Mohamed Najib Boulif a fait l’actu ces derniers temps en se dressant via une fatwa obscure contre les crédits Intelaka pour les jeunes. Pour le Canard, l’ex-ministre islamiste a accepté d’expliciter sa non-pensée fulgurante…
Mais qu’est ce qui vous a pris pour émettre cette fatwa, qui a été critiqué jusque dans votre propre camp, considérant contraire à la religion le recours aux crédits du programme Intelaka en faveur de la jeunesse désireuse de créer sa propre entreprise ?
Comme j’ai été condamné à l’oisiveté après avoir été chassé du gouvernement où j’ai été un ministre hautement terne, il fallait que je trouve une activité de rechange faute d’une action de mon parti pour me recaser en m’offrant une autre planque bien rémunérée.
Et vous n’avez rien trouvé de mieux par vos propres moyens que le métier de mufti ?
Tout à fait. Un mufti qui moufte est le boulot de celui qui n’en a pas ou plus. Les temps sont durs surtout pour les ex-ministres de ma qualité franchement très moyenne. Personne ne veut m’offrir un poste digne de mon incompétence…Ce qui me pousse à penser que les responsables PJD en général, une fois boutés hors du pouvoir, ne sont pas recyclables. Bons à végéter et à broyer du noir.
Mais vous pouvez toujours reprendre votre poste de professeur de droit à l’université de Tanger…
Revenir à l’enseignement ? Pas question. Quelle horreur ! Si j’ai intégré le PJD c’est pour me débarrasser de ce boulot ingrat une fois pour toutes. Au prix de plusieurs années de militance plus ou moins sincère, mon engagement a fini par payer. Et j’ai été bombardé ministre, ce qui m’a beaucoup surpris. Dans mes rêves les plus exquis, je me voyais devenir directeur de division d’un petit ministère ou adjoint de l’ombre d’un patron d’office. Mais pas ministre ! Comme quoi, tout est possible au Maroc.
C’est la revanche des médiocres on dirait…
Des médiocres de valeur s’il vous plaît qui commencent grâce au PJD au pouvoir à peupler la haute administration. Les Marocains voulaient le changement, il est en marche au-delà de leurs attentes.
Oser déclarer illicite d’un point de vue islamique le programme Intelaka, qui est une émanation de la volonté royale, pour permettre aux jeunes de participer au développement de leur pays, ne vous ?
Je n’ai rien inventé en émettant cette fatwa classique quand il s’agit du crédit. Mais beaucoup de personnes ont pointé mes contradictions surtout que dans ma vie antérieure de ministre en charge des Affaires générales et de la gouvernance j’ai été amené à défendre le recours au crédit comme outil de création des richesses.
Vous avez pris le contre-pied de l’avis de votre collègue du parti Ahmed Raïssouni qui, lui, a défendu le programme Intelaka et ses taux de crédit de 2 et 1,75%….
Sa position qui n’a pas étonné est tout sauf désintéressée. Raïssouni, le petit mufti du dimanche, n’a jamais occupé de poste officiel et il n’a qu’un seul rêve : devenir ministre des Habous et des Affaires islamiques à la place de l’inamovible Ahmed Taoufik.