Fait-il bon vivre à Benslimane ? Oui, tant que l’on est loin du club de tir ! En effet, la province paisible, située à mi-chemin entre Casablanca et Rabat, n’est plus ce qu’elle était. L’implantation de l’« ATIS-Club de Tir Grenadine » fait beaucoup de bruit aussi bien sur le plan environnemental que social.
Depuis plusieurs mois, un bras de fer est engagé entre les propriétaires du club « ATIS-Club de Tir Grenadine » de Benslimane et les riverains. Agacés par les nuisances sonores provoquées par tirs aux plateaux, qui sont un exercice d’adresse, ces derniers ont décidé de se mobiliser pour mettre fin à ce qu’ils qualifient de calvaire quotidien. Victime de ce désagrément, Nadia Berrouaiel a fait le choix de mener le combat au nom des riverains en sensibilisant les autorités à leur problème. « C’est vraiment désagréable comme situation. Les tirs, je les entends quand je suis à l’extérieur et même quand les fenêtres sont fermées », dénonce un habitant d’un douar avoisinant. « J’ai choisi de vivre dans cette zone pour son calme et là c’est devenu invivable », renchérit un autre voisin. Il ajoute, une pointe de colère dans la voix : « Il est difficilement acceptable de subir ces déflagrations en continu dans un cadre de verdure comme le nôtre ». Effectivement, cette activité engendre beaucoup de vacarme. Preuve en est que les tireurs sont obligés de porter des protections auditives. Très fréquenté par les amateurs de ce sport particulier, le club a gagné en notoriété ces dernières années avec l’organisation de plusieurs événements d’envergure. En s’y rendant pour les tirs aux plateaux, les adeptes de cette discipline olympique sont loin d’imaginer le préjudice que leur passe-temps occasionne aux habitants alentours. En plus d’insupportables bruits de tirs audibles dans un rayon de près de 2 km, ces derniers se sont retrouvés à gérer des terrains agricoles dégueulassés par le plomb. Ce qui constitue aux yeux de Mme Berrouaiel une atteinte à l’environnement et une agression contre la nature.
Pollution sonore et environnementale
Les maisons se trouvant à proximité du club, deux douars en particulier, passent leurs journées et une bonne partie de leurs soirées à compter les balles. A chaque fois qu’un tireur appuie sur la détente, la résonance s’entend à un rayon de deux kilomètres, rendant ainsi invivable cette partie de la ville. Mme Nadia Berrouaiel, soutenue par les habitants et par l’Association Marocaine pour la réforme et l’équité, s’est mobilisée pour trouver une solution équitable à une situation jugée « infernale ». « Il y a pire que la pollution sonore, c’est la pollution de l’environnement » a déclaré la militante au «Canard Libéré». Preuves à l’appui, Mme Berrouaiel soutient que les terrains agricoles à proximité du club sont intoxiqués par le plomb qui traverse facilement le filet en plastique mis en place. La déflagration engendrée par les tirs se fait au-dessus des terrains agricoles voisins. « La quantité de plomb engendrée rend ces terrains inexploitables », souligne-t-elle en pointant le danger que représente cette substance pour la santé des riverains et les récoltes. Et ce n’est pas tout, la militante crie également à la catastrophe écologique devant « le mutisme » des autorités. « Oued Sefrou et Oued N’fifikh, sont menacés par une véritable catastrophe écologique », croit-elle savoir. D’où son appel lancé aux responsables pour diligenter une commission d’enquête afin de connaître l’ampleur des dégâts.
Négligence des mesures de sécurité
Tous ces désagréments et bien d’autres auraient pu être évités si le club avait respecté le cahier des charges imposé par la fédération royale marocaine de tir sportif (FRMTS). Selon Mme Berrouaiel, les lois en vigueur et les conditions nécessaires à l’implantation d’un club de tir n’ont pas été respectées. « Le cahier des charges de la fédération impose une superficie de 5 hectares pour ce genre d’installations alors que le propriétaire a installé son business sur un terrain de 4 ha seulement », fait savoir la militante qui brandit le certificat de propriété du club pour étayer ses dires. Les conditions basiques de sécurité ne sont pas respectées non plus, estime notre interlocutrice. « La distance de sécurité imposée est de 300 m alors qu’il est à peine de 76 m, et le mur de clôture de 12 m de hauteur au minimum n’a même pas été construit. Un filet en plastique vert a été installé à la place, que les balles transpercent pour atterrir sur les terrains agricoles voisins », dénonce la militante en présentant des images satellites du club tendant à corroborer ses accusations. Du côté des responsables d’« ATIS-Club de Tir Grenadine », silence radio, puisque nos tentatives de joindre le gérant du club sont restées vaines. Toutefois, l’homme avait déjà fait une déclaration à la presse dans laquelle il assure que son club détient toutes les autorisations nécessaires pour l’exercice de ses activités. Balayant d’un revers de main les accusations visant son club, le responsable avait affirmé que l’organisation, par le club, de grands événements est la preuve qu’il respecte toutes les dispositions et les règles en vigueur.