Le Roi de la transparence

Certains observateurs étrangers, qui ont une certaine connaissance du Maroc et des spécificités de ses traditions politiques, ont salué à juste titre la réussite du triple scrutin du 8 septembre 2021, et la transparence habituelle qui a marqué la proclamation de ses résultats. Fait notable qui a été relevé par ces experts, les islamistes du PJD ont été chassés du pouvoir par les urnes, aux antipodes des méthodes pour le moins anti-démocratiques utilisées par certains régimes voisins.  

Difficile à cet égard de ne pas faire un parallèle avec les autres expériences dans la région. En Algérie tout d’abord où le pouvoir militaire en place a très tôt mis fin à la récréation démocratique en confisquant la victoire du FIS (Front Islamique du Salut) aux premières élections pluralistes de juin 1990. Ce parti islamiste, qu’il aurait fallu en principe laisser gouverner puisqu’il avait obtenu la légitimité des urnes, faisait trembler les généraux algériens et inquiétait la France. Le vol de la victoire de Abbassi Madani et de ses amis enfanta la «sale guerre d’Algérie » et plongea le pays dans le terrorisme qui a fait près de 200.000 morts tout en aggravant ses problèmes sociaux. L’Algérie ne s’est jamais vraiment remise politiquement de cette décennie noire. La suite est connue…

En Égypte, le général Abdel Fattah Al-Sissi est devenu le nouvel homme fort du pays après avoir mené en 2012 un coup d’État contre le président islamiste Mohamed Morsi élu démocratiquement dans le sillage de la destitution de Hosni Moubarak suite à la contestation populaire née du Printemps arabe. Le général-président ira plus loin dans le coup de force en organisant une répression féroce contre les Frères musulmans qu’il fera embastiller et condamner à la peine de mort après avoir emprisonné le président islamiste qui décédera plus tard en prison dans des circonstances mystérieuses.

Force est de constater que ce que d’aucuns appellent l’exception marocaine n’est au fond que l’expression de la force tranquille d’un État séculaire et de sa grandeur.

Offrant le visage de la seule démocratie émergente dans le monde arabe suite à la révolution qui chassa du pouvoir le président Ben Ali en 2011, la Tunisie, en proie depuis à une profonde crise socio-économique aggravée par la pandémie du Covid-19, a plongé en juillet dernier dans le chaos politique. La raison ?  Ce qui ressemble à un virage autoritaire pris par le président élu Kaïs Saïed.  Ne sachant visiblement pas comment s’y prendre pour gérer les islamistes d’Ennahda, principale force politique du pays, qui ont dénoncé un « coup d’État », il a cédé à la tentation de s’octroyer les pleins pouvoirs, suspendu le Parlement et démis le Premier ministre de ses fonctions.

Dans ces contextes politiques mouvementés et incertains, le Maroc offre un visage différent. Serein et qui rassure tout en confirmant les convictions démocratiques de son souverain. L’avènement de S.M le Roi Mohammed VI en 1999 marque en effet une rupture nette avec les pratiques électorales frauduleuses du passé et place le respect absolu de la normalité démocratique au-dessus de toute autre considération. Les forces politiques en présence ne doivent plus compter sur le soutien de l’administration pour arriver au pouvoir. Seule fonctionne la légitimité des urnes. Celle-là même qui a permis aux islamistes du PJD de conduire les affaires du pays pendant une décennie, en cohabitant avec la monarchie dans l’ordre et la sérénité, les a chassés du pouvoir à l’issue du triple scrutin du 8 septembre 2021. Sans donner de leçons à personne, force est de constater que ce que d’aucuns appellent l’exception marocaine n’est au fond que l’expression de la force tranquille d’un État séculaire et de sa grandeur, qui puise ses racines dans une Histoire au long cours. Un État où le monarque est au-dessus du jeu partisan et joue son rôle d’arbitre et de garant de la continuité des institutions.

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