Dispositif de prévention ou machine à cash ?

Faire revenir les radars à leur vocation préventive…

S’estimant injustement verbalisé pour une infraction d’excès de vitesse, un automobiliste a fait annuler par la justice un PV de police établi lors d’un contrôle par radar fixe. Une première dans les annales routières nationales. Explications.  

Au Maroc, les radars routiers servent  à piéger les automobilistes pour qu’ils passent à la caisse. A force de subir cette situation lors de leurs voyages, ils ont fini par s’y faire, payant sans moufter les amendes pour excès de vitesse.
L’usage ainsi fait de ces dispositifs de sécurité par la police et la gendarmerie représente à l’évidence un dévoiement de leur vocation première:  réduire le nombre des victimes des accidents de la circulation  qui reste élevé au Maroc ( près de 4000 morts chaque année,) malgré la multiplication des campagnes de sensibilisation initiées par  NARSA à coups de budgets colossaux.
Un jugement de justice  rendu  le 4 juillet 2023 par le tribunal de première instance de Larache a décrété l’annulation d’un PV de police relatif à une infraction routière détectée par radar et que le conducteur verbalisé a décidé de contester auprès de la justice. Cette plainte  constitue une première du genre et le jugement qui en a découlé une jurisprudence. Celle-ci puise sa force du code de la route  notamment  dans son aspect relatif aux radars routiers dont l’adoption vise «la prévention contre les accidents de la route provoqués par l’excès de vitesse» et non d’ faire «  un piège» tendu aux automobilistes pour « chasser » les infractions. S’estimant victime d’un traquenard visant à lui faire payer une amende pour  dépassement de vitesse, le conducteur  consigne  dans sa plainte  les faits tels  qu’ils se sont déroulés. Alors qu’il s’engageait  sur un double virage  sur une route menant à la plage de Larache, il est surpris, raconte-t-il, par un policier qui surgit soudainement de derrière un arbre, le bras levé, lui ordonnant de s’arrêter. Cette scène se produit souvent  sur les routes nationales notamment du monde rural et il n’est pas rare qu’un gendarme, à l’occasion d’un barrage de contrôle par radar, agisse de la sorte, au risque de mettre sa vie et celle des autres en danger du fait qu’il  accourt  brutalement en direction de la voiture lancée à grande vitesse qui peut le percuter. Cette façon de faire, se cacher derrière un arbre  ou un buisson, évoque plus l’embuscade qu’un contrôle routier dans les règles de l’art. Notre conducteur s’est fait verbaliser  par le policier pour dépassement de vitesse autorisé de 20 km   malgré sa contestation  verbale de la légalité de la procédure entachée de certaines irrégularités qu’il a dénoncées sur le champ et que la justice a confirmées dans son jugement.

Panneaux d’information

Le constat de l’infraction a été fait, ce qui est interdit par le code de la route,  dans un virage  et le début d’une pente, tout d’abord.  L’absence du panneau de signalisation d’un contrôle routier conformément à l’article 192 de ce même  code, ensuite.
Comme l’agent  verbalisateur  n’a pas respecté les dispositions du code de la route, la justice a décidé d’annuler le procès-verbal  jugé non règlementaire pour n’avoir pas été  aussi accompagné de la preuve matérielle de l’infraction supposée et de faire restituer  au plaignant le montant de la contravention payée.
L’article 192 du code la route est clair, stipulant que « le contrôle des véhicules sur route et autoroute doit être pré-signalé, de jour comme de nuit». Cette disposition sur laquelle le tribunal a insisté dans son arrêté est  très peu respectée dans les faits alors que le législateur a  stipulé    que ces panneaux d’information  doivent être  installés à une distance de 200 mètres pour les  points fixes permanents et 100 mètres pour les points fixes non permanents.
Les radars  fixes généralement annoncés  par des panneaux d’information bien visibles ( les radars mobiles, eux, ne sont pas signalés) ont démontré leur efficience sous d’autres cieux  puisqu’ils poussent les conducteurs à réduire leur vitesse, ce qui contribue au renforcement de la sécurité routière. Tel n’est pas  le  cas véritablement  au Maroc où les radars  tels qu’ils sont utilisés servent surtout à générer des recettes pour les caisses de l’État. Machines à flash, machines à cash?  

Radar pédagogique

L’agence nationale de la sécurité routière ( NARSA),  dont l’action ne rejaillit pas véritablement sur l’amélioration  de la sécurité sur les routes nationales qui continuent à provoquer de véritables hécatombes,  serait mieux inspirée d’intégrer  le radar pédagogique dans sa stratégie. Il s’agit d’un panneau lumineux qui affiche instantanément la vitesse à laquelle circule un usager de la route. Celle-ci peut être accompagnée d’un court message de rétroaction visant à encourager les automobilistes  à ralentir lorsque la vitesse réglementaire est dépassée.Le radar pédagogique sert à sensibiliser les usagers de la route à l’adoption d’un comportement sécuritaire et ne peut pas servir à sanctionner une infraction au Code de la sécurité routière. En somme, le radar pédagogique constitue une bonne méthode  pour sensibiliser les usagers de la route à l’importance de ralentir dans une zone qui présente des problématiques de sécurité routière liées à la vitesse pratiquée.  Sous d’autres cieux comme la France et  le Canada, cet outil a contribué à la réduction des accidents de la route.

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