La nomination de Hassan Boubrik le 11 février à la tête de la CNSS marque le début de la mise en musique du projet de loi-cadre sur la protection sociale adopté en conseil des ministres. « Ce projet de loi-cadre se veut la pierre angulaire et le cadre référentiel pour la mise en œuvre de la vision royale perspicace dans le domaine de la protection sociale », a expliqué un communiqué du cabinet royal rendu public à l’occasion, qui a assimilé ce texte à une révolution sociale que le souverain avait annoncé dans son discours du Trône du 29 juillet 2020. « Le moment est venu de lancer, au cours des cinq prochaines années, le processus de généralisation de la couverture sociale au profit de tous les Marocains, avait-il indiqué en ajoutant que « ce projet requiert une réforme rigoureuse des systèmes et programmes sociaux. »
Généralisation de l’assurance-maladie obligatoire, des allocations familiales et de l’indemnité pour perte d’emploi ; protection contre les dangers de la maladie et l’abandon scolaire et versement d’une pension à l’ensemble des retraités. Chantier ambitieux s’il en est, qui fait appel au principe de solidarité « dans ses dimensions sociales, territoriales, intergénérationnelles et interprofessionnelles» et dont il s’agit d’opérationnaliser les dispositions dans l’anticipation et la rigueur nécessaires. L’objectif étant de protéger les couches les plus vulnérables dont la crise sanitaire a révélé au grand jour l’ampleur de la détresse et du dénuement. Au Maroc, il est fréquent que des retraités se retrouvent avec une pension de misère après plusieurs années de labeur. Sans oublier ces milliers de familles sans ressources qui ont des enfants à charge, qui cèdent à l’abandon scolaire ou basculent dans la délinquance faute de pouvoir prendre en charge leurs besoins qui sont souvent des droits : droit à la scolarité, à un logement décent et à une alimentation saine. L’institutionnalisation de la solidarité nationale sur des bases solides suppose une bonne gouvernance qui hélas fait défaut à en juger par l’empilement dans la plus grande des déresponsabilisations et des déperditions les agences et les instances dédiées au social alors qu’il aurait été judicieux de les regrouper sous l’autorité d’une entité unique.
Il s’agit aujourd’hui d’imaginer de nouveaux mécanismes en vue d’améliorer l’efficience hospitalière qui laisse beaucoup à désirer pour des raisons liées à la mauvaise gestion, au sous-encadrement humain et à l’absence de motivation du personnel soignant.
Dans son discours du Trône du 29 juillet 2018, S.M le Roi Mohammed VI avait appelé le gouvernement à plancher sur la mise en place du «Registre Social Unique » (RSU), un outil d’enregistrement des familles nécessiteuses – qui tarde curieusement à voir le jour – histoire « d’induire un accroissement progressif du rendement des programmes sociaux, à court et à moyen terme». Il n’est pas en effet normal comme le souverain en a fait le reproche de manière claire et directe « que plus de cent programmes de soutien et de protection sociale, de différents formats et se voyant affecter des dizaines de milliards de dirhams, soient éparpillés entre plusieurs départements ministériels et de multiples intervenants publics ». La multiplicité des acteurs pour un seul programme et l’absence de coordination entre ces derniers représentent à coup sûr l’une des principales sources des mille et un dysfonctionnements qui minent la gouvernance dans ce pays. Une situation hautement préjudiciable, coûteuse en temps, en énergie et en deniers publics, qui engendre en plus un autre mal non moins terrible : la dilution des responsabilités du fait de leur imbrication.
«Pourtant, j’ai le sentiment que quelque chose continue à nous faire défaut en matière sociale », avait ajouté avec sa perspicacité habituelle le chef de l’État dans son discours. Ce « quelque chose» qui manquait, le souverain vient d’y remédier avec la mise en place du projet de loi-cadre sur la protection sociale qui englobe aussi un volet non moins essentiel : la santé des plus fragiles. Au-delà de la décision d’intégrer les ramédistes dans le régime de l’AMO pour permettre un accès aux soins pour tous, le grand défi porte sans conteste sur une réforme en profondeur des systèmes de santé publique qui pâtissent de manière chronique d’un certain nombre de maux plusieurs fois diagnostiqués. Il s’agit aujourd’hui d’imaginer de nouveaux mécanismes en vue d’améliorer l’efficience hospitalière qui laisse beaucoup à désirer pour des raisons liées à la mauvaise gestion, au sous-encadrement humain et à l’absence de motivation du personnel soignant. L’une des pistes à cet égard serait la mise en place d’un partenariat public-privé dont il convient de tracer les contours et les champs de collaboration avec les moyens à allouer et les objectifs à atteindre. L’efficacité sanitaire qui fait jusqu’ici défaut dans les hôpitaux est à ce prix.