L’honneur et les honoraires

Une équipe du canard a interrogé le ministre de la Justice et patron du PAM  Abdellatif Ouahbi sur la dernière reculade gouvernementale au sujet de la retenue fiscale à la source des avocats.

Vous vous êtes finalement déjugé puisque les avocats ont fini par obtenir gain de cause sur leur revendication de suppression de retenue fiscale à la source…

C’est normal qu’ils fassent reculer le gouvernement. Ils savent se défendre puisque c’est leur métier. Les avocats  dont je fais partie sont de grandes gueules qui crient plus que les autres citoyens. Et celui qui vocifère le plus et montre sa capacité de blocage du pays gagne naturellement.

Malgré la reculade gouvernementale, les avocats ont continué à manifester leur mécontentement, allant juqu’á faire grève…

Mes ex-collègues détestent l’impôt. C’est une idée fisc chez eux. Ils veulent continuer à payer ce qu’ils veulent et se payer la tête du monde, quitte à crier jusqu’à se déchirer  les cordes vocales.

Celui qui sait élever la voix  dans ce pays et sort la carte du chantage obtient donc gain de cause ?

C’est la règle malheureusement. Côté fiscalité, les retenues  de la ressource ne fonctionnent qu’avec les catégories des citoyens dociles qui n’ont aucune carte de pression à agiter. Résultat : Ils se font tondre comme des moutons; sans réagir.

Et l’équité fiscale ?

L’équité fiscale c’est un joli concept qui n’existe que dans les discours. C’est une belle chimère. Certains sont plus égaux que  d’autres.

Cette situation vous scandalise-t-elle ?

Comme je suis un homme qui aime rigoler et prendre les choses à la légère, disons que cette affaire m’amuse. Cela ne sert à rien de dramatiser.  Les Marocains ont déjà oublié cet épisode, effacé par  d’autres ratages politiques  qui  vont tomber en cascade. Devenus monnaie courante,  ils n’étonnent plus ni émeuvent  grand-monde.    

Le football est un  excellent moyen pour faire diversion et détourner de l’essentiel, n’est-ce pas ?  

Il y a le foot, la coupe du monde du Qatar est pour bientôt, les réseaux sociaux et leur contenu de plus en plus caniveau. Sans oublier ces grands artistes de la chanson jeune à l’image du rappeur Toto El Grande dont la vulgarité et les insanités  parlent à une grande partie de la jeunesse marocaine. Ce Toto dont j’ai défendu l’invitation par le ministre de la Culture est un chanteur de valeur qui mérite d’être défendu par tous les avocats du pays.

Y compris vous ?  

J’aurais pris volontiers son dossier avec retenue à la source si je n’étais pas ministre de la Justice. Toto El Grande est un excellent exemple à suivre. Il incarne ce Maroc libre et étourdi,  qui  dit n’importe quoi sans complexes, et qui connaît la chanson.

Les avocats ne vous portent pas dans leur cœur?

Moi non plus. C’est une race à part, obtus et ingérable  dont je connais parfaitement les micmacs. Heureusement que la ministrabilité dont je goûte aux plaisirs au quotidien m’a éloigné des robes noires qui dès que je les ai coincés commencent à voir rouge.

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