Affaire de viol présumé d’une juriste française  à Casablanca : Les dessous d’une soirée partie en sucette…

La lecture du PV d’audition de la ressortissante française présumée victime de viol à Casablanca laisse songeur à bien des égards. Nombre de zones d’ombres et d’incohérences entourent en effet le déposition de la plaignante faite le 7 novembre auprès du 3ème district de police judiciaire à Paris. Explications.

L’affaire de viol présumé impliquant trois « fils de » qui secoue depuis plusieurs jours les milieux bourgeois et d’affaires de Casablanca a pris une tournure spectaculaire. Sur ordre du juge d’instruction de la Cour d’appel de Casablanca qui a retenu à leur encontre les chefs d’accusation de viol, facilitation de viol, coups et blessures et usage de stupéfiants, les accusés ont été mis sous mandat de dépôt samedi 23 novembre à la prison de Oukacha à Ain Sebaa. Le principal suspect dans cette sombre histoire qui tient en haleine une partie de l’opinion publique est un riche héritier de 38 ans. divorcé avec deux enfants: Kamil Bennis, fils de l’ex-patron des laboratoires Laprophan, feu Ali Bennis. C’est dans sa villa coussue d’Anfa supérieur à Casablanca, où il a donné une soirée bien arrosée, samedi 2 novembre, que cette agression sexuelle supposée a eu lieu. Dans ce fait divers sulfureux qui n’a pas livré tous ses secrets ont été embarqués deux autres enfants du monde du business : M’hamed Alj, marié et père de deux enfants, fils du président de la CGEM et Saad Slaoui, issu également d’une lignée d’entrepreneurs. D’après leurs connaissances, les deux jeunes hommes « de bonne famille » en question n’ont rien à se reprocher dans ce qui s’est passé et qu’ils ont été injustement entraînés dans ce mauvais film.

La présumée victime de viol, Felix Sixtine, est une juriste française de 27 ans en couple depuis une année avec un cadre de la CGEM du nom de Mohamed Amine Naguib. Cousin de Kamil Bennis, il a été inculpé à son tour mais comparaîtra en état de liberté. C’est lui qui est à l’origine de la plainte pour coups et blessures et viol qui a conduit à l’arrestation des fils Bennis, Alj et Slaoui. Le tribunal médiatique est-il vite allé en besogne en condamnant les mis en cause avant que la justice ne se prononce? La lecture du PV d’audition de la plaignante, relayé dimanche 24 novembre sur les réseaux sociaux, laisse songeur à bien des égards. Nombre de zones d’ombres et d’incohérences entourent en effet la déposition de la ressortissante française faite le 7 novembre auprès du 3ème district de police judiciaire à Paris. Ce qui pourrait fragiliser a priori son témoignage.

« (…) J’ai appelé mon amie pour lui dire que je n’étais pas à l’aise ; c’est aussi quelque chose que j’ai dit à mon conjoint. Je sentais que je n’étais pas dans un environnement rassurant», déclare-elle d’emblée à l’enquêteur en raison, affirme-t-elle, de la présence de visages qu’elle ne connaît pas. Or, lorsqu’un invité ne se sent pas en confiance quelque part, il s’en va. Mais la convive, qui s’est rendue à cette fête avec son conjoint marocain, ne quitte pas les lieux. Elle reste, consomme de l’alcool, se sert à manger, passe la nuit dans la villa du maitre des céans qu’il accuse aujourd’hui de viol sous soumission chimique. 

Comportement inconvenant

La juriste, qui confesse « des douleurs générales au niveau des parties intimes » après avoir effectué un test urinaire toxicologique, ne repart que le lendemain en début d’après-midi. « Reste à savoir si elle est partie de son plein gré ou forcée ? », s’interroge auprès du Canard un proche du principal suspect sous couvert de l’anonymat, insinuant que la jeune fille a pris goût à la compagnie de Kamil Bennis, adepte selon lui « des aventures sans lendemain »… La plaignante reconnaît dans sa déposition une perte de mémoire entre 2 heures et 13-14 heures due selon elle soit aux effets d’une soumission chimique ou d’un black-out provoqué par la consommation d’alcool. Résultat : une bonne partie de sa déposition est le fruit de faits qui lui ont été rapportés après coup, notamment par son conjoint sur son comportement inconvenant lors de cette réception. «J’avais été super tactile avec d’autres hommes » alors qu’elle ne l’est pas de nature, précise-t-elle, «mon regard et mon attitude étaient différents», «j’étais agressive dans mes paroles », «je m’étais assise sur les genoux de plusieurs hommes». Mais peut-on objectivement, à la faveur d’une perte de souvenirs, être en capacité de reconstituer de manière limpide le déroulé des évènements et identifier avec certitude son agresseur ou ses agresseurs? C’est connu, l’alcool empêche le processus de mémorisation mais la plaignante pense que son « comportement a changé en raison d’une prise de drogues » et que les symptômes qu’elle avait correspondent, d’après « ses copines », à ceux du GHB : «trou noir », « désinhibition», « réveil anesthésie »… Or, le GHB, surnommé « drogue du violeur », est un dépresseur du système nerveux central qui engendre plutôt la somnolence et réduit le rythme cardiaque. La jeune juriste n’était pas dans cet état. Elle avait en revanche les agissements d’une personne qui a consommé de la cocaïne. Euphorique, en état d’exaltation et de joie extravagante avec une réduction des inhibitions, une exacerbation du contact avec les autres et une atténuation du besoin de sommeil. Exactement les mêmes signes que son compagnon lui a décrits et qui l’ont rendu «méconnaissable ». Au point, affirme-t-elle, que ce dernier, certainement alarmé par les gestes impudiques de sa femme, s’est senti obligé de la sortir de la soirée pour la mettre à l’abri «dans une chambre à part». Pressentant que la situation allait tourner au vinaigre, il a poussé le désir de la protéger jusqu’à demander à une «nounou » sur place de veiller sur elle. Non sans l’avoir rétribué après être sorti de la maison vers le coup de 5h30 pour retirer de l’argent d’un guichet automatique. Dans l’entourage familial du conjoint, certains s’interrogent : pourquoi M. Naguib a-t-il fait le choix de sortir dehors au petit matin pour effectuer un retrait en espèces plutôt que déposer sa femme chez sa grand-mère qui habitait juste en face de Kamil Bennis? Le test urinaire que la victime supposée effectué à Casablanca le lendemain de son réveil ne corrobore pas ses soupçons de GHB puisque les résultats révèlent qu’elle est positive à la cocaïne. «J’ai d’ailleurs insisté à recevoir un test GHB dans un laboratoire à Casablanca, mais ce n’est qu’à mon retour à Paris que j’ai découvert que ça n’a pas été fait et j’ignore la raison», signale-t-elle. « Concernant le fait que je sois positive à la cocaïne, je n’ai aucune explication », indique-t-elle lors de l’interrogatoire. Elle ajoute, cependant : «Je n’en ai pas vu pendant la soirée, en tout cas je ne m’en souviens pas », tout en précisant avoir laissé son « verre sans surveillance à plusieurs reprises ». Une manière de suggérer qu’une main mystérieuse a glissé de la coke dans son verre et qu’elle a été droguée à son insu… De la cocaïne, elle reconnaît toutefois en avoir consommé «en toute petite quantité au mois de septembre 2024 ». Sur sa relation avec Kamil Bennis, Felix Sixtine raconte l’avoir rencontré trois fois avant cette sauterie pour le moins mouvementée : deux fois à Marbella (dans un contexte festif) et une fois à l’enterrement du grand-père » de son compagnon. Elle dit bien s’entendre avec lui, même s’il «n’est pas tout à fait dans la norme» et qu’elle le trouve comme «quelqu’un très à part, égocentrique et qui se donne beaucoup en spectacle». La jeune française s’est-elle entichée de Kamil Bennis ? Ce qui aurait mis hors de lui son conjoint qui sera, d’après les dires de la victime présumée, viré « violemment de la maison » lorsqu’il a tenté de la récupérer de la pièce ou il a cru l’avoir mis à l’abri. Mais il en aurait été empêché par « un garde du corps» posté devant la chambre où elle se trouvait, toujours selon son conjoint, avec Kamil Bennis. Celui-ci rejette la thèse du viol sous substance chimique et reconnait des rapports sexuels consentis. Qui ment? qui dit vrai ? Il faut attendre les résultats de l’examen médical qu’elle dit avoir effectué auprès de l’unité médico-judiciaire (UMJ) à Paris pour voir clair dans cette affaire digne d’une telenovela mexicaine… Dans les salons huppés  d’Anfa circule une autre version des faits. A en croire ses auteurs, la soirée part en c…lorsque l’ex-femme de Naguib débarque et s’offre un long tête-à-tête avec son premier amour. Ce qui a mis en rogne la jeune française devenue subitement jalouse. S’ensuit une prise de bec entre les deux femmes en présence de Naguib qui s’est fait passer un savon par sa nouvelle conquête. Un incident signalé par F. Sixtine dans sa déposition mais qui l’aurait poussé, selon un témoin, à chercher immédiatement à allumer bien des convives dans un désir probablement de vengeance à l’encontre de son compagnon. C’est suite au comportement libertin de sa fiancée que le cadre de la CGEM perd son sang froid en vociférant. L’affaire dégénère lorsqu’un homme, adepte des arts martiaux,  lui assène un coup violent qui l’envoie au tapis en lui causant notamment une facture de la main. Le reste du témoignage de la juriste est un mélange de ragots (« Kamil aurait tué quelqu’un quand il avait 18 ans et qu’il n’est jamais allé en prison car la famille de la famille aurait été payée), de jugements de valeur à l’emporte-pièce (« il y a beaucoup de corruption au Maroc, « Au Maroc, il n’ y a pas vraiment de classe moyenne : il y a la haute société, proche du pouvoir et les « autres », et d’accusations graves sur la probité de la police et de la justice marocaines. Des propos pour le moins déplacés qui n’ont nullement leur place dans un dépôt de plainte. La jeune juriste s’exprime lors de son interrogatoire sur les séquelles de son viol supposé. Une « envie de suicide entre le dimanche 3 et lundi 4 novembre», matérialisée par une tentative de se tuer par une dose Tramadol. Tout en disant vouloir se «réancrer dans la vie rapidement», elle explique avoir refusé d’être internée aux urgences psychiatriques de Paris. «J’attends que justice soit faite. Je veux qu’il paie pour son crime commis, au même titre que ce qu’il paierait s’il était en France. Je veux qu’on l’emprisonne, pour payer et pour ma propre sécurité», conclut-elle.

Dossier complexe

Ce dossier en particulier n’est pas simple. La justice a fort à faire pour démêler d’abord ce qui ressemble à un écheveau complexe des fils du récit de la victime pour faire la part des choses entre ce qui relève du factuel et de la certitude, du subjectif et de la supposition. Et puis, difficulté supplémentaire, il faudra prendre en compte le contexte où s’est déroulée cette agression sexuelle supposée: une soirée où l’alcool coulait à flot et la drogue circulait certainement entre certains convives. La victime présumée a reconnu elle-même en avoir consommé et l’examen toxicologique qu’elle a subi a conclu à sa positivité à la cocaïne… Dans ces circonstances, il s’agit de prouver que le viol presumé a eu lieu par la violence, la contrainte ou la surprise, ainsi que l’absence de contentement de la victime à l’acte et la volonté de l’auteur de le réaliser en dépit de l’absence du consentement.

Qui est Kamil Bennis ?

Kamil Bennis est passé subitement de statut de noceur de luxe à celui de détenu pour viol. Est-ce la chute d’un riche héritier, un peu fêlé sur les bords, qui brûlait la vie par les deux bouts. Le nouveau pensionnaire de Oukacha issu du Maroc d’en haut doit être à l’étroit et mal à l’aise avec ses co-détenus du Maroc d’en bas pris dans les filets de justice pour des petits délits de misérables. Deux mondes évoluant longtemps en parallèle qui se rencontrent et se côtoient désormais entre quatre murs. Le Maroc n’est plus ce qu’il était… Kamil Bennis, c’est la star de Casablanca et le prince de ses nuits bien animées sur tous les plans. Les soirées qu’il donne sont si prisées qu’ils font rêver la jeunesse dorée de la métropole. Dj, open- bar, amuse-gueule, buffet de fête et service de traiteur dans une belle demeure… Mais il faut montrer patte blanche pour faire partie du club fermé de ses relations et obtenir le carton d’invitation tant convoité, contrôlé à l’entrée, histoire de repousser les rabat-joie par un véritable service d’ordre. Il faut dire que Kamil Bennis a largement les moyens de sa politique festive 5 étoiles. Entre 6 et 7 millions de DH de dividendes par mois, selon certaines indiscrétions, au titre de son statut de riche héritier de Laprophan dont le fondateur est son défunt père. L’argent coule à flot. Garde du corps et chien Saint-Bernard. Voitures et motos de luxe. Restaurants chic. Mais une vie dissolue dans l’alcool et la came. Deux fois marié. Deux fois divorcé. « Kamil Bennis se vit comme un artiste, un rappeur de Miami », explique un ami proche. Les vidéos qu’il fait poster sur ses comptes virtuels et qu’il fait tourner par des professionnels rétribués à coups de millions témoignent en effet de son côté excentrique et extravagant. A Oukacha, il a tout loisir de méditer sur son triste sort…

La Rédaction

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