Ne pas avoir légué une littérature écrite ne signifie aucunement que les anciens peuples amazigh n’étaient pas civilisés, d’autant plus que l’on ignore les raison de cette absence de culture écrite. Était-ce volontaire ou bien dicté par l’occupant? Même questionnement pour d’autres peuples tels que les Gaulois. Quand on parle d’écriture, les Gaulois comme les amazigh sont loin d’être les premiers peuples auxquels on pense. «En effet, on entend régulièrement l’affirmation selon laquelle on sait peu de chose sur les Gaulois car ces derniers ne pratiquaient pas l’écriture. Mais cette affirmation est-elle réelle ? » (hystorasia.com).
Dans l’attente d’une réponse, «depuis les frontières marocaines avec l’Algérie jusqu’à Tanger, en passant par Nador, Berkane et Alhoceima, de jeunes auteurs écrivent en tarifit, langue amazighe». L’auteur Hassan Banhakeia se pose les mêmes questions : « Faut-il plaindre les Anciens nord-africains de ne pas avoir produit une littérature écrite (bien établie) dans leur expression ou de ne pas l’avoir préservée en cas d’existence réelle ? Ils possèdent, faut le dire, l’écriture ou l’alphabet requis (indispensable) pour une telle pratique, mais rien n’y est préservé dans ces temps troubles d’invasions durant lesquels brûler une culture relève d’un acte de triomphe sur l’Ennemi (vaincu)… Ils sauvegardent une belle et riche littérature orale, plus humaine, peut-être aussi plus vivante. Cela étant, plaignons-les plutôt de ne pas avoir créé une théocratie éternelle — source du sacré écrit — tremplin utile pour forger une littérature théologique en amazigh !»
Dans cet essai de 252 pages, publié en novembre 2019 chez l’Harmattan, le lecteur «découvre, dans les détails, la littérature rifaine dans ses deux grandes formes orale et écrite, depuis les premiers poèmes jusqu’à nos jours. On y trouve l’analyse de vieux distiques, du poème épique ‘Ddhar n Ubarran‘ et d’une centaine d’œuvres publiées. » «L’étude entend également avancer des questions autour de cette pratique minorée : la littérature rifaine n’est-elle qu’une sous-littérature amazighe ? Quelles sont ses spécificités ? Quels genres offre-t-elle aux lecteurs? Quelles catégories apporte-t-elle en plus à l’amazighité commune ? Enfin, peut-elle avoir une place valable dans les lettres marocaines et maghrébines ? » Hassan Banhakeia, enseignant-chercheur à la Faculté pluridisciplinaire de Nador, est auteur de nombreux essais sur la culture, la linguistique et la littérature. Il est également poète et romancier.