La Fondation Montresso accueille du 12 avril au 5 juillet 2025, à Marrakech le projet Décloisonnement de Sambou Diouf.
Investissant l’atelier comme un laboratoire, l’artiste sénégalais conduit son esprit en se laissant guider par les médiums et les procédés. Ni réflexion théorique, ni définition d’un discours, Sambou Diouf construit pas à pas son grand imagier, où ses figures hybrides mettent en lumière la continuité du vivant et les passages incessants de l’animalité à l’humanité. L’atelier, il le fréquente d’abord assidûment, dans une volonté d’apprentissage pendant plus de dix années auprès de son mentor Abdoulaye N’doye. Tardivement, il devient lauréat des Beaux-Arts de Dakar, l’atelier devient ensuite son lieu de vie, un endroit de mise en œuvre de sa propre pensée. Sous nos yeux, L’artiste bâtit une œuvre puissante, assemble paisiblement une sorte de puzzle pour appréhender la nature humaine. Ses sujets sont de drôles personnages anthropomorphes et primitifs, bizarres et familiers. Loin de la morale, son œuvre explore les méandres du Nous, scrute dans une étonnante fécondité les balancements les plus sensibles de notre société.

Sambou Diouf a un rapport cognitif au monde, qui renvoie à l’enfance, qui questionne le païen et le sacré. Il délivre une poésie métaphorique où ses sujets éprouvent l’équilibre instable de tensions, expérimentent la complexité des solidarités toujours prêtes à se défaire. En imitant les figures animales, on apprend à devenir homme, semble nous chuchoter l’artiste… Sambou Diouf dresse un alphabet de situation qui nous questionne pour mieux apprendre de nous-même. Jardin Rouge est aussi un autre atelier qu’il affectionne, les matériaux sont aussi multiples qu’insolites –emballages, papiers, plastiques…–, l’artiste utilise les moindres aspérités de ses supports pour insuffler sa matière. Sur des sortes de patrons de couture, le brou de noix, les pastels, les pigments naturels sont les outils qui donnent naissance à ses formes, pour être ensuite réassemblées. L’artiste nous offre de prodigieux palimpsestes où le regardeur ressent l’urgence de s’ouvrir à d’autres dehors. La chose n’est sans doute pas nouvelle, mais la comédie humaine décrite, délivre d’autres résonances, dévoile les mutations perceptives et cognitives d’un monde social mis à l’épreuve. Ni contes, ni fables, les œuvres de Sambou Diouf sont des voyages contemporains et populaires vers d’autres dialectes, d’autres traditions, où les corps physiques, sociaux et politiques interrogent ce que nous sommes, nous pensons et nous vivons.