De jeunes Marocains se lancent dans la fabrication de drones pour des utilisations civiles ou militaires, et envisagent de partir à la conquête du marché africain et même mondial. Survol d’un projet qui respire l’ambition, la fierté nationale et le patriotisme !
Il n’y a pas à dire, la nouvelle génération de Marocains est source de grande fierté. Très éloignés du stéréotype –mérité ?- du somnolent Marocain en babouches dont le seul rêve, l’objectif ultime (hors l’enrichissement), est d’aller à la Mecque et de se croire méritant de ce simple fait le port du chapelet et le fatras social qui va avec (ingénu, va !) ; très éloignés de l’image de cet insipide vieux Marocain adepte de l’import de tout et n’importe quoi et indécrottable adepte du copier-coller de tout ce qui vient du monde développé, tout en s’enorgueillissant sans scrupules de son plagiat car à la saveur couscous aux sept légumes ; très éloignés aussi et surtout de cette race de rentiers qui n’imaginent la richesse que rapide, assurée et sans grand effort ; de ces anciens « nous », ou plutôt de ces «eux » (et nous ne généralisons pas… Mais l’image est ce qu’elle est), ces homo sapiens sans rien de sage que nous connaissons si bien, les jeunes Marocains d’aujourd’hui, pour leur part, n’ont ni plomb dans l’aile ni philosophie du moindre effort dans la cervelle. Ils sont loin de ça ! Et ils rêvent grand, très grand, tout en se donnant, et c’est ce qui est merveilleux, les moyens de leurs ambitions. Et quelles ambitions ! Deux projets, à différents stades d’avancement, sont portés par de jeunes entrepreneurs du cru très qualifiés, eux-mêmes porteurs de visions. Zakaria Fahim, associé fondateur de Korair, une start-up spécialisée dans les drones, parle avant tout de sécurité nationale : « L’idée de développer un drone 100% marocain est née de notre conviction que posséder la totalité de la technologie nous donne la liberté et la flexibilité d’ajouter ou de modifier tout ce que nous voulons, à notre guise. Une autre préoccupation majeure concerne la sécurité des données. En utilisant du matériel ou des logiciels externes, nous courons le risque que le constructeur ait accès à nos données.
Deux projets, à différents stades d’avancement, sont portés par de jeunes entrepreneurs du cru très qualifiés, eux-mêmes porteurs de visions.
Ceci est particulièrement problématique en matière de collecte d’informations, car cela pourrait compromettre la sécurité nationale et la confidentialité des informations». Soulignons à ce propos que depuis juin de cette année le Maroc envisage très prochainement d’accueillir sur son sol non pas une, mais deux usines de drones du fabricant israélien Elbitsystems et que depuis déjà fin 2022, cette idée de se lancer dans la fabrication d’aéronefs d’observation, de surveillance et d’armement faisait son petit bonhomme de chemin. Par contre, selon Zakaria Fahim : « Nous croyons fermement qu’aucune technologie externe achetée ne pourrait servir notre pays et notre économie aussi efficacement que nous le pourrions. Cette initiative n’est pas seulement technologique, c’est également une question d’identité. En tant que Marocains, nous voulons prouver que nous sommes capables de réaliser de grandes avancées dans le domaine de la technologie aérospatiale, que ce soit en termes de logiciel ou de matériel. C’est un combat d’identité, de sécurité des données et de fierté nationale ». Les drones de Korair sont actuellement orientés vers des missions strictement civiles, notamment « dans l’agriculture, l’urbanisme, la surveillance, l’inspection minière et bien d’autres secteurs », mais Zakaria Fahim n’écarte pas la possibilité de l’usage militaire, par pur patriotisme : « La production ou l’achat de drones militaires sont réalisés conformément aux instructions de Sa Majesté. Cependant, si jamais on nous demandait de servir notre pays à un quelconque niveau, nous répondrions avec joie à cet appel, car notre devoir et notre loyauté envers Sa Majesté et notre cher pays sont inébranlables ». La fabrication de drones militaires 100 % marocains est-elle donc, à ce jour, un rêve encore lointain ? Mais absolument pas! Les Marocains s’y mettent déjà.
Des drones militaires 100% marocain
Soufiane Ammagui, ingénieur diplômé de l’Université Mohammed VI Polytechnique et managing partner de« Aerodrive Engineering Services» (une startup incubée au sein de la même université), se tient déjà prêt pour l’usage militaire de ses drones, même s’il propose également des utilisations civiles. Pour lui, cette idée de concevoir et de fabriquer un drone 100% marocain est globalement venue pour répondre à deux enjeux: « Premièrement, le besoin croissant à l’échelle nationale et internationale de l’usage de cette technologie, il s’agit d’un marché de 260 milliards de dollars à horizon 2030 avec une croissance de 25% chaque année, dont 60% du besoin concerne les applications défense et sécurité. Et finalement, répondre et s’aligner sur la vision et les directives royales visant l’établissement d’une industrie militaire marocaine souveraine». Mais quand on lui parle du projet de Rabat d’établir, ici au Maroc, des usines israéliennes de fabrication de drones de défense, Ammagui, au même titre que Zakaria Fahim, parait circonspect, comme si c’était inutile, voire même potentiellement préjudiciable : « A ma connaissance, c’est toujours en discussion, pas d’unité en cours de construction ou construite à ce jour. Sur un système maroco-marocain, financé par des fonds marocains, et conçus par des compétences marocaines avec un taux d’intégration important, nous sommes sûrs d’être souverain sur le contenu de ces technologies, et de réduire les dépendances aux acteurs étrangers, qui à tout moment, pour des raisons politiques par exemple, peuvent impacter la production nationale ». Rien à dire, leurs avis se tiennent. Reste donc, évidemment, à débattre du côté qualitatif.
Quid de la compétitivité ?
Soufiane Ammagui, sans conteste un excellent négociateur, affirme que pour la même configuration, sa startup est à une fraction du prix proposé par des producteurs internationaux. Ce dernier explique : « Grâce à l’écosystème aéronautique et spatial marocain représenté notamment par le GIMAS et l’AMC, nous parvenons à proposer des solutions très compétitives ». Et outre cet aspect de compétitivité, les drones d’Ammagui, à l’en croire, offrent une meilleure précision : «Nous représentons également un élément de différenciation vu que les systèmes proposés peuvent réaliser des opérations maritimes, décoller et atterrir, depuis une plateforme mobile notamment, une fonctionnalité qui n’existe toujours pas avec la précision proposée à l’échelle internationale ». Zakaria Fahim, lui, joue sur un autre plan et n’est pas en reste en matière de marketing : « En termes de matériel, le drone en lui-même n’est plus une nouveauté; de nombreux pays ont la capacité de construire des drones volants. Cependant, ce qui distingue vraiment un drone, c’est la technologie qui se trouve derrière. Dans ce contexte, nous préférons mettre l’accent sur le logiciel, qui est véritablement le cerveau du drone. Notre technologie peut être très compétitive par rapport à des entreprises internationales, notamment chinoises ou françaises, surtout sur le marché africain ».
Et de –très- grandes ambitions en prime !
C’est avec de grands rêves qu’on parvient à de grandes choses. Et nos deux entrepreneurs ont de sacrées ambitions pour l’avenir. A vous de juger : « Notre vision dépasse la simple technologie des drones. Nous menons d’autres recherches qui, selon nous, rendront les drones obsolètes d’ici 2030 à 2035. Cependant, nous souhaitons maximiser leur potentiel d’ici là », dixit Zakaria Fahim, qui continue : « Sur le long terme, notre ambition est de développer la technologie aérospatiale pour des fins environnementales. Je suis convaincu qu’un jour, les enjeux environnementaux seront aussi considérés comme des enjeux de sécurité, car la durabilité de notre planète face à la situation environnementale actuelle est incertaine. Pour concrétiser ces ambitions, nous aurons besoin de financements, de partenariats solides et d’une reconnaissance croissante de l’importance de la technologie aérospatiale dans la protection de notre environnement ». Quant à Soufiane Ammagui, il n’a également rien à envier à Korair question ambitions : « À moyen et long terme, nous ambitionnons de devenir le leader de la production de drones tactiques dans la région MENA, à être classés parmi les dix meilleurs producteurs mondiaux d’ici trois ans, et à envisager une introduction en bourse dans les cinq prochaines années. Nos objectifs sont ambitieux, et nous misons sur des mécanismes de financement et d’accompagnement appropriés qui tiennent en considération la dimension stratégique de notre industrie, nous souhaitons à tout prix maintenir la production au Maroc malgré les offres internationales ».
De grandioses ambitions pour lesquelles il faut bien qu’on les soutienne, directement ou en coulisses, et qu’on les éloigne tant que faire se peut de la manière de voir les choses de l’australopithèque, ce Marocain conservateur qui ne conserve pas grand-chose de louable mais qui, par la force des choses et de ses ruses et stratagèmes empiriques (unique œuvre de sa vie), possède la puissance et les moyens de freiner notre évolution à tous, ou de nous faciliter la traversée, selon son humeur du jour. Et nous ne le pointons pas du doigt pour rien. Son concours est nécessaire, voire même vital, puisque le facteur temps est important. Soufiane Ammagui le confirme : « Le temps est l’élément-clé dans cette course de maîtrise technologique, vu que les systèmes aériens sans pilote sont juste une étape vers des systèmes robotisés collaboratifs reliant drones terrestres, marins, et aériens. Ce qui représente le prochain virage technologique sur ce secteur, avec des démonstrateurs présentés par le DARPA aux USA, ou même IAI en Israël. Il faut la mobilisation de plusieurs acteurs institutionnels pour mettre en place les bases afin d’installer cette industrie au Maroc». La bureaucratie doit donc impérativement s’adapter, et très vite. Un échec après tentative vaut toujours mieux qu’aucune tentative du tout, à cause de la lenteur de réflexion et du caractère conservateur et archaïque de certains dinosaures dont on se passerait bien. C’est de technologie 100% marocaine qu’on parle. Et de sécurité nationale. Le test est permis! Peu importent les coûts… Défense de tergiverser.