Faut-il croire Mohamed Boudrika lorsqu’il évoque dans l’enthousiasme de son retour à la tête du Raja l’accueil royal dont il avait bénéficié lui et les joueurs du club après leur qualification à la finale du Mondial des clubs ? Décryptage…
Sans surprise, Mohamed Boudrika a repris les commandes du Raja à l’issue d’une assemblée générale extraordinaire organisée vendredi 26 mai à Casablanca. Sans témoins médiatiques. Sur 169 voix, le successeur de Aziz El Badraoui qui a jeté l’éponge en raison de son incapacité à redresser un club profondément en crise, a récolté 117 contre 45 pour son rival Saïd Hasbane, celui-là même qui lui avait succédé en 2016 lorsqu’il avait quitté le club presque à la manière d’un fuyard avec un trou de plusieurs milliards dans les caisses.
Mais Faut-il croire le revenant rajaoui lorsqu’il remet sur le tapis dans l’enthousiasme de son retour peu triomphal l’accueil royal avec décoration dont il avait bénéficié lui et les joueurs du Raja après la qualification du club à la finale du Mondial des clubs ? L’événement remonte à 2013 et les Verts entreront trois ans plus tard dans une valse de présidents sur fond d’une gestion chaotique impactant sa performance au fil des saisons. Fort de cette belle réalisation sanctionnée en plus par une audience royale, M, Boudrika aurait dû normalement se représenter pour décrocher un second mandat. Tel n’a pas été son choix, préférant laisser dans des conditions peu claires son fauteuil de président à M. Hasbane…
Alors pourquoi Mohamed Boudrika a-t-il tenu à reprendre la présidence du Raja 7 ans après son départ précipité ? Qu’est-ce ce qui a changé pour qu’il éprouve de nouveau le besoin impérieux de déclarer sa flamme pour la chefferie du Raja et les rajaouis ? Pour l’intéressé, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts : Il s’est lancé entre-temps en politique devenant sous la bannière du RNI député et président de commune (circonscription de Mers Sultan) grâce à la popularité acquise auprès de la population rajaouie.
Le football, c’est connu, est un excellent tremplin pour accéder aux mandats électifs. Mais aussi pour protéger ses petits intérêts. Et Boudrika en a dans le secteur de l’immobilier où il s’est construit une réputation peu flatteuse qui lui a valu un certain nombre de poursuites judiciaires inconnues du grand public. Savez-vous que cet homme d’affaires ou plutôt à affaires a été condamné à 4 ans de prison avec sursis et une lourde amende dans un dossier d’escroquerie jugé en décembre 2022 par le tribunal de première instance de Casablanca ? Les plaintes au nombre de trois émanent d’un notaire du nom de Jalal Naji pour émission par Mohamed Boudrika en sa qualité de patron de BM Matco d’une série chèques sans provisions, issues de grandes banques de la place d’un montant total de d’environ 12 millions de DH. Dans sa déposition devant la PJ de l’arrondissement de Ain Chock, le promoteur immobilier n’a pas cherché à nier les faits, reconnaissant avoir effectivement émis au profit du plaignant les 5 chèques totalisant la somme en question. Sauf qu’il a livré aux enquêteurs une version tirée par les cheveux selon laquelle il les a remis au notaire en tant que chèques de garantie (Boudrika ignore-t-il la loi, ne savait-il pas que cette pratique est passible d’un à cinq de prison ?) contre, tenez-vous bien, un prêt usuraire dont il n’a pas révélé le taux aux policiers. Notre grand Boudrika a donc traité avec Me Naji dont selon ses dires, il avait fait connaissance en 2017 non pas tant que notaire mais en sa qualité de prêteur usurier.
Talents cachés
Et Boudrika, qui joue sans rougir les victimes et les âmes vertueuses, de se surpasser en racontant qu’il a remboursé sur une certaine période son prêt usurier jusqu’au dernier centime et que son créancier a gardé les chèques chez lui en les utilisant comme un moyen pour lui soutirer plus d’argent alors qu’il a fini de régler sa dette. Comment ? Par des chèques et des transferts d’argent via un autre notaire et le reliquat du prêt sous forme d’argent cash remis de main à main à la secrétaire et au chauffeur du plaignant. Malgré ces parties de cache-cash, le notaire usurier a continué à séquestrer ses chèques de garantie.
Franchement, quel beau conte, quel magnifique scénario ! Le Boudrika, qui pensait pouvoir dribbler tout le monde, a des talents cachés en béton dont il peut faire profiter le cinéma national. Après le prononcé du jugement, l’inculpé a poussé l’effronterie jusqu’à affirmer sur son compte Facebook (voir fac-similé) que lui, Mohamed Boudrika, « n’a aucune relation avec l’entreprise en question » [BM Matco], qu’il s’agissait d’une erreur qui sera corrigée et «qu’il ne fallait pas crier victoire puisqu’il n’a rien à rien se reprocher » ! Un vrai parle-ment-aire. Il faut être Boudrika pour nier avec autant d’aplomb un fait judiciaire avéré le concernant lui et pas un autre. Sans l’ombre d’un doute.
Évoluant dans le secteur du cash par excellence du fait de la pratique du noir, Mohamed Boudrika est réputé plein aux as. Comment se fait-il qu’il a eu recours à l’usure pour avoir de l’argent ? C’est cette foutue crise sanitaire provoquée par le Covid qui lui a causé un immense passage à vide… Pauvre Boudrika !
Visiblement, ce dernier, mis en cause dans l’affaire juteuse du trafic des billets du Mondial du Qatar, n’est pas aussi friqué qu’il le laisse croire… Affiche-t-il juste une richesse de façade trompeuse et serait plutôt du genre à vivre avec l’argent des autres ? Les Rajaouis, qui comptent sur lui pour renflouer avec son propre pognon les caisses vides du club, doivent se méfier. Avec toutes les tribulations qui sont les siennes, Boudrika a raison de se cacher derrière la présidence d’un grand club de football. Ça lui permet de jouer à quitte ou double et de se jouer des autres.