Engoncé dans une djellaba de laine épaisse, le ministre des Habous et des Affaires islamiques Ahmed Taoufik a reçu une équipe du Canard dans l’enceinte d’une mosquée de quartier à Rabat.
Ramadan 2022 est à nos portes. Pas de fermeture des mosquées à la dernière minute en perspective ?
Cette fois-ci, la situation épidémiologique du pays semble meilleure qu’elle ne l’a été au cours des deux dernières années. Ce qui nous avait obligé de fermer les mosquées et interdire les tarawihs.
Donc, on aura les tarawihs cette année ?
Certainement même si une certaine prudence s’impose au vu du rebond spectaculaire du covid en Chine qui renoue depuis plusieurs jours avec les confinements et les tests massifs.
Mais encore ?
Il faut que l’on soit vigilant au Maroc, essentiellement dans les mosquées qui connaissent pendant ce mois sacré un pic de fréquentation. J’invite donc les fidèles à prendre leurs distances les uns des autres, à remettre leurs bavettes, à éviter les salamalecs et les embrassades et à se faire vacciner pour ceux qui ne l’ont pas encore fait.
Certains disent que les maisons de Dieu sont protégées par leur propriétaire Tout-puissant. D’ailleurs, on a vu des clusters dans des usines, cérémonies de mariage et enterrements. Mais pas dans les mosquées…
C’est exact mais prière de ne pas se laisser aller à des gestes inutiles susceptibles de provoquer une relance de l’épidémie et partant une re-fermeture des mosquées.
Vous avez survécu à un tas de Gouvernements, ceux de Driss Jettou 1 et 2, Abbas El Fassi, Abdelilah Benkirane 1 et 2 et Saadeddine El Othmani 1 et 2. Vous êtes encore titulaire du même portefeuille dans le Gouvernement Akhannouch. Waw! Quelle longévité !
Je préside effectivement aux destinées du ministère des Habous et des Affaires islamiques depuis 2002, soit deux décennies exactement.
Le secret de ma longévité ? La zénitude que je puise dans la culture soufie. N’étant en compétition avec personne, je suis un ministre qui vit en lévitation et transcende le temps politique et les petits calculs partisans.
Vous devez vous ennuyer, non ?
Pas du tout. Bien au contraire. Ma fonction que j’assure depuis 20 ans avec abnégation renforce ma foi dans le destin. Au risque de surprendre, je suis un responsable unique qui incarne le changement dans la continuité.
Le Maroc, qui se targue de son islam tolérant et modéré, passe toutefois, pour un pays exportateur de djihadistes qu’il produit en quantités considérables et dont les services de sécurité démantèlent régulièrement des cellules en interne… Comment expliquez-vous cette contradiction ?
Les individus qui cèdent aux sirènes du terrorisme n’ont rien à voir avec l’islam. Ce sont des victimes de manipulations et même d’un lavage de cerveau que les commanditaires transforment en machines à tuer. Pour moi, ce sont des virus qui pour diverses raisons ont dangereusement muté.
