Fermetures des écoles, des restaurants, des cafés… Puis l’instauration d’un confinement général. La vie s’arrête brutalement. Si certains se sont réjouis du télétravail, d’autres ont exprimé une fière colère face au confinement. Cet enfermement a-t-il des conséquences sur la santé psychique et psychologique de la population ? Explications du Docteur Imane Kendili, psychiatre addictologue et vice-présidente du Centre africain de recherche en santé (CARES) répond à nos questions.
-Le Canard Libéré : Pourquoi les gens ont-ils du mal à rester confinés chez eux ? Qu’est-ce qui fait réellement peur ?
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Dr Imane Kendili : D’habitude, rester chez soi pour se reposer ou vaquer à certaines occupations relève d’un choix personnel, tandis que le confinement répond à une obligation nationale décidée pour se protéger collectivement d’un mal mortel. Cette situation exceptionnelle n’est agréable, l’être humain étant par essence libre et porté vers la mobilité, qu’elle soit physique ou sociale. Plus de 4 milliards d’humains se sont retrouver en quelque sorte enfermés chez eux entre quatre non pas pas pour fuir la routine du quotidien mais pour éviter d’être contaminés par el coronavirus et le propager plus.
Q : C’est surtout dur à vivre pour des peuples démonstratifs comme le marocain qui aiment s’embrasser, se toucher et se donner l’accolade ?
R : Absolument. Ces gestes sont bannis aujourd’hui, accusés de favoriser la propagation du virus. Désormais, le mot d’ordre c’est la distanciation sociale et les gestes-barrières.
Q : Certes, le confinement permet de se protéger et de protéger les autres. Mais quels sont les effets négatifs de cet enfermement sur la santé psychologique surtout s’il dure dans le temps plus que de raison ? Comment ne pas choper dans certains vices, Style alcool, cigarettes ou autre ?
R : Toute la difficulté est là car toutes les formes d’addiction ou de plaisir immédiat font surgir la peur de l’Autre avec un grand A… Le sucre et le gras avec le grignotage et la récompense affective de la nourriture sont ressentis rapidement ; on a peur de manquer du « sein maternel » premier, une régression au stade oral et on se rue sur les denrées alimentaires.
Les personnes ayant déjà un souci de consommation de tabac ou encore de cannabis ou d’alcool risquent d’entrer dans une sorte de sevrage forcé à l’aveugle pour certains (les fumeurs étant plus à risque que les non fumeurs) ou au contraire augmenter leur consommation. La livraison d’alcool à domicile n’aidant pas en ces temps anxiogènes et pouvant générer de nouveaux maux qui se ressentiront après le confinement.
Q : Quel est l’impact du manque de contact avec l’extérieur et les proches ?
La solitude, le vide, l’angoisse.
Si les plus résilients stressent les plus fragiles ressentent plus de crises d’angoisse, de problèmes d’insomnie, d’irritabilité, d’impulsivité…ou de décompensation psychiatrique également /théories du complot/paranoïa/déni/dépression… Le stress est susceptible de provoquer l’explosion des états de stress post traumatiques dans les 6 mois à venir.
Q : Comment gérer le stress dû au confinement ?
Se réfugier dans les bonnes choses musique, l’écriture, la lecture, le dessin, la cuisine, la peinture ou la pâtisserie Sans oublier l’activité physique qui fat éviter la prise de poids préjudiciable évidemment à la santé.
Q : Les gens peuvent-ils devenir dépressifs suite au confinement ? Ou faut-il déjà avoir des prédispositions à la dépression ?
-Les affects anxieux et dépressifs peuvent apparaître de nouveau sans avoir d’antécédents … C’est une sorte de situation de guerre sanitaire cette fois. Mais le postulat de base est le même : « on a peur pour sa vie » et on s’enferme. L’angoisse est d’autant plus grande que l’ennemi est invisible… Il est dans l’air.
Q : Comment gérer le flot impétueux des informations que l’on reçoit chaque jour ?
R : Nous n’avons pas besoin d’être connectés tout le temps sur les médias ou les réseau sociaux pour connaître tout sur le coronavirus au jour le jour. Entre intox ) jet continu et informations terrifiantes, cette démarche est même dangereuse, pouvant induire une fragilisation de l’état mental et générer une somotisation. Ce n’est la peine d’être à l’affût de nouvelles supplémentaires sur le virus au risque aussi de transmettre cette toxicité à nos enfants. Il faut prendre une bonne distance par rapport à cette actualité angoissante surtout que nous savons déjà tout ce qu’il faut savoir sur cette maladie.