Loi organique sur le droit de grève : Pourquoi les syndicats sont contre…


A travers son projet de loi organique relatif à la grève qui a passé le cap de la première Chambre, le gouvernement cherche à encadrer le droit de grève qu’il juge souvent utilisé à mauvais escient. Les syndicats ne l’entendent pas de cette oreille, qui crient à une volonté de tuer la liberté syndicale. Décryptage.

Laila Lamrani

Younes Sekkouri a vite crié victoire sur l’épineux dossier de la réforme du droit de grève, ce vieux serpent de mer syndical posé sur la table des gouvernements précédents, sans que les partenaires sociaux parviennent à un compromis. Politiquement et socialement délicat. Le projet de loi organique que le ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, a cru avoir bien emballé et prêt à être  »vendu » après son adoption par la première Chambre avant la fin de l’année n’a pas trouvé grâce aux yeux des principales centrales syndicales. Ces dernières, emmenées par l’UMT, exigent du gouvernement de revoir sa copie actuellement en discussion en commission à la deuxième Chambre.

Le patron de l’UMT El Miloudi Mokharik et ses collègues reprochent à cette réforme une volonté à peine voilée de restreindre le droit de grève, via une série de conditions comme l’obtention de 50% de signatures des salariés pour lancer un mot d’ordre de grève. Les grévistes qui agissent en dehors des nouvelles règles sont également passibles de lourdes sanctions financières qui en cas de non-paiement peuvent leur valoir la contrainte par corps. Bonjour Oukacha. «Pour nous, c’est une question de vie ou de mort», nous confie un délégué syndical qui a dit son inquiétude face a ce qu’il qualifie de “manœuvres gouvernementales visant à tuer les droits des travailleurs“.

Pour marquer son désaccord. l’UMT a boycotté une réunion organisée par Younes Sekkouri le 8 janvier avec des représentants syndicaux et la CGEM. Sans aller jusqu’à réclamer un retrait de ce projet controversé, l’UMT veut amener l’exécutif à négocier un “package“ où la liberté syndicale et le droit de grève ne sont pas restreints, explique une source syndicale. « On ne peut pas édicter des lois contraires à la Constitution qui stipule clairement que le droit de grève demeure garanti», indique un dirigeant d’une fédération sectorielle qui rappelle la nécessité d’abroger l’article 288 du code pénal. Considéré par les syndicats comme une épée de Damoclès sur la tête des employés, celui-ci stipule qu’« est puni de l’emprisonnement d’un mois à deux ans et d’une amende de 120 à 5 000 dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement, quiconque, à l’aide de violences, voies de fait, menaces ou manœuvres frauduleuses, a amené ou maintenu, tenté d’amener ou de maintenir, une cessation concertée du travail.»

Notre interlocuteur pointe par ailleurs ce qu’il estime être une contradiction gouvernementale, à savoir le refus jusqu’ici du Maroc de ratifier la convention 87 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) qui protège les droits des représentants syndicaux et la liberté syndicale.

Retour donc à la case départ pour le gouvernement que les centrales syndicales, notamment l’UMT et la CDT, accusent d’avoir fait un passage en force sans concertation. M. Sekkouri n’est pas encore au bout de ses peines; il doit accepter pour calmer les ardeurs contestataires de ses partenaires de remanier profondément son texte en prenant en compte leurs critiques de fond. Vaste chantier pour le brillant ministre du PAM avec en perspective des heures sup non payées…

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