix défiant toute concurrence !

De la peinture miracle au remède miracle, il n’y avait qu’un pas que la population a allègrement franchi en désespoir de cause, dramatiquement privée qu’elle est de l’accès aux précieux vaccins et aux protocoles sanitaires homologués… A souche locale, traitement local donc ! Lhaj Miloud ne vous fera pas languir plus longtemps, et vous livre gracieusement le mode d’emploi de cette mixture magique… Il suffit de s’enduire le corps chaque dimanche, de « panchagavya », un mélange de lait, de beurre clarifié, de yaourt, d’urine et de bouse de vache. Ah oui, dernière recommandation importante ! En attendant que la mixture sèche, les participants doivent pratiquer le yoga et rendre grâce aux vaches pour les remercier de leurs bienfaits. Il ne restera plus ensuite qu’à se rincer le corps avec du lait pour se voir « insuffler énergie et positivité », et faire le plein de vitamine B12, laquelle serait contenue en abondance dans la bouse de vache… Qui l’eut cru ?

Simple comme bonjour, non ? La covid19 n’a qu’à bien se tenir, n’en déplaise à la communauté scientifique qui dans sa grande majorité, craint que cette pratique, à défaut de s’avérer efficace contre la pandémie, n’aboutisse au contraire à une propagation sans précédent d’autres maladies infectieuses ! Les autorités du pays rappellent d’ailleurs, à qui veut bien les entendre, que cette prétendue thérapie miraculeuse n’est pour le moment corroborée par aucune preuve scientifique. La perspective d’une homologation par l’OMS restant hautement improbable, il serait judicieux que le reste du monde se « bouse » comme un seul homme pour venir en aide à ce malheureux pays, en passe d’être complètement dépassé par la pandémie, avant que la situation ne devienne incontrôlable ! Sachant que des cas de variants indiens ont déjà été détectés au Royaume-Uni et en France, qui risquent de ne pas avoir le temps de se reposer sur leurs lauriers ! Ainsi qu’au Maroc, puisque notre ministère de la Santé a annoncé, ce lundi 10 mai, la détection à Casablanca de deux cas confirmés… Le Maroc, premier pays arabe impacté… Et un pionnier, comme toujours !

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