Une équipe du Canard s’est invitée chez le chef du gouvernement qui la reçoit, masqué et les mains gantées, dans son domicile de fonction à Rabat.
Commençons par l’actu. Vous avez organisé dans la précipitation avec le ministre de la Santé une conférence de presse, dans la soirée dimanche dernier, au sujet de l’évolution de la Covid-19 au Maroc…
C’est une belle performance dont je suis fier. Décidée dimanche matin, la conférence a eu lieu en début de soirée du même jour. Les journalistes sont venus nombreux malgré leur invitation à la dernière minute. Comme quoi, c’est dans l’improvisation et la précipitation qu’on fait les meilleures communications politiques.
Vous avez récemment rendu publique une circulaire interdisant aux ministres et autres hauts fonctionnaires de voyager au cours de cet été à l’étranger. On a du mal à saisir le sens de votre circulaire sachant que les frontières nationales sont fermées pour les Marocains ?
L’interdiction de quitter le pays pendant cet été ou ce que vous avez appelé joliment l’assignation à résidence concerne le peuple marocain dans sa globalité. Pas les privilégiés comme les membres du gouvernement et autres personnalités influentes qui ont le bras long si bien qu’elles peuvent se faire rouvrir les frontières…
Votre communiqué était donc venu pour en quelque sorte rappeler à l’ordre ceux qui se considèrent au-dessus du peuple ou n’en faisant pas partie ?
Absolument. Au Maroc, certains se considèrent plus égaux que d’autres qui représentent l’écrasante majorité. C’est pour cela que j’ai tenu à rappeler à ces privilégiés qu’ils doivent faire preuve d’exemplarité en passant leurs vacances estivales au Maroc et non à l’étranger…
Faîtes-vous partie de ces privilégiés?
Évidemment que j’en fais partie même si je ne sais pas encore voyager comme ils le font. Eux possèdent l’art et la manière de se payer du bon temps dans des pays exotiques. Mais ne vous en faites pas, j’ai commencé à prendre des cours accélérés à distance dans ce domaine très pointu où je suis totalement novice. J’apprends comment porter une Bermuda, passer une commande dans un resto chic, parler sans passer pour un nouveau riche, pardon un nouveau Premier ministre, tenir une fourchette, mastiquer sans faire de bruit et rigoler sans passer pour un clown…
En attendant de mettre en pratique les techniques de voyager que vous avez apprises, où comptez-vous vous poser pendant l’été?
Si j’arrive à dégager un peu de temps sur mon agenda inutilement chargé, je mettrais le cap sur mon bled, à Tiznit où j’ai bien envie de me ressourcer pour oublier la Covid-19 et ses tracas innombrables. Mes séjours ne coûtent pas cher, surtout que je suis d’un naturel pingre. Les dépenses somptuaires, connais pas !
Vive l’austérité et les vacances low cost.