Les derniers boniments de Moulay Hafid

Les coups d’esbroufe récurrents du ministre de l’Industrie sur le Made in Morocco dans le domaine médical commencent à inquiéter. Le ministre-businessman est devenu un cas grave qui a besoin d’être soigné d’urgence…

Moulahom Hafid est bien parti pour décrocher la palme top covid du bluff 2020. Enfilant le costume de défenseur acharné du «produire local», le ministre qui n’a pas peur de se démasquer continue sur sa lancée mensongère en multipliant les sorties médiatiques spectaculaires. Un jour, il soutient que le pays fabrique des masques anti-covid qui après vérification ne sont que des bavettes de haute sous-qualité qui ne servent qu’à vous protéger contre une éventuelle amende. Un autre jour, il annonce que le Maroc commence à fabriquer des respirateurs artificiels 100% marocains que le ministère de la Santé refuse d’homologuer pour non conformité aux normes sanitaires en vigueur.

Un refus que Moulay Hafid tente de faire passer auprès de certains médias acquis à sa cause pour de l’obstruction. Ce qui ajoute au doute et au trouble, c’est l’absence omniprésente du ministre concerné en premier lieu par ces réalisations, en l’occurrence celui de la Santé, des mises en scène médiatiques du ministre-businessman. Celles-ci, devenues chroniques, commencent à agacer certains et à faire rire sous cape d’autres. Le dernier boniment en date n’est pas moins succulent. Devant les caméras de certains sites électroniques, on le voit faire le tour d’un lit de réanimation qu’il présente comme une innovation purement marocaine censée représenter une alternative aux lits d’importation. «Hourra, le lit de réanimation du cru est en plus très compétitif, 20.000 DH contre 80.000 DH pour celui fabriqué ailleurs », s’extasie en substance le ministre dont les services ont rendu public un communiqué où il est indiqué que le groupement d’entreprises qui ont conçu ce modèle a été « mobilisé » par le ministère de l’Industrie, du Commerce, de l’Économie Verte et du Numérique.

Merci Moulahom le mobilisateur, autoproclamé fervent défenseur de la préférence nationale ! On aurait bien aimé saluer cette prouesse, la fêter avec un concert d’applaudissements et de youyous sauf que le lit en question n’est que le fruit d’un assemblage des composantes nécessaires qui, elles, sont fabriquées à l’étranger. Notre ministre industrieux, qui doit aussi savoir que les kits de dépistage de MAScIR relèvent, contrairement aux affirmations de leurs concepteurs, moins d’une technicité 100% marocaine que d’un travail de montage, s’est permis quelques petits arrangements avec la vérité. Le prototype du lit de réanimation en question n’est pas une première marocaine comme l’a affirmé l’ex-patron de Saham. Loin de là. Une société 100 marocaine du nom de MediCastor, spécialisée dans le mobilier médical et hospitalier, équipe les hôpitaux, les cliniques et les laboratoires du pays de tous les dispositifs nécessaires  qui vont des lits d’hospitalisation aux lits de réanimation (mécanique, hydraulique ou électronique) en passant par les berceaux pour nouveau-né et les lits enfant en métal…

Assemblage

Mieux, MediCastor, forte d’une gamme de produits riche et diversifiée, fait de l’export depuis 18 ans. Faire l’impasse sur cette entreprise et ses réalisations dans le domaine médical permet à Moulahom de s’ériger en premier ministre de l’Industrie à encourager le produire local dans le secteur médical. Autrement dit, avant son avènement et celui du coronavirus il n’y avait rien. Le désert de Gobi… Le lit de réanimation moulahomien n’est pas la seule histoire à dormir debout. Écoutez Hafid, le magnifique, raconter encore des sornettes : « La semaine dernière (du 14/9 : NDLR], lors d’une visite en France, j’ai découvert que le fameux test à la salive présenté en France était fabriqué à Tanger. C’est dire la capacité de fabrication des ressources humaines africaines marocaines».

Alléluia! Notre ministre citoyen, qui dort très peu pour que le pays fabrique ses propres lits de réanimation et que les tests salivaires font baver, est revenu sur le sujet le mardi 22 septembre, lors du Conseil national de l’entreprise. En citant les produits fabriqués localement pendant la crise sanitaire, Moulahom a bavé de fierté en évoquant le kit salivaire : « Le test PCR que vous voyez à la télévision, pour la salive, à l’étranger, est-ce que vous savez que c’est un test qui est fabriqué au Maroc, à Tanger, dans l’usine Tronico Atlas ? Ce test de salive est réalisé au Maroc. » Vérification faite : fake news. En réalité, l’usine tangéroise citée par Moulahom ne fabrique que les boîtiers qui permettent de chauffer la salive pour effectuer le test. Cela jette un tel froid qu’on en reste bouche bée…

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