Lhaj Miloud se souvient que, dans les années 70, les experts prédisaient que les réserves de pétrole étaient en voie d’épuisement… Oui, déjà à cette époque-là ! Et ils se gaussaient des monarchies pétrolières qui, dans une trentaine d’années, donc en l’an 2000 au plus tard, auraient définitivement mangé leur pain blanc ! Et, après la courte parenthèse de l’or noir, devraient retourner à l’élevage de chameaux et à la pêche des huîtres… En espérant qu’ils n’auraient pas perdu la main ! Seuls s’en sortiront, prédisaient ces doctes personnages, quelques pays dits révolutionnaires qui suscitaient l’admiration des intellectuels de gauche en Occident… Il faut dire qu’à l’époque, l’Union Soviétique tenait la dragée haute au monde capitaliste et il faisait bon s’afficher à ses côtés… Les révolutionnaires du dimanche, qui tenaient salon dans les cafés branchés du XVIe à Paris et ailleurs, ne donnaient pas cher de la peau de l’Arabie Saoudite et encore moins de celles de leurs petites monarchies satellites… Par contre, ils avaient les yeux de Chimène pour les républiques dites « démocratiques et populaires », alliées du camp soviétique et grands pourfendeurs de l’impérialisme yankee !
Beaucoup d’eau a coulé depuis sous les ponts et la plupart de ces grands experts ne sont sans doute plus de ce monde… A moins qu’ils ne coulent des jours paisibles dans de tristes maisons de retraite, en attendant le grand départ… Tout ce qu’espère Lhaj Miloud, c’est qu’ils aient été frappés par la maladie d’Alzheimer… Ce qui leur permettrait de ne plus garder souvenir de leurs prédictions hasardeuses… Parce que le fait est qu’ils risqueraient de tomber de haut s’ils pouvaient voir ce qu’il est advenu de ces pays pétroliers promis, selon eux, à être balayés par les vents du désert… Du pétrole et du gaz, ils en ont toujours… De nouveaux gisements ayant été découverts depuis et en abondance… Mais mieux encore, ces royaumes, présentés comme des modèles de gabegie et de mauvaise gouvernance, se sont avérés au fil du temps bien plus sages et bons gestionnaires qu’on ne pouvait l’imaginer… La plupart ont construit des infrastructures modernes et on fait jaillir des sables des cités futuristes… Des industries relativement diversifiées ont été développées et pas seulement dans le secteur des hydrocarbures… D’une agriculture archaïque et souffrant d’un déficit hydrique chronique, ils ont, pour beaucoup, atteint l’autosuffisance alimentaire… Cerise sur le gâteau, ils sont présents, désormais, dans la high-tech et se sont invités dans la recherche spatiale…
Ces pays ont donc, généralement, géré leurs revenus providentiels en bons pères de famille même si certains excès des familles régnantes ont fait couler beaucoup d’encre en Occident où les médias, jaloux et revanchards, ont beaucoup forcé sur le trait du prince arabe dragueur et joueur qui laisse des fortunes sur les tapis de casinos… L’accent était beaucoup moins mis sur les capitaines d’industrie et hommes d’affaires de stature internationale qui ont multiplié les investissements judicieux à travers le monde, s’invitant dans le tour de table des plus grandes multinationales… Par ailleurs, des fonds de prévoyance pour les générations futures ont été alimentés patiemment par des prélèvements sur la rente dont ils savent mieux que quiconque qu’elle n’est pas éternelle… Il n’y a d’éternel qu’Allah, n’est-ce pas ?
Ainsi, nos experts, aujourd’hui décédés ou retraités, ont eu tout faux sur toute la ligne !
D’autant plus que, pendant que les monarchies du Golfe jouissaient d’une certaine stabilité politique et d’un développement économique soutenu, l’Algérie ex-révolutionnaire s’est enfoncée chaque jour un peu plus dans le chaos ! Et ne parlons même pas de l’Irak et de la Libye, ravagés par l’insécurité, les guerres civiles et les influences étrangères… Après l’ère des industries « industrialisantes », qui a englouti des milliards sans pour autant permettre au pays de produire quoi que ce soit sauf de la propagande, l’Algérie s’est installée durablement dans une gestion rentière où les seuls hydrocarbures finançaient tous ses besoins et où les pontes du régime se sont réparties la manne des importations, stérilisante et budgétivore… Exactement comme dans un système mafieux où les parrains se partagent impunément « le marché » entre prostitution, alcool, contrebande, drogue et change illégal, les quarante s voleurs de la junte ont transformé le pays en un « bled siba », constituant des fortunes personnelles colossales au détriment des caisses publiques ! De près de 200 milliards de dollars, en 1994, les réserves du pays se sont rétrécies comme peau de chagrin pour s’établir actuellement à moins de 40 milliards de dollars ! Ainsi, l’année dernière, l’Algérie a exporté pour environ 16 milliards de dollars de gaz et de pétrole alors qu’elle importait pour 35 milliards de marchandises en tout genre, le pays ne produisant à peu près rien ! Ah si ! Des dattes et des pattes ! Des pattes de poulet vers le Vietnam ! Voilà qui leur fait une belle jambe !
Mais avec leur chance de cocus, les militaires d’opérette se sont de nouveau vus offrir une seconde chance… Le renchérissement des cours des hydrocarbures en 2022 vient encore de leur sauver la mise ! En attendant la flambée des prix des pattes de poulet et après ce début de diversification audacieux, le président de la Sonatrach, le (seul) poumon économique du pays vient d’annoncer un ambitieux programme d’investissement pour le prochain quinquennat ! Environ 40 milliards de dollars qui seront consacrés à quoi, Lhaj Miloud vous le donne en mille ? A diversifier l’économie et à essayer enfin de s’arracher de leur dépendance morbide vis-à-vis des hydrocarbures, mettant ainsi fin à la malédiction du pétrole ? Pensez-vous ! Cette cagnotte inespérée sera principalement investie dans l’achat d’armements, qu’ils ne savent plus où stocker, et dans la prospection d’hydrocarbures !
Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, dit-on… Un adage que vient nous confirmer quotidiennement notre voisin… La malédiction du pétrole emportera bientôt un régime d’autistes cupides, hostiles et bornés qui auront réussi à démentir les grands experts des années soixante, lesquels voyaient en l’Algérie la future grande puissance continentale et un modèle pour le Tiers-monde ! Tout le monde peut se tromper !