La mafia des intermédiaires…

La vie de plus en plus chère, qui contribue à l’érosion du pouvoir d’achat de la population, est provoquée en grande partie par la multiplicité des intermédiaires. Et si, comme solution à ce phénomène préjudiciable aussi bien aux intérêts du producteur que du consommateur, le Maroc essayait la solution des circuits courts? Le Maroc est confronté depuis quelques semaines à une nouvelle flambée du prix de certaines denrées alimentaires qui mettent le feu au panier de la ménagère au-delà du supportable. Ce renchérissement ne trouve pas seulement son origine dans l’envolée des prix des matières premières agricoles et énergétiques provoquée par la rupture des chaînes d’approvisionnement en raison de la crise sanitaire et aggravée par la guerre de Poutine contre l’Ukraine. Au Maroc, un autre facteur et non des moindres, contribue souvent au renchérissement des denrées alimentaires de grande consommation : la multiplicité des intermédiaires qui se font des marges phénoménales sur le dos des producteurs. Plus grave encore est la passivité chronique des pouvoirs publics face à un fléau qui  alimente la grogne sociale du fait de la vie de plus en plus chère pour le citoyen lambda pour qui, entre flambée des prix de l’huile de table, des légumes et autres féculents, la pitance journalière de base est devenue hors de portée.

La vie de plus en plus chère, qui contribue à l’érosion du pouvoir d’achat de la population, est provoquée en grande partie par la multiplicité des intermédiaires. Et si, comme solution à ce phénomène préjudiciable aussi bien aux intérêts du producteur que du consommateur, le Maroc essayait la solution des circuits courts ?

Certes, le quotidien d’une large frange de la population pour laquelle 10 centimes de plus dans un produit essentiel est une grosse peine aurait été plus lourd à supporter si le gouvernement Akhannouch n’avait pas suspendu dès le mois d’octobre 2021 les droits d’importation sur le blé dur et tendre, et alloué des compensations supplémentaires aux importateurs afin de soutenir les prix de tous les dérivés du blé au niveau national (tarifs du blé, qui d’habitude ne dépassent pas 240 dollars la tonne, ont grimpé à 300 dollars  en  juin 2021 pour culminer à plus de 720 dollars actuellement).  Sans cette mesure salutaire de soutien des prix, les Marocains auraient acheté plus cher leur pain qui tient une place prépondérante dans le mode alimentaire national. Mais est-ce une fatalité de subir en permanence dans ce pays la loi des intermédiaires, désignés par la vox populi par les « Chennakas », en référence à ces revendeurs ruraux qui dans les souks aux ovins tiennent les moutons par la gorge? N’existe-il pas de solution à mettre en œuvre pour réduire le nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur ? Évidemment que si.

La meilleure réponse aux « Chennakas » qui mettent le feu au marché est offerte par les circuits courts, définis comme « un mode de commercialisation des produits agricoles qui s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte à condition qu’il n’y ait qu’un seul intermédiaire ». Ce dispositif qui a fait ses preuves sous d’autres cieux peut parfaitement émerger dans le contexte national. Un tel mécanisme gagnant-gagnant car bâti sur une relation transparente entre le vendeur et l’acheteur, n’a que des avantages : il permet d’un côté au producteur agricole ou avicole de vendre sa marchandise au juste prix et au consommateur de s’approvisionner à des tarifs raisonnables, de l’autre.

En attendant le sursaut, force est de constater que le système agricole marocain ne protège pas assez les petits producteurs dont les rapports de force ne sont pas en leur faveur sur des « marchés parallèles » et des « filières non organisées »  qui profitent in fine à la mafia des intermédiaires. Le fait de ne pas pouvoir se positionner au mieux de leurs intérêts sur les marchés, petits agriculteurs et éleveurs, freine quelque part les dynamiques locales de développement rural et annihile en quelque sorte les efforts considérables déployés par les pouvoirs publics pour améliorer les conditions de vie du Maroc des campagnes. Résultat : Ce dernier est livré constamment à la mafia des intermédiaires et autres spéculateurs dont le seul investissement est le téléphone qui leur permet d’effectuer des opérations d’achat et de vente juteuses au détriment du dur labeur du petit fellah. Tout compte fait, ce sont eux, ces intermédiaires et leurs réseaux, les vrais profiteurs du laxisme ambiant qui les encouragent à faire saigner autant les paysans que les consommateurs en s’enrichissant à leurs dépens. Cette situation est d’autant plus injuste qu’ils n’apporte aucune valeur ajoutée sur la chaîne de commercialisation qu’ils ne font que perturber alors qu’ils ne font travailler personne et ne paient ni impôts ni taxes. Une rente scandaleuse de plus qu’il faut démanteler.

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