Il y a le professeur et l’homme. Le professeur qui donne dans l’humilité et sans compter le meilleur de lui-même et l’homme aux qualités humaines indéniables qui favorisent l’empathie, l’échange fructueux et la générosité.
Seddik Mouaffak
Ce n’est pas un hasard si l’Institut Supérieur de Commerce et d’Administration des Entreprises (l’ISCAE) est devenu l’un des fleurons de l’enseignement supérieur au Maroc et la meilleure d’Afrique, notamment en matière de management. Cette réussite est d’abord le fruit d’une volonté royale. Celle de feu S.M. Hassan II auquel revient le mérite de sa création en 1971. Mais l’ISCAE et son rayonnement sont, sans conteste, intimement liés à l’engagement fort et constant d’un groupe de jeunes enseignants marocains, et plus particulièrement, celui de l’un des plus doués d’entre eux : le Professeur Rachid M’rabet. Un vibrant hommage lui a été rendu samedi 14 juin 2025 dans l’amphithéâtre de l’établissement par l’Association ISCAE Alumni présidé par l’ancien lauréat Mehdi Kabbaj pour l’ensemble de son œuvre, comme enseignant, directeur des études, directeur du cycle doctoral et directeur général de l’institution. Ambiance décontractée et conviviale. Visages détendus et souriants. Un jour de grande fête. De beaux souvenirs qui affluent. Et de retrouvailles aussi.
Ayant la force de la sincérité, aux antipodes du panégyrique de circonstance, les témoignages dégagent tous le respect et la reconnaissance, l’admiration et l’affection envers un homme qui a marqué l’histoire de l’ISCAE mais aussi les esprits de plusieurs cohortes d’étudiants marocains et africains qu’ils gonflaient à bloc dès le premier jour en leur lançant : « Vous êtes la crème de la crème.» Une phrase devenue culte chez les Iscaeistes que le président l’Association ISCAE Alumni a rappelée dans son mot d’hommage très tendre, suscitant une clameur enthousiaste dans l’assistance.
Le Pr Rachid Mrabet était, de l’avis de tous, bien plus qu’un remarquable enseignant. Il était pour eux un excellent mentor, un guide inspiré et inspirant, qui avait le don, sans pour autant sacrifier l’exigence requise, d’établir une relation positive empreinte de bienveillance avec les élèves et un excellent directeur, doté de de la vision stratégique et l’écoute active. Un homme qui sait motiver ses collaborateurs, mais ferme et intraitable sur les critères d’admission. Tous les parents, indépendamment de leur milieu social, rêvent de placer leur progéniture dans une école d’excellence après le baccalauréat.
Établissement public d’enseignement supérieur en management, l’ISCAE offre un meilleur choix. Comme les places sont limitées, certains n’hésitent pas à jouer de leurs appuis dans l’establishment pour faire admettre leurs enfants ou les proches de leurs connaissances sans passer par le concours d’accès. Pour le Pr Mrabet, qui tenait absolument à préserver le niveau de l’école pour qu’elle continue à s’acquitter convenablement de sa mission de fabrique de l’élite gestionnaire du pays, il fallait fermer à double tour la porte des coups de piston… Pour résister aux pressions, il s’est appuyé sur un homme auprès duquel il a dit avoir trouvé la protection nécessaire : Driss Jettou. « Je remercie Ssi Driss de m’avoir protégé », a confié Rachid M’rabet qui a reconnu lui avoir refilé bien « des patates chaudes ». Homme d’État distingué qui a marqué la gouvernance nationale par sa rigueur et son bon sens proverbial, l’ex-Premier ministre (2002-2007) et ministre du Commerce et de l’Industrie (entre 1993 et 1997 et à ce titre président du Conseil d’administration de l’ISCAE) était assis au premier rang, le visage ému, aux côtés d’autres figures publiques : l’ex-titulaire du portefeuille du Commerce et de l’Industrie Salaheddine Mezouar, l’ancien ministre des Privatisations et wali de Souss-Massa-Draa Rachid Filali, qui ont tous les deux suivi des cycles de formation à l’ISCAE et Moulay Driss Alaoui M’Daghri, qui a commencé sa carrière comme enseignant à l’ISCAE avant d’en présider les destinées de 1976 à 1983.
Il y a le professeur et l’homme. Le professeur qui donne dans l’humilité et sans compter le meilleur de lui-même et l’homme aux qualités humaines indéniables qui favorisent l’empathie, l’échange fructueux et la générosité. Chez Rachid M’rabet, les deux se confondent et c’est ce qui lui donne un surcroît de distinction dans le monde universitaire.
Lauréat de l’Université Paris-Dauphine, qui a travaillé sous la direction du célèbre Pierre Conso, professeur de finance d’entreprise, titulaire d’un doctorat d’Etat en Sciences de gestion en poche, Rachid Mrabet, qui a à son actif plusieurs ouvrages sur le management et la finance, n’est pas du genre à prendre sa retraite. Cet enseignant-chercheur de valeur s’est lancé récemment dans une nouvelle aventure éducative, l’Université internationale Averroès dont il assure la présidence. C’est à cela qu’on reconnait les passionnés. Ils ne raccrochent jamais. Ainsi va l’enfant prodige de Sidi Kacem. L’art d’enseigner et le désir de partager son savoir coulent dans ses veines. C’est l’air qu’il respire…